La crise du papier et de son approvisionnement continue d’angoisser, à raison. Car avec elle, une autre pénurie sévit : celle des recrutements pour les entrepôts. Emplois mal payés, éprouvants… les candidats ne se bousculent pas au portillon. Et depuis des semaines, les transporteurs ne suivent plus : une carence de chauffeurs routiers est partout observée.
Le 24/11/2021 à 15:58 par Nicolas Gary
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24/11/2021 à 15:58
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Dès septembre, les premiers signes de rouages grippés apparaissaient chez les distributeurs : le travail tournait au ralenti, la surcharge se faisait sentir, malgré une rentrée littéraire relativement calme. « Nous avons eu des plaintes de libraires, souvent remontées en réunion, mais l’on se demande si la direction a conscience du retard accumulé », nous indiquait mi-octobre une responsable d’Interforum.
Le volume d’envoi, doublé des problèmes logistiques de livraison, n’est cependant pas allé en s’améliorant : le représentant de la Fédération des transporteurs routiers en Limousin donnait le ton du territoire entier. « Aujourd’hui on a des marchés, des contrats auxquels les entreprises ne peuvent plus répondre. C’est des véhicules qui restent arrêtés sur les parkings et c’est des clients qui peuvent être insatisfaits puisqu’il y a des retards de livraison. Il y a d’ailleurs des pénuries, ça se ressent dans les commerces », assurait François Cenut auprès de France Bleu début novembre.
D’autant qu’eux-mêmes affrontent une hausse du coût des carburants, fragilisant des entreprises déjà en proie aux manques de personnels. Dans ce contexte, un peu plus largement, le directeur général de MDS (Média Participations) a adressé un courrier aux libraires de l’Hexagone. Plusieurs points en ressortent, illustrant les difficultés globales.
D’abord, la hausse de l’activité de 84 % en regard de 2020 et des « progressions inhabituelles [ayant] considérablement impacté nos délais habituels de préparation de commandes ». La société a d’ailleurs tenté de pallier cette recrudescence, avec plusieurs mesures — allongement des horaires en semaine, travail tous les samedis et les jours fériés, mise en place d’une équipe de nuit pour le réapprovisionnement et le rangement. Mais rien n’y fait. Et cela entraîne de nouvelles mesures.
« À l’approche des fêtes, nous sommes parfaitement conscients que les commandes enregistrées chez MDS jusqu’au lundi 13 décembre, 9 heures, doivent impérativement être livrées avant le 24 décembre dans vos librairies. Nous vous garantissons tout mettre en œuvre pour tenir cet engagement », note le directeur général. « Pour toutes les commandes de réassort, les titres dont la quantité commandée est inférieure ou égale à 2 exemplaires ne seront pas préparés. »
Crédits : Robson Hatsukami Morgan/Unsplash
Jusqu’au 30 décembre, donc, 3 titres minimum commandés, pour maintenir l’approvisionnement des points de vente. En outre, indique le courrier, cette approche aurait des vertus écologiques, puisque des expéditions fractionnées augmentent le bilan carbone des ouvrages. Le retour à la normale sera permis par les investissements technologiques réalisés, et s’accompagnera, pour les quatre offices de janvier 2022, d’une échéance de 60 jours. Autrement dit, les quatre temps de sorties des ouvrages.
Trois exemplaires minimum pour les réassorts, voilà qui n’a pas manqué de faire bondir le Syndicat de la librairie française. « Nous sommes très surpris du manque d’anticipation de votre part », répondent dans un courrier Anne Martelle, Présidente du SLF, et Amanda Spiegel, Présidente de la commission commerciale . D’autant que les décisions qu’énonce MDS auront des conséquences sur « la relation à nos clients ».
Et d’énumérer, dans un inventaire à la Prévert, une série d’interrogations bien pimentées :
Savez-vous que l’interdiction des commandes à l’unité nous empêche de répondre aux commandes de nos clients comme des bibliothèques avec lesquelles nous sommes en marché ?
Comment faisons-nous pour annuler les commandes unitaires passées sur nos sites internet ? Comment faisons-nous pour expliquer à un client qui attend sa commande depuis plusieurs semaines qu’il va falloir l’annuler ? Comment faisons-nous pour expliquer à un client que nous refusons sa commande alors qu’il peut se servir auprès d’Amazon ?
