Aux Archives nationales à l’Hôtel de Soubise, du 20 mars au 1er juillet prochain, plongez au cœur de l'histoire tumultueuse du sacrilège, où le spirituel et le temporel travaillent à ne faire qu’un, mais lequel ? Le dernier discours de Robespierre, l'œil de Léon Gambetta, le testament de Louis XVI… Des trésors historiques et autres documents d'archives inédits, pour une expérience solennelle, et parfois moqueuse, aux frontières du divin et du pouvoir.
Le 22/03/2024 à 17:32 par Hocine Bouhadjera
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Publié le :
22/03/2024 à 17:32
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Une atmosphère grave, cérémonielle même, certains diront guindée, d’autres majestueuse, qui passe par une lumière faible, comme celle des églises. Elle contraste avec la lumineuse entrée de l’auguste édifice du centre de Paris, pour une exposition des saisons douces et chaudes.
Comme tout travail scientifique sérieux, il faut d'abord partir des définitions. Le sacrilège : « Au sens sociologique, toute atteinte à ce qui est considéré comme sacré et protégé par des interdits. Au sens juridique, toute atteinte aux édifices et aux objets du culte, telle que vol de reliques, destruction de statues, incendies ou dégradations d'églises. » Emile Durkheim définissait le concept comme atteinte à ce qui est considéré comme sacré dans et pour une société.
Il est donc constamment d'actualité, entre l'attentat de Charlie de 2015 pour outrage au prophète de l'islam, et une toile de Vincent Van Gogh aspergée de soupe à la tomate par des militants écologistes en 2022, et dont on sent qu'ici une « sacralité » laïque a été attaquée. D'où le choix de ce terme - par les commissaires de l'exposition, Amable Sablon du Corail et Alexandra Hauchecorne -, face à la notion de blasphème, qui se limite au fait religieux.
Le fil rouge de la première partie d'une exposition scindée en trois : comment le pouvoir temporel s'est emparé du combat contre le sacrilège pour s'auto-sacraliser.
Dès l'Antiquité, le sacrilège est autant politique que religieux, cette période ne séparant ces deux dimensions que dans ses ultimes instants chrétiens. (Dans cette optique, l'Histoire peut être lue comme une séparation dans les champs, une complexification, une multiplication). Il porte avant tout atteinte à l'unité de la communauté civique. Socrate a dû boire la ciguë en 399 avant notre ère pour impiété - manque de croyance ou mépris des dieux reconnus par la cité d'Athènes -, mais surtout pour corruption de la jeunesse, par ses dialogues qui encourageaient à remettre en question les autorités et les traditions établies.
Athènes traversait en outre une période d'instabilité politique et sociale, suite à sa défaite lors de la guerre du Péloponnèse. Le procès du Christ, ou la lapidation d'Étienne, premier martyr chrétien accusé de blasphème contre Moïse, Dieu, le Temple et la Loi, sont d'autres exemples de griefs politiques maquillés de considérations religieuses.
Si on peut évoquer la Lex julia de majestate du Ier siècle av. J.-C, loi attribuée à César ou
Auguste, qui assimile le lèse-majesté au sacrilège, la définition du concept se révèle assez large et floue par la suite, notamment sous les Carolingiens. Son statut juridique s'établit plus clairement au XIIe siècle, notamment à travers une ordonnance du roi Philippe Auguste, de 1182, qui réprime le blasphème.
En 1234, le pape Grégoire IX établit les fondements canoniques pour combattre le blasphème jusqu'au Concile de Trente, en y incluant également les injures faites aux saints et à la Vierge Marie. Selon ces dispositions, le blasphème est uniquement reconnu en cas de manifestation publique. Les sanctions contre les blasphémateurs se résument essentiellement à des actes de pénitence et des amendes. Toutefois, si l'individu est également reconnu comme hérétique, les conséquences peuvent être plus sévères.
Dans le royaume de France, cette question prend une autre dimension sous Louis IX, dit Saint-Louis, obsédé par la question du blasphème. Il s'engage dans une entreprise de purification du royaume avec un zèle peu commun : selon les chroniques de l'époque, il a notamment ordonné la mutilation des lèvres ou de la langue des blasphémateurs, visant à empêcher physiquement le coupable de répéter son offense.
