L’écrivain péruvien Mario Vargas Llosa naturalisé espagnol, âgé de 87 ans, a été admis dans un hôpital de Madrid le samedi 1er juillet, après avoir contracté la Covid-19. Il avait déjà été hospitalisé en avril 2022 pour des motifs similaires. D’après des proches, son état est stable. Mais compte tenu de son âge, il demeure un patient à risque, ce qui suscite l’inquiétude parmi ses lecteurs.
Le fils de Mario Vargas Llosa, l’auteur Álvaro Vargas Llosa, a posté ce mardi un Tweet pour rassurer les admirateurs de son paternel. Il déclare : « Compte tenu de l’intérêt des médias pour l’état de santé de notre père, nous annonçons qu’il est hospitalisé depuis samedi après qu'on lui ait diagnostiqué la Covid-19. Il est soigné par d’excellents professionnels et accompagné par sa famille. Nous demandons aux médias de respecter son intimité et la nôtre en ce moment. »
Selon le quotidien El País, Vargas Llosa se trouve dans un hôpital madrilène - son nom n'a pas été mentionné - et son état est « stable ».
Le lauréat du prix Nobel avait déjà fait un séjour à la clinique Ruber de Madrid pour des motifs identiques, en avril 2022. Il y avait été admis étant donné qu’il est considéré comme une personne à haut risque, mais avait quitté l’établissement quelques jours plus tard. Comme le relate El Nacional, il avait déclaré : « Ce fut une expérience désagréable, j’ai commencé à avoir très froid dans les jambes et, soudain, j’ai commencé à perdre mon souffle, à m’étouffer, à respirer avec beaucoup de difficulté ».
L’auteur demeure très actif : en février, il a publié le recueil d’articles Un bárbaro en París : textos sobre la cultura francesa (Un barbare à Paris : textes sur la culture française) et en avril, il a participé à un cycle de conférences consacré à son œuvre à l’Institut Cervantes de Madrid. Le mercredi 8 mars 2023, il a reçu à Lima la plus haute distinction péruvienne, Grand Collier de l’Ordre du Soleil, des mains de la présidente Dina Boluarte.
Né le 28 mars 1936 au Pérou, l’Hispano-Péruvien a reçu le prix Nobel en 2010. Son premier roman La Ville et les chiens, traduit en français chez Gallimard par Bernard Lesfargues, explore la brutalité et la corruption au sein d’un internat militaire à Lima, au Pérou. Le récit se concentre sur un groupe d’adolescents confrontés à une hiérarchie de pouvoir stricte, à des rites d’initiation brutaux et à l’incertitude morale, le tout symbolisant les problèmes plus vastes de la société péruvienne.
La tante Julia et le scribouillard (trad. Albert Bensoussan, Gallimard), également réputé pour sa complexité structurelle, son riche contenu politique et social et son exploration des manoeuvres politiques, est un roman semi-autobiographique publié en 1977. Il suit la vie de Marito, un jeune péruvien qui travaille pour une station de radio de Lima et rêve de devenir écrivain. En parallèle, l’histoire narre la relation romantique naissante entre Marito et sa belle-tante divorcée, Julia, malgré la désapprobation de leur famille en raison de leur grande différence d’âge.
La guerre de la fin du monde (trad. Albert Bensoussan, Gallimard) est considéré comme une pièce maîtresse de la littérature hispanophone. Le roman retrace la Guerre de Canudos, une révolte à la fin du XIXe siècle dans l’arrière-pays brésilien. Le roman dépeint la confrontation entre rebelles, menés par le prophète Antônio Conselheiro, et les forces gouvernementales, décrivant de manière vivante l’escalade tragique de la violence. À travers ce récit, Vargas Llosa explore les thèmes du fanatisme religieux, de la lutte des classes, et de l’échec de la modernisation imposée par le haut, tout en critiquant les ravages du colonialisme et de l’impérialisme.
L’un de ses derniers écrits traduit en français est La Littérature est ma vengeance (trad. Jean Pastureau et Albert Bensoussan, Gallimard) publié en 2021. Cette conversation entre le Nobel et l’auteur italien Claudio Magris, revient sur les rapports entre société et création.
Membre de l’Académie péruvienne de la langue depuis 1977 et de l’Académie royale espagnole depuis 1994, il a été élu en novembre 2021 à l’Académie française. Il est le premier à devenir un Immortel sans n’avoir jamais écrit de livre en français et à dépasser de dix ans la limite d’âge, fixée à 75 ans dans les statuts. L’Académie n’avait plus hébergé de Prix de Littérature Nobel depuis François Mauriac, membre entre 1933 et 1970.
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L’écrivain souffrant de la Covid-19 s’est aussi fait remarquer pour ses prises de positions politiques conservatrices. Il s'était pourtant impliqué dans une branche étudiante du Parti communiste péruvien après avoir découvert le marxisme durant son cursus universitaire...
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En décembre 2021, un groupe d’universitaires a publié une tribune dans Libération, critiquant ouvertement les propos de l’auteur des Temps sauvages publié en France en 2021 (trad. Albert Bensoussan et Daniel Lefort, Gallimard).
Les soutiens systématiques du Prix Nobel 2010 aux candidats d'extrême-droite en Amérique latine sont avérés, et l’écrivain ne s’en cache pas : que ce soit en faveur de Keiko Fujimori, au Pérou, finalement perdante face au socialiste Pedro Castillo, ou encore du président colombien Iván Duque. Il a soutenu ce dernier dans sa politique de répression des mouvements sociaux dans son pays, qui ont fait au moins 70 morts.
En outre, les chercheurs signataires de la tribune ont accusé la Fundación Internacional para la Libertad (FIL), dont l’écrivain est président, de travailler en faveur de la « consolidation des réseaux de la droite et de l’extrême droite hispano-américaine ».
Par ailleurs, il a trempé dans une affaire d’évasion fiscale révélée par les Panama Papers en 2016, puis les Pandora Papers en 2021. Selon les documents étudiés dans le cadre de cette dernière enquête, Vargas Llosa aurait été le principal titulaire d’une société offshore, ouverte dans les Îles Vierges britanniques, paradis fiscal notoire.
Crédits photo : Fronteiras do Pensamento (CC BY-SA 2.0)
Paru le 01/11/2008
530 pages
Editions Gallimard
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469 pages
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