Comment faisons-nous pour refuser les commandes à l’unité alors que la loi nous fait obligation de les servir ? Comment faisons-nous pour expliquer à un client impatient d’acheter son cadeau que ce n’est pas de notre faute, mais de celle d’un distributeur ? Comment faisons-nous pour expliquer à une bibliothèque que nous n’honorerons pas ses commandes, en infraction avec le contrat qui nous lie à elle ?
Courrier du SLF à MDS
Mais la réponse du berger à la bergère s’accompagne également de revendications : le SLF rejette ainsi l’idée de commandes par trois, demande que les commandes unitaires soient honorées jusqu’au 30 novembre — de fait, toute commande après cette date serait livrée… après Noël.
Et dans le même temps, le Syndicat réclame des compensations, qui vont au-delà des échéances proposées :
• un crédit immédiat pour les retours saisis à partir de novembre 2021 et jusqu’à ce que la situation revienne à la normale ;
• 30 jours d’échéance supplémentaire sur le réassort, à partir de novembre 2021 et jusqu’à un retour à la normale ;
• des mesures commerciales, à partir de janvier 2022, sous forme de points de remises supplémentaires sur le réassort et l’office, afin de compenser le préjudice financier subi par les libraires.
Plusieurs constats s’opèrent, communs à l’ensemble de la chaîne de distribution. « Nous avons recours à des intérimaires, avec un problème de pérennisation de l’embauche — parfois des débutants, au risque de provoquer des accidents », souligne-t-on chez Interforum (filiale diffusion/distribution d'Editis). « La disparition des salles des ventes dans les différents groupes a également pesé sur les échanges avec les libraires. »
Côté librairies, on fait état, chez MDS « d’une catastrophe depuis plusieurs semaines ». Mais ils sont nombreux à se sentir solidaires vis-à-vis des salariés : « On leur demande de soutenir un rythme éprouvant, sans qu’ils parviennent à résorber les retards. Certaines des nouveautés de début novembre ne me sont toujours pas parvenues », indique un libraire en région. « On l’a bien vu durant le premier confinement : quand la logistique est sous l’eau, ça devient l’enfer pour tout le monde. »
L’approche de MDS s’avère radicale, « mais on comprend qu’ils aient besoin d’agir : les salariés en entrepôts vivent un enfer, on redoute les burn-out… Mais est-ce que le problème ne viendrait pas de l’outil logistique, pas au point ? », s’interroge-t-on chez un libraire spécialisé BD.
Vincent Montagne, PDG de Média Participations - ActuaLitté, CC BY SA 2.0
Quant à ces commandes par trois exemplaires, on fronce les sourcils : « Sur des titres à rotation très faible, en commander trois, c’est l’assurance qu’il y en aura deux au retour », pointe une libraire aguerrie de la région parisienne. « Commander des articles dont je n’ai pas besoin, cela revient à faire peser leurs difficultés sur ma trésorerie. Et le retard de crédits des retours MDS finira par être énorme. »
D’autant qu’à compter du 1er janvier, l’ensemble des catalogues Le Seuil/La Martinière passera définitivement chez MDS. « Qu’ils invoquent la hausse des flux, on le saisit : tous les distributeurs l’ont senti passer, à différents niveaux. On imagine bien que pour eux, l’intégration de ces ouvrages ajoute de la complexité à l’ensemble », conclut la libraire.
En revanche, plusieurs autres se montrent sceptiques, à l’idée que cette situation serve les intérêts des grandes plateformes. « La vente en ligne fait du volume, et commande donc beaucoup. Mais pour le coup, ce sont des expéditions unitaires — précisément ce que souhaite éviter MDS. Une typologie de réassort pénible à traiter, niveau logistique. En l’état, les plateformes seraient plutôt desservies. »
Sauf que, selon les informations obtenues par ActuaLitté, cette question des réassorts unitaires serait réglée depuis plusieurs semaines : Amazon favoriserait désormais les commandes hebdomadaires. En revanche, l’ouverture d’un entrepôt Amazon à Dourdan (91), où se trouve également celui de MDS, aurait-il conduit à des vases communicants chez les salariés ? Difficile à dire… « On dit que les salaires seraient significativement supérieurs chez Amazon… on le dit… »
Le gérant de plusieurs librairies sur Paris souligne pour sa part toute l’incongruité de la décision : « Pour les petits et moyens, l’alternative est simple : mettre en péril sa boutique en commandant plus de titres que nécessaire, ou se mettre hors la loi — le tout sans même savoir quand il recevra sa commande. C’est incroyable qu’un fournisseur, pour la première fois, nous mette en porte-à-faux vis-à-vis de la loi Lang. »
La loi Lang ? Celle sur le prix unique du livre ? Précisément. Article 1, elle stipule « Tout détaillant doit offrir le service gratuit de commande à l’unité. » En clair, un libraire n’a pas le droit de refuser la commande d’un lecteur — mais l’obligation qu’impose MDS de trois exemplaires a des répercussions financières… ou légales. « On serait obligé de prendre trois livres pour un seul que l’on n’a pas en stock », s’étrangle une libraire parisienne.