Des pratiques, que certains jugeront excessives, qui ont poussé le Pape Clément IV, son ancien conseiller, à émettre une bulle pour exhorter le souverain à favoriser la conversion plutôt que la punition. À la suite de la réprimande papale, les blasphémateurs s'en sortiront avec une amende, et s'ils ne peuvent pas payer, des coups de fouet...
Il tint cette parole catholique, à savoir qu'il préférerait être marqué au fer rouge sur ses lèvres, (...) pourvu que cela puisse faire totalement disparaître de son royaume ce vice pernicieux du blasphème. / Et j'ai entendu dire qu'il avait fait brûler et marquer au fer rouge le nez et les lèvres d'un bourgeois de Paris, pour un blasphème qu'il avait fait.
- Guillaume de Nangis, Vie de saint Louis, vers 1290 / Jean de Joinville, Vie de saint Louis, 1309
Progressivement, combattre le sacrilège revient à souligner que l'autorité du souverain provient directement de Dieu, et donc porter atteinte à ce dernier équivaut à une offense envers le monarque. L'Insulter signifie renier l'ordre politique établi par divine volonté. Les sphères spirituelle et temporelle se mêlent, et la première perd petit à petit de l'autorité sur la seconde.
Cette dynamique permet en effet au pouvoir royal de s'affirmer indépendamment de l'Église et du pape, ouvrant la voie à l'émergence d'une sorte de « culte royal ».
Sous le règne de Philippe le Bel et ses successeurs, « le Gallicanisme », doctrine politique et religieuse affirmant l'indépendance de l'Église catholique de France vis-à-vis de l'autorité du pape, prend de l'ampleur. Un moment clé est l'affrontement entre celui qui fit canoniser son grand-père Louis IX et le pape Boniface VIII.
Il culmine avec l'arrestation de ce dernier à Anagni par les agents du roi de France. Bien qu'il soit libéré, l'incident précipite sa mort peu après. Philippe le Bel ira jusqu’à accuser le pape d’hérésie, de sodomie et d’idolâtrie... On est loin du temps de Phillipe Auguste qui se voyait forcé par le pape de reprendre sa femme répudiée en suspendant la célébration des sacrements dans le royaume. Une situation alors jugée extrêmement grave, car elle privait les sujets du roi des rites essentiels de la vie chrétienne, comme les mariages et les enterrements religieux, mettant en péril le salut de leurs âmes.
Au XVe siècle, Louis X le Hutin incorpore la main de justice sur les sceaux de chancellerie, soulignant le caractère divin de la royauté française. Jean le Bon adopte l'aigle et le lion comme emblèmes, qui représentent sa puissance et son autorité, tant au niveau national qu'au-delà de ses frontières.
L'avènement de la Réforme protestante au XVIe siècle engendre une guerre civile d'une rare violence, où sous le paravent de la religion, se joue la lutte pour le pouvoir entre l'autorité royale et les Grands du royaume. Une opposition qui se règlera au siècle de Louis XIV par l'enfermement des Seigneurs dans Versailles, mais avant, le blasphème ordinaire se mue en hérésie.
La tension atteint un pic en 1534 avec l'Affaire des Placards, où des messages anti-catholiques sont affichés dans des lieux publics, y compris sur la porte de la chambre de François Ier lui-même, au château d'Amboise. Pour le simple blasphème, on prévoit à présent la prison à perpétuité et les galères pour les récidivistes.
Les guerres de Religion, qui éclatent en 1562, plongent le royaume dans un bain de sang jusqu'à la fin du siècle. La violence du conflit est extrême - on peut citer l'épisode du Massacre de la Saint Barthélemy, purge des huguenots qui entraîna la mort de milliers de personnes à Paris et d'autres villes françaises.
La promulgation de l'Édit de Nantes en 1598 par Henri IV pour mettre fin à la huitième guerre, bien qu'elle représente une tentative de compromis en autorisant le culte réformé sous conditions, n'apaise pas totalement les tensions. Les politiques successives de Louis XIII et le cardinal Richelieu - dont le terrible siège de La Rochelle, qui entraîne la mort de plus de la moitié de la population de famine et des maladies -, puis la révocation de l'Édit de Nantes par Louis XIV en 1685, démontrent cette tension entre volonté de rétablir l'unité catholique et tolérance religieuse.