Et comment expliquer aux clients ce dilemme économico-juridique ? « Les gros vont massifier leurs commandes, les petits substitueront un ouvrage de ce distributeur par celui d’un autre », tout simplement, poursuit notre interlocutrice. « Sans pour autant régler la question des retours qui s’accumuleront. Ce n’est pas un accident industriel, mais cela a quelque chose de méprisant de la part d’un de nos importants fournisseurs. »
En outre, s’il l'on retourne deux livres, après en avoir commandé, et donc fait livrer, 3, le bilan carbone est sérieusement malmené. Beaucoup plus qu’avec un seul exemplaire transporté lors d’une commande unique…
Le sujet de ces commandes unitaires ne sort d’ailleurs pas de nulle part : la Commission de liaison interprofessionnelle du livre (CLIL), qui réunit un collège d’éditeurs, distributeurs et libraires le déplore régulièrement. La librairie représenterait un vrai problème, du fait de ces demandes de réassort à l’unité… mais qui découlent de ce qu’un client souhaite acheter le livre.
ActuaLitté, CC BY SA 2.0
Et la résistance s’organise, d’ores et déjà. « En raison de problèmes logistiques manifestement irrésolubles de la part d’un grand distributeur de livres (MDS) d’ici le 24 décembre, l’ensemble de la chaîne du livre ne peut fournir en moins de 3 exemplaires à la commande les titres des éditeurs suivants », explique la librairie de Boulogne-Billancourt Les mots et les choses. Et de fournir les noms des différentes maisons du groupe Média Participations.
« Nous en sommes profondément navrés et vous recommandons de vous reporter sur d’autres éditeurs », achève-t-elle, tout en assurant que les titres clefs de ces éditeurs restent en stock.
« Les reports de ventes, c’est le cœur de métier du libraire : le conseil au client. N’importe quel professionnel se sortira aisément de ce 3 ou rien. Il suffit d’expliquer que la commande n’arrivera que dans un mois, et le client acceptera bien volontiers de se faire recommander un autre ouvrage », s’agace-t-on sur des groupes de libraires. Or, depuis le message de MDS, certains libraires ne manquent pas de s’en prendre à la diffusion. Que les représentants payent les pots cassés d’une communication très maladroite, voilà qui en dit long…
Nul doute, d’ailleurs, que Média Participations a déjà pris en compte les pertes financières, aussi bien que le déficit d’image qu’entraîneraient des reports de ventes. « Personne ne se souvient, voilà une quinzaine d’années, que Volument, justement à la période des fêtes, avait connu un accident informatique du même genre ? Ces choses arrivent : que les libraires nous tombent dessus, c’est dingue. »
Plusieurs petites maisons nous ont fait part de leurs inquiétudes. « Sous la partie visible de l’iceberg, il y a la réalité des ventes de Noël : un libraire aura tôt fait de substituer un ouvrage à un autre, en comprenant que le distributeur ne peut pas assurer la livraison. Ou impose ces conditions commerciales étonnantes », nous confie l’un d’eux. « Il faut bien occuper les tables, et disposer d’une offre pour les fêtes de fin d’année. »
Suivant les segments éditoriaux, ces ventes de fin d'année pèsent jusqu'à 15 % du chiffre d'affaires annuel, tout de même. « Donc des droits perdus pour les auteurs, sur une période cruciale. »
Conclusion ? « L’impact pourrait être limité sur les titres qui se vendent bien. Mais pour ceux qui, justement, sont achetés par les points de vente à l’unité, c’est la fin. Aucun libraire ne commandera trois ouvrages s’il n’a de demande que pour un seul », se désole l’éditeur.
« Il faudra sérieusement parler avec MDS des conséquences de leur décision, et des compensations induites pour nous. Le manque à gagner sur les cadeaux de Noël — le livre comme achat d’impulsion — c’est uniquement durant les fêtes. Si les livres n’existent pas, c’est une perte significative », reprend-il. Et d'insister : « D’autant que, rêvons tout haut : si une commande de trois exemplaires est passée, et que deux sont renvoyés, qui paye ces frais de retours ? L’éditeur. »
Reste en effet à poser clairement les faits de l’année 2021, pour mieux comprendre. D’abord, le recrutement chez MDS, un épineux souci que personne ne remet en cause. D’autre part, l’arrivée du Seuil/La Martinière, qui a achevé de tendre la situation. « Il y a des erreurs de préparations, bien entendu, mais une hausse de 84 % de l’activité, qui l’aurait encaissé en évitant la sortie de piste ? », questionne un observateur.
ActuaLitté, CC BY SA 2.0
« Ils sont bel et bien victimes d’un accident industriel… positif : quand on commercialise le tome 6 de Blacksad, le nouveau Goldorak et le tome 28 de Blake Mortimer, cela représente plus de ventes que le prix Goncourt. Nettement plus. » Données à l’appui, 90.813 et 80.148 ventes pour les deux premiers titres. Le tome 28 de Blake et Mortimer vient juste de sortir, mais le précédent avait réalisé 233.224 exemplaires. À titre de comparaison, La plus secrète mémoire des hommes, prix Goncourt 2021 affiche 86.595 exemplaires (chiffres : Edistat).
Et impossible de passer à côté de la déferlante manga qu’a enregistrée l’année 2021. Selon l’institut GfK, 28 millions d’exemplaires écoulés entre janvier et août 2021, soit une hausse de 124 % des ventes. Le groupe Média Participations compte tout de même la maison Kana (Naruto et ses déclinaisons, Death note, etc.), celui-ci a pu “subir” l’explosion des ventes, que le Pass Culture a accentuée. Pour mémoire, Naruto avait fait près de 1,2 million d’exemplaires en 2020 — le dernier tome étant sorti en 2016.
À LIRE : 71 % des achats Pass Culture sont des mangas
Troisième plus grand vendeur de mangas en France, après Glénat (leader) et Pika/Nobi-Nobi, Kana aura vécu l’effet levier du Pass, comme d’autres. Pourtant, Hachette assure la distribution de tous les autres faiseurs du segment (Glénat, Delcourt, Bambou) et Interforum reste très solide : « Mieux structurés, peut-être », poursuit l’observateur.
Alors quid ? « La logique des trois exemplaires ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt : d’abord, c’est un effort de transparence assez rare dans la distribution. Ensuite, et de toute évidence, cela privilégiera les best-sellers. Donc, assure aux libraires que les titres qui se vendront durant les fêtes seront bien là », reprend-il. « Mais il ne faut pas avoir la mémoire trop courte : au sortir du premier confinement, ces mêmes libraires ont opté pour les best-sellers, avec des retours massifs. »
Autre époque, autres mœurs ? Notre observateur conclut : « La chaîne du livre est globalement crispée, on cherche, plus que d’habitude, des fautifs. La question est : cela fonctionnera-t-il ? »
Les réseaux de librairies BDfugue et Momies, ainsi que plusieurs responsables de rayon BD et gérants de librairies spécialisées ont été sollicités. Marasme, calamité, vaste bordel… les qualificatifs ne manquent pas chez les libraires pour décrire la situation, alors que les fêtes de fin d’années approchent.
Pris de court, les voici entre le marteau et l’enclume, avec la ferme intention de ne pas prendre de coups de la part de lecteurs mécontents. Conclusion, s'il n'est pas possible pour eux d'être fournis en bandes dessinées, et autres titres dont s'occupe MDS, ils sont bien décidés à se passer des titres que distribue la filiale de Média Participations.
Par Nicolas Gary
Contact : ng@actualitte.com
22 Commentaires
RP
24/11/2021 à 16:32
Des mails, des appels, avec une forme d'arrogance que l'on ne connaissait pas à la profession de libraire. Jamais vu ça... Et merci de préciser que nous, représentants, n'y sommes pour rien !