La société de Louis XIV sera la dernière à invoquer la punition divine dans la justification de ses jugements, et si le XVIIIe siècle voit le blasphème toujours être sanctionnée, ces affaires s'accompagnent toujours en vérité d'autres griefs portés contre l'accusé. L'exécution du Chevalier de La Barre en 1766, âgé de 20 ans, illustre tragiquement cette transition. Accusé de ne pas avoir salué une procession religieuse et de posséder un livre interdit, il fut condamné à mort dans un contexte où le Parlement cherchait à se racheter auprès du roi après l'expulsion des jésuites du royaume.
Voltaire fit de cette affaire un symbole de l'obscurantisme religieux et de l'arbitraire des magistrats, rédigeant plusieurs textes où il dénonce avec véhémence les circonstances du procès et de l'exécution. Il s'agit de la dernière condamnation à mort en France pour sacrilège.
On l'aura compris, la France du désir d'absolutisme et de la sacralisation de l'autorité royale a largement combattu le sacrilège en tant qu'il était aussi, ou avant tout, un crime de lèse-majesté, donc politique. En face, une contestation de la doctrine de la monarchie de droit divin, avec notamment les théories des monarchomaques du XVIe siècle, qui prônent un pouvoir basé sur un contrat avec le peuple. Une affaire est représentative de la gravité du sacrilège de lèse-majesté : l'attentat de Damien.
Le 5 janvier 1757, Louis XV est agressé par Robert-François Damiens, un individu énigmatique aux motivations floues. La tentative d'assassinat, bien que ne causant qu'une blessure superficielle au roi, engendre une réaction judiciaire impitoyable : Damiens est condamné à un supplice d'écartèlement, exécuté avec une cruauté exemplaire le 28 mars sur la place de Grève.
Son agonie dure trois interminables heures avant la mort, décrite avec une précision digne de Faites entrer l'accusé dans la Gazette de France. On est loin de la conséquence de la baffe d'un autre Damien, Tarel, contre l'actuel président, en 2021 : 4 mois de prison ferme.
Le sacrilège s'est donc déplacé, car le blasphème ne disparaît pas avec la Révolution Française, anticléricale et parfois violemment anti-chrétienne. Bien au contraire, il se laïcise simplement. Le déisme de Rousseau s'impose dans un temps de vif religiosité. Le sacré est nécessaire dans la légitimation du nouveau pouvoir. Le temps de l'athéisme n'est pas encore arrivé.
Dans l'effervescence révolutionnaire, la France assiste à une profonde transformation de ses symboles traditionnels : les tombes royales à Saint-Denis sont profanées, symbole d'une rupture radicale avec l'Ancien Régime. Les crimes de sacrilège par le Code pénal de 1791 sont abolis, mais la notion de « lèse-nation » émerge, ciblant ceux qui dénigrent la Constitution ou la République.
Un nouveau panthéon républicain voit le jour, qui glorifie des figures comme Marat et Bara, deux martyrs de la révolution. Le culte de l'Être Suprême culmine le 8 juin 1794, quand Robespierre orchestre une grandiose cérémonie au Champ-de-Mars. L'athéisme est rejeté pour la Sagesse, et le combat contre les rois est loué comme un acte de piété divine. Sans parler du culte de la Raison de Jacques-René Hébert. La Révolution française a en tout cas ouvert la voie à la libre critique des religions.
Vous n'y trouverez plus ces grands crimes d'hérésie, de lèse-majesté divine, de sortilège, de magie [...] pour lesquels, au nom du ciel, tant de sang a souillé la terre.
- Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau, Rapport sur le projet de Code pénal, 1791
Suite aux tumultes des années 1790, un accord, le Concordat de 1801, est conclu entre Napoléon Bonaparte et le pape Pie VII. Il établit le catholicisme comme la « religion de la grande majorité des citoyens français ». Dans ce cadre, l'État finance l'Église et assure la rémunération du clergé, tout en maintenant une supervision rigoureuse de ses activités. Ce système est étendu par la suite aux cultes protestant et israélite. Le culte musulman n'est reconnu qu'en Algérie, à partir de 1830, où il est financé par l'État. Un régime qui se maintient jusqu'à la loi de 1905, portant séparation des Églises et de l'État par laquelle « la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte ».
Le futur Empereur des Français, à bien des égards, revient néanmoins aux monarques français, cherchant à s'inscrire dans une tradition de pouvoir quasi-sacral. Durant la campagne d'Égypte, à l'instar des rois thaumaturges, il est par exemple représenté touchant un malade, geste emblématique de la guérison miraculeuse. Il est moqué par les caricaturistes anglaise en retour... Et finalement ressemble plus à César qu'à Saint-Louis.