Acharlotte
26/11/2021 à 10:07
Pour nous libraires c'est du jamais vu non plus. Merci à MDS de nous mettre autant dans l'embarras et de rendre cette fin d'année encore plus compliquée et surchargée qu'elle ne l'ait habituellement. Et la communication de MDS n'aide vraiment pas à se détendre. A chaque fois on hallucine un peu plus. Les responsables de tout cela sont vraiment de tristes sires :(
Un libraire
24/11/2021 à 18:00
Bonjour,
"3 titres minimum commandés, pour maintenir l’approvisionnement des points de vente. En outre, indique le courrier, cette approche aurait des vertus écologiques, puisque des expéditions fractionnées augmentent le bilan carbone des ouvrages".
Si nous triplons les commandes unitaires, plus de poids plus de colis, puis renvoi des deux exemplaires surnuméraire donc re- camion, re-colis. Je vois mal l'aspect écolo ce va-et-vient.
" quand on commercialise le tome 6 de Blacksad, le nouveau Goldorak et le tome 28 de Blake Mortimer, cela représente plus de ventes que le prix Goncourt. Nettement plus. "
MDS, en BD, c'est du lourd chaque Noël ! Quand ça n'est pas Blacksad ce sont les Vieux Fourneaux, etc. etc. La BD MDS c'est toujours un enjeu en fin d'année.
"D’autant que, rêvons tout haut : si une commande de trois exemplaires est passée, et que deux sont renvoyés, qui paye ces frais de retours ? L’éditeur. "
Et le libraire paie le transporteur à l'aller, le réceptionnaire et le transporteur dans l'autre sens. Et puis, les avoirs ne sont pas évoqués. Quand verrons-nous le crédit de ces doublons retournés ? On ne sait rien de ce retard. Ils ont délaissé le traitement des colis de retour au profit des expéditions ?
"Mais il ne faut pas avoir la mémoire trop courte : au sortir du premier confinement, ces mêmes libraires ont opté pour les best-sellers, avec des retours massifs. " Pas tous.
Il vaut mieux du retard que de refuser de servir des livres commandés à l'unité. S'en prendre aux représentants est absurde. Les clients ont du mal à digérer l'info également.
Si vis pacem, para bellum
24/11/2021 à 20:12
Juste une question : le groupe a dealé la fin de la distribution Volumen par Interforum à l’arrivée de Vivendi, il y a donc trois ans. Le temps pour moderniser l’outil industriel.
Pourquoi cela n’a-t-il pas été fait ?
ex-Volumen
24/11/2021 à 22:28
Je me souviens parfaitement du marasme dans lequel Volumen avait pataugé en 2004. Fallait le vivre pour le croire.
L'impératif de regrouper La Martinière avec Le Seuil avait conduit à multiplier les boulettes grotesques, entraînant, dans le volet informatique de la distribution, des conséquences funestes.
A la différence que le groupe MP n'a pas vraiment pour lui ni la précipitation ni l'urgence que Hervé de la Martinière et ses équipes faisaient peser. La vente de Seuil/LM s'est faite en septembre 2017, validée peu après : cela fait au moins trois ans, voire un petit quatre, que l'intégration est en cours.
On met de côté les négocations avec Editis et on se pose une seule question : ils ont fait quoi ?
CHRISTOPHE AUBERT
25/11/2021 à 07:04
Si je me souviens bien, les problèmes d'alors étaient venus du fait que la direction de La Martinière n'avait à aucun moment préparé avec les spécialistes du Seuil, les changements informatiques qui avaient suscités les problèmes logistiques, en gros ils avaient vu bien trop petit par rapport à la réalité des mouvements. Est-ce que ce ne serait pas le cas encore une fois chez MDS, avec une direction qui passerait à coté de la réalité ? Celle-ci avec la venue des livres du Seuil pour janvier, et l'augmentation très rapide de ses ventes, et la modification tout aussi rapide de ses équipes, n'aurait peut-être pas assez pris en compte que derrière chaque décision de dirigeants, il y a forcément une réalité à construire, qui si on la minore en se disant "que cela passera" finit toujours par accrocher les murs ?
Mb
24/11/2021 à 22:36
Juste un petit mot pour dire que c'était Volumen et non Volument et tout le monde se souvient parfaitement que c'est ce qui avait signé la fin du groupe logistique en question. (Qui a été repris ensuite par Interforum).
Ismaël
25/11/2021 à 11:19
Mb, juste une petite précision, vous allez vite en besogne en indiquant que "l'accident" informatique de 2004 chez Volumen, et qui avait grandement pénalisé la rentrée littéraire de l'époque et les ventes de fin d'année, a ensuite signé, dites-vous "la fin du groupe logistique en question"... C'est faux. Volumen s'est tout à fait remis en ordre de marche par la suite, et la diffusion/distribution ne fut vendue à Interforum qu'en 2015, soit 11 ans après l'épisode calamiteux de 2004... Alors certes, cela a fini par impacter le groupe de l'époque, avec le départ de certains éditeurs diffusés importants (mais pas seulement à cause de l'incident en question), mais cela n'a pas signé "la fin du groupe" qui a continué à fonctionner de longues années, il ne faut pas exagérer.
lettres Vives
25/11/2021 à 01:22
Tout est absurde dans cette situation.
On essaie de justifier un accident industriel dû à la concentration capitalistique incontrôlée du secteur (voilà que je me réveille insoumis, n'importe quoi !) par des éléments factuels.
La progression du secteur n'est pas imprévisible ni soudaine, elle est constante et importante depuis des mois. La BD a le vent en poupe grâce en partie au manga et au pass culture, les articles de presse, même pas spécialisée, sont surabondants sur ce sujet depuis des mois.
Noël se déroule encore cette année en décembre, contre toute attente, et cela depuis des années, et depuis des années ce distributeur est alerté sur ses faiblesses par les équipes de diffusion.
Le planning des grosses sorties en BD est connu des mois à l'avance, et à part peut-être Goldorak, il n'y a pas de succès inattendu, seulement de la grosse artillerie.
L'arrivée en distribution de groupes de diffusion comme Auzou ou le Seuil Jeunesse n'est pas non plus une surprise, sauf à croire en l'apparition d'un variant contagieux de la maladie d'Alzheimer chez les dirigeants.
La solution proposée, l'augmentation du nombre d'ouvrages commandés, en triplant le volume à préparer sur certains titres et créant des ruptures fictives, parachèverait la paralysie totale du groupe par l'augmentation des volumes traités à l'aller et au retour.
Alors quoi ?
D'abord dire que cette situation est lamentable et qu'elle affectera durablement les liens avec ce distributeur.
Ensuite que nous libraires avons besoin d'une parole forte du SNE et de son Président (futur-ex ?!) pour désavouer ces pratiques, évidemment contraires à la diversité éditoriale, et à la confiance nécessaire entre acteurs de la chaîne du livre et à loi sur le prix unique.
Et il est impossible de penser travailler des nouveautés de début d'année alors même que nous ne savons pas dans quelles conditions elles seront traitées et mises en place : chez qui, quand, quelle égalité des dates de livraisons pour les mises en place...
Alors les demandes formulées par le SLF ne devraient même pas être discutées mais appliquées immédiatement.
Donc dans l'attente il n'est pas pensable que les commandes passées par des plateformes en ligne puissent être traitées jusqu'à règlement de cette situation. Il n'y a pas de rupture d'égalité de traitement puisqu'il y a d'un côté des clients librairies, de l'autre des plateformes.
Et enfin, il est vraisemblable que la course à "c'est moi qui ait la plus grosse", montre encore une fois ses limites et ses faiblesses dues à ses excès, et il est vraisemblable qu'une reflexion doit s'ouvrir sur la question du diktat du prix bas du livre, en questionnant de manière sérieuse l'élasticité-prix, et par la même occasion la répartition de la valeur dans la chaîne entre ceux qui ont le pouvoir mais pas même la capacité de bien faire leur métier et les autres acteurs.
Pop corn
25/11/2021 à 06:19
Le spectacle est joli et j'y assiste depuis mon canapé, avec un peu de pop-corn.
Signé : un maillon (vraiment) faible.
Gintoki
25/11/2021 à 06:20
vu ça sur Twitter (@librairesecache).
Donc pour garder leurs clients (normal donc) les libraires vont commander en triple et renvoyer 2/3 des commandes dans 2-3 mois (bravo le bilan carbone), j'espère que les librairies signaleront mieux ces livres en surplus (pour éviter les retours).
les retours sont bien payés par les éditeurs (il me semble), "drôle" de stratégie.