Durant la Restauration, le délit d’outrage à la morale publique et religieuse rétablit de fait le blasphème en 1819, à travers les lois de Serre. Face aux progrès de l’athéisme, du rationalisme, du libéralisme et du socialisme, s'impose, là encore de fait, un rapport rationaliste à la religion : le salut de l'âme est moins en jeu que la cohésion sociale que permet la religare (relier).
Sous le règne de Charles X, la loi du sacrilège de 1825 devient un emblème de la contre-réaction religieuse et politique, provoquant des clivages même parmi les soutiens de la Restauration et du catholicisme. Elle prévoit la peine de mort pour les profanateurs de vases sacrés et d'hosties consacrées. La Révolution de 1830 sanctionnera cette faute politique, d'avoir été en désaccord avec les valeurs contemporaines.
La deuxième loi de la thermodynamique est formelle : l'entropie, ou désordre, dans un système isolé ne peut qu'augmenter, rendant les processus naturels irréversibles et la réversion à un état initial hautement improbable...
C'est la société, dont les intérêts se confondent avec ceux de la religion, qui est attaquée dans ce qu'elle aime et respecte le plus.
- Exposé des motifs de la loi sur le sacrilège, 1825
En face, une religion laïque et républicaine, avec ses prières, ses processions et ses reliques : à la mort de Léon Gambetta, figure emblématique de la Troisième République, son cœur est conservé et transféré au Panthéon, ce temple de la sanctification laïque. En face, les prêtres appellent à voter en assimilant un mauvais vote à un pécher contre Dieu.
Les relations entre l'État et l'Église catholique se sont tendues lorsque Pie IX publie en 1864 le Syllabus des erreurs, condamnant le libéralisme et le rationalisme. Du scandale des fiches au début du XXe siècle, marqué par une surveillance systématique des convictions religieuses des officiers de l'armée, à l'apogée de la caricature anticléricale en 1905, la guerre entre la République et « La Barque de Pierre » fait rage.
Ces tensions se cristallisent autour de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, qui abolit la censure préalable et le délit d’outrage à la morale publique et religieuse. Elle cantonne les délits de presse à l'insulte et à l'injure, et distingue les idées (la religion) et les personnes (les croyants). Enfin, elle introduit un contrôle a posteriori et un délit d'offense au président de la République.
Cet écho moderne du crime de lèse-majesté suscite immédiatement des débats en raison de sa formulation vague et les abus potentiels qui pourraient en résulter : « En créant un délit vague, non défini, vous livrez les citoyens à l'arbitraire du parquet et du juge. Est-ce là ce que vous oserez appeler une loi de liberté, une loi républicaine ? », s'écrit Le Tigre Georges Clemenceau, lors d'un débat à la Chambre, à propos du délit d'offense au Président de la République, le 21 juillet 1881.
Malgré ces inquiétudes, jusqu'en 1895, seulement quatre affaires ont été jugées sous cette accusation. Entre 1895 et 1940, aucune action n'a été entreprise par les présidents de la République, et les poursuites sont redevenues exceptionnelles après la période répressive du régime de Vichy (1940-1944), et peu fréquentes pendant la IVe République. La présidence de Charles de Gaulle, notamment dans le climat tendu de la guerre d'Algérie et face aux actions de l'OAS, engendre une forte augmentation du cas d'offense au chef de l'État. Finalement jugé incompatible avec la liberté d'expression, ce délit a été aboli en 2013, suite à une décision de la Cour européenne des droits de l'homme, après l'affaire du « Casse toi, pov' con »...
L'incident où le président Nicolas Sarkozy a mal réagi à un homme qui refusait de lui serrer la main lors du Salon de l'agriculture, le 23 février 2008, a déclenché la dernière affaire judiciaire invoquant le délit d'offense au chef de l'État. Cette réplique, transformée en slogan sur une pancarte par un manifestant durant une visite présidentielle à Laval, a mené à une condamnation à une amende avec sursis pour le manifestant. Cinq ans plus tard, le délit est aboli après que ce dernier a fait condamner la France au niveau européen.
La laïcisation ne signifie pas nécessairement une désacralisation, comme en témoigne la controverse autour des sifflements de La Marseillaise par des supporters corses en 2003 en finale de la Coupe de France. Jacques Chirac quittait alors le Stade de France en signe de protestation, et l'outrage au drapeau et à l'hymne national était introduit la même année.