pour mon Noel se sera du Blu-ray et UHD avec :
-BAC Nord - 4K Ultra HD + Blu-ray
-Battle Royale [4K Ultra HD Édition Ultimate]
-Citizen Kane - Edition Collector Limitée Blu-ray 4K Ultra HD
-Coffret Audrey Hepburn Exclusivité Fnac Blu-ray
-Conan, le fils du futur - L'intégrale Blu-ray
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-Free Guy - Edition Spéciale Fnac Steelbook Blu-ray 4K Ultra HD
-Incassable - Edition Spéciale Fnac Steelbook Blu-ray 4K Ultra HD
-Jungle Cruise - Edition Spéciale Fnac Steelbook Blu-ray 4K Ultra HD
-Kaamelott : Premier Volet - Edition Epique Blu-ray 4K Ultra HD
-Les Sorcières d'Akelarre [Blu-Ray]
-Mad Max Anthologie [4K Ultra HD Édition boîtier SteelBook]
-Mulholland Drive - Édition Collector - 4K Ultra HD + Blu-ray
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-Pandora [Blu-Ray]
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-Rick and Morty - Saisons 1-4 - Blu-ray
-Rick and Morty - Saison 5 - Édition SteelBook
-Supergirl [Blu-Ray]
-Terminator 2 [4K Ultra HD SteelBook-30ème Anniversaire]
-The Suicide Squad - Edition Spéciale Fnac Steelbook Blu-ray 4K Ultra HD
peu de livres :
-A Certain Scientific Railgun T3
-Aria The Masterpiece T4 à T7
-Escale à Yokohama T1 à T6
-Gintama T70
-Isabella Bird - Femme exploratrice T8
-Jujutsu Kaisen T12
-Kaiju N°8 T2
-Kowloon Generic Romance T3
-L'Histoire de l'Empereur Akihito
-Natsuko no Sake T6
-Neon Genesis Evangelion - Nerv Edition T1 (la date est douteuse)
-Saotome - Love & Boxing T5
-Shikimori n'est pas juste mignonne T1 & T2
-Unsung Cinderella T5
(peu de livres) mais du réassort avec Aria et Escale à Yokohama (bon les Meian je les achètent sur leur site), reste Evangelion dont je suis par certain de la sortie (31 Décembre)
Toinou
25/11/2021 à 08:02
J'aime bien la réaction de libraires disant qu'ils allaient "simplement substituer un titre à un autre ou pousser le client vers un autre titre.
Je dois apparemment être un type de client très atypique : lorsque je veux un titre, c'est celui-là exactement et pas un autre, on ne me fera pas substituer. Après, je suis rarement pressé, donc je ne devrais pas trop poser de problème.
Un autre observateur
25/11/2021 à 08:56
Bonjour monsieur Gary,
C'est bien de prendre l'avis de MDS mais pourquoi les appeler "un observateur" ?
Ce qui serait mieux, c'est de prendre sa voiture et d'aller sur place, interroger les salariés, les intérimaires, enquêter sur les conditions de travail, vérifier les déclarations des uns et des autres.
On a besoin de savoir, merci de nous informer !
Nicolas Gary
25/11/2021 à 09:13
Bonjour cher observateur
L'accès aux entrepôts n'est pas chose aisée sans un Virgile pour vous guider à travers les Enfers – et si même Dante en eut besoin, imaginez ce qu'il en serait pour moi.
Aussi, avant de prendre une voiture, il importe de préparer son voyage, comme pour tout périple.
J'enfonce peut-être là une porte ouverte.
Pascha
25/11/2021 à 09:19
Bonjour,
Ce distributeur a clairement manqué d'anticipation, (on aurait du mal à croire que sa situation soit lié à un problème financier). Il aurait pu encourager le minimum de commande via gratification plutôt que choisir une solution vécue comme pénalisante.
Mais je trouve la réaction et les revendications des libraires disproportionnées par rapport au préjudice théorique causé par les mesures de ce distributeur. Une posture classique dans leur relation à la distribution, dont les libraires ne connaissent pas du tout la complexité. Un libraire qui ne peut pas faire 2 commandes par semaine auprès de MDS auxquelles joindre ses commandes clients a du souci à se faire.
Libraire5363
25/11/2021 à 09:31
84% d'activité en plus depuis octobre ! Ce chiffre est relayé partout. Mais quelqu'un peut-il donner la part de l'intégration d'Auzou par MDS dans cette augmentation. Je ne suis pas sûr que les ventes de livres en librairie ont bénéficiées de la même progression... Attention aux messages qui pourraient être contreproductifs. On ne peut pas dire que le mois de novembre soit ultra dynamique en librairie.
Marianne
25/11/2021 à 10:03
"Les reports de ventes, c’est le cœur de métier du libraire : le conseil au client. N’importe quel professionnel se sortira aisément de ce 3 ou rien. Il suffit d’expliquer que la commande n’arrivera que dans un mois, et le client acceptera bien volontiers de se faire recommander un autre ouvrage », s’agace-t-on sur des groupes de libraires."
Alors là, quel mépris souverain des libraires, des représentants ou des distributeurs pour les lecteurs ... parce que bien sûr, si je veux un livre pour Noël, il suffit qu'un librairie me montre celui qu'il a en tête de gondole à la place pour que je change d'avis ?! Ben voyons ... Et ça c'est mon avis en tant que lectrice ...
En tant que professionnelle du livre, étagère "bibliothécaire", je reste aussi confondue par ce diktat du distributeur pour les livres commandés ... ma libraire vient de m'informer qu'une partie des titres commandés il y a 10 jours ne sera pas livrés en fin d'année ... elle m'a expliqué pourquoi ... je lui ai demandé les éditeurs concernés pour leur faire un courrier, et j'hallucine : Le Seuil Jeunesse, La Poule qui pond (petit éditeur de ma région) et j'ai oublié le troisième concerné ... donc, je ne peux plus acheter de livres chez eux, sauf leur dernière nouveauté qui, si j'ai de la chance, sera en stock dans les deux petites librairies où nous faisons nos achats !? Parce que je ne risque pas de commander leurs livres en 3 exemplaires, et je comprends parfaitement que ma libraire rechigne à le faire et à se retrouver avec 2 exemplaires sur les bras ...
Et pendant ce temps-là, sur Amazon, les lecteurs lambdas peuvent commander tout ce qu'ils veulent ... ils auraient tort de se priver ... et quand les petites librairies auront disparu, ces messieurs les distributeurs devront composer avec les conditions de l'ogre, ça devrait leur plaire ...
Hélas
25/11/2021 à 10:26
La situation est terrible. Et elle nous rappelle que la librairie est un commerce, et que ce commerce, s'il a ses spécificités, est aussi un commerce rattrapé par les travers de la société et de la consommation. Parce que, même si cela fait mal à dire, plus que lire nous consommons du livre et l'économie du livre s'articule autour de cette consommation. L'acheteur veut tout tout de suite (succès des plateformes de commande en ligne), Noël devient une période cruciale pour les finances de tous... Et les collectivités, parce qu'il faut des critères aux marchés, peuvent aussi mettre des impératifs de délais.
La balle est peut-être aussi dans le camp des clients (qui ne sont pas toujours les lecteurs d'ailleurs).
Ant Editions
26/11/2021 à 09:05
Il y a un certain paradoxe dans cette histoire, qui illustre bien les différents soucis de la chaîne du livre.
Etant indépendant et assurant ma propre diffusion/distribution, je connais parfois des difficultés avec quelques libraires : certains disent à leur client qu'ils commandent (mais ils ne le font pas car c'est contraignant en terme de facturation), les frais de port sont un épineux problème et le règlement de la commande peut être long, très long (parfois un an pour une commande de moins de 20€ !).
Il y a tout un système à revoir, bien plus vertueux pour l'ensemble des acteurs de la chaîne du livre (des autrices/auteurs jusqu'aux libraires).
Nous sommes tous dans la même galère, donc autant se serrer les coudes.
Marie-christine Courteille
26/11/2021 à 13:25
Et bien, comme le reste de l'économie : privilégiez le circuit court en commandant des livres au petit éditeur le plus proche de chez vous....
Marianne
27/11/2021 à 06:22
Mme Courteille, excusez-moi, mais ce genre de conseil est un peu réducteur (vous voyez une bibliothèque qui ne proposerait que de l'éditeur/auteur régional sur ses étagères ? je ne suis pas sûre que les lecteurs seraient ravis, et ils auraient bien raison. Diversifier, c'est bien, cantonner à, ça l'est moins).
Et d'autre part, comme je le signalais dans mon précédent commentaire, les petits éditeurs régionaux sont aussi concernés, puisque La Poule qui pond, par exemple, dans ma région, passe par ce distributeur ...
Si vous conseillez à tous les éditeurs d'arrêter de passer par des distributeurs et de traiter en direct avec tous les libraires (voir avec les particuliers), ça risque d'être compliqué pour eux ...
Un libraire
28/11/2021 à 10:31
Madame, merci pour ce commentaire clair et utile.