Au cœur des tumultes sociétaux, le cinéma et l'art se révèlent souvent comme des miroirs de la liberté d'expression, confrontés aux limites de la tolérance et de la censure. En 1966, Jacques Rivette provoque un séisme culturel avec La Religieuse, adaptée de Diderot. Une critique de la vie monastique qui, malgré les pressions gouvernementales, franchit les barrières de l'interdit pour s'exposer au public en 1967, non sans une restriction aux mineurs. Ce bras de fer entre création et autorité préfigure une série de confrontations où l'art et la satire attisent les foudres du sacré et du dogme.
Depuis quelques décennies, on observe une résurgence du religieux dans la sphère publique, un phénomène qui rappelle le réveil religieux du XIXe siècle. Cette période est également marquée par l'adoption de la loi Pleven en 1972, visant à lutter contre les discours de haine, illustrant la tension croissante autour de la liberté d'expression et du respect des croyances. L'affaire du voile de Creil en 1989, survenue à la fin du XXe siècle, met en lumière les prochains défis de l'intégration et de la laïcité en France.
En France, société laïque et pluraliste, le respect de toutes les croyances va de pair avec la liberté de critiquer les religions quelles qu'elles soient et avec celle de représenter des sujets ou des objets de vénération religieuses.
- Tribunal de grande instance de Paris, 17e chambre, 22 janvier 2007
La question de la liberté d'expression face au sacré se cristallise en 2005 avec l'affaire des caricatures de Mahomet, initialement publiées par un journal néerlandais puis reprises par Charlie Hebdo, provoquant une controverse internationale. Cette période voit également Eric Raoult proposer une loi qui vise à encadrer la critique des convictions religieuses.
Cette tension atteint un sommet tragique avec l'assassinat de Samuel Paty en 2020, un professeur qui, dans une leçon sur la liberté d'expression, devient la cible d'une violence extrême pour avoir présenté des caricatures de Mahomet.
La récente controverse autour de l'acte de vandalisme par des militants écologistes, jetant de la soupe à la tomate sur une toile de Van Gogh à Londres, entre autres, élargit le débat sur le sacrilège et le respect du patrimoine culturel. Des gestes destinés à choquer et à provoquer.
Comment concilier la liberté d'expression, pierre angulaire, au moins en théorie, des démocraties libérales, avec le respect des croyances, dans une société de plus en plus pluraliste ? C'est sur cette grande question ouverte que s'achève l'exposition.
À LIRE - Une exposition autour du Sacrilège, de l'Antiquité à nos jours
Enfin, sous l'égide d'Amable Sablon du Corail, expert de l'Ancien Régime, et Jacques de Saint Victor, spécialiste de l'histoire du droit, un catalogue officiel a été élaboré pour accompagner l'exposition.
Parmi les œuvres sélectionnées pour le beau livre, on peut citer le testament de Louis XVI, des caricatures anticléricales de Kupka publiées dans L'Assiette au beurre, la DS criblée de balles du Général de Gaulle lors de l'attentat du Petit Clamart, ou encore l'affiche du film La Religieuse de Jacques Rivette...
Crédits photo : ActuaLitté (CC BY-SA 2.0)
Par Hocine Bouhadjera
Contact : hb@actualitte.com
Paru le 21/03/2024
191 pages
Editions Gallimard
35,00 €
1 Commentaire
Aradigme
25/03/2024 à 15:06
Un article très intéressant et très bien documenté. Merci pour sa publication.
Une remarque me vient concernant le passage: "La deuxième loi de la thermodynamique est formelle : l'entropie, ou désordre, dans un système isolé ne peut qu'augmenter, rendant les processus naturels irréversibles et la réversion à un état initial hautement improbable..."
C'est scientifiquement exact. Dans un système isolé, le désordre augmente en effet sans cesse. Le mot clé est ici "isolé". Des recherches théoriques démontrent que le désordre peut diminuer localement dans un système clos, pourvu qu'il augmente ailleurs en contrepartie. C'est d'ailleurs ce qui permet d'expliquer l'émergence de la vie, système organisé par excellence, sur une planète.
La France sous Charles X constituait-elle un système isolé? Pas vraiment à mon sens. Elle était intégrée dans une Europe où prévalaient alors dans de nombreux états des conceptions pré-révolutionnaires. La tentative de Charles X, de toute évidence inopportune, risquée et maladroite, n'était donc cependant pas, selon moi, nécessairement (ou thermodynamiquement) vouée à l'échec.