C’était le projet phare du mandat de Rachida Dati, dont les jours rue de Valois sont hélas comptés : que les zones rurales ne comptent plus pour du beurre. Même de baratte. Le Printemps de la ruralité, qu'avait amorcé la ministre de la Culture en janvier, a ainsi tiré les conclusions qui s’imposent pour que les territoires s’épanouissent.
Le 13/07/2024 à 16:17 par Nicolas Gary
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13/07/2024 à 16:17
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« 22 millions de Français vivent aujourd’hui dans la ruralité. C’est un tiers de notre population, 88 % de nos communes », assurait Rachida Dati en janvier 2024, lors d’un déplacement à Nontron (Dordogne). Pour l’occasion, elle présentait ce projet de concertation nationale, portant sur l’offre culturelle — à de multiples niveaux. Et surtout, pour mettre des données sur une situation : quand on évoque une faible présence d’équipements culturels de proximité, elle est à contrebalancer par un maillage fin de bibliothèques et/ou points lecture (9 communes sur 10 ont une offre de lecture publique).
En outre, des initiatives surgissent partout dans l’Hexagone, mais ne bénéficient pas de la reconnaissance nécessaire. D’autant que tout territoire s’accompagne d’un patrimoine, qui d’ores et déjà peut être valorisé. « [I]l faut une vision globale pour la redynamisation de nos territoires ruraux », assurait Rachida Dati. « N’oublions pas que ces territoires comprennent 57 % des lieux culturels, dont 72 % des bibliothèques et 55 % des monuments historiques. »
Pour établir une cartographie des attentes et de l’existant, une consultation en ligne a mobilisé 21.867 répondants (dont 40 % d’habitants), accompagnés de 44 rencontres (ateliers, débats, conférences), ainsi que 120 auditions par l’IGAC. Et la ministre de pointer : « Ces contributions au débat ont souligné des points de fragilité que nous ne pouvons plus ignorer : insuffisante valorisation de l’offre culturelle existante ; décalage parfois constaté avec les attentes locales ; difficultés d’accessibilité en raison des temps et coûts de transport ; complexité dans l’accompagnement des porteurs de projets... »
La ruralité passée au crible, ce sont des bourgs comptant au maximum 4999 habitants et jusqu’à moins de 300. Pour ce qui est de leur rapport à la consommation culturelle, l’accès est pointé comme prioritaire. Et ce que, l’on parle de l’information, de la mobilité (que et comment faire sans voiture ?) ou encore des tarifs ou de l’intérêt.
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Pourtant, les répondants reconnaissent pleinement qu’autour de chez eux, les activités foisonnent. Mais ainsi qu’en atteste l’un d’eux : « L’été, il se passe plein de choses, mais l’hiver est long... » Certains optent alors pour l’itinérance afin de contrer le déplacement du public, mais dans ce cas, on pointe alors l’absence de ressources qu’allouent les collectivités ou plus largement, la lourdeur administrative des démarches.
Quand l’argent manque, le bénévolat devient le remède à tout. En témoigne, en matière de politique de lecture publique, une bibliothécaire. « On va accompagner les bibliothèques sur de l’ingénierie de projet : identifier un public, construire un budget, contacter des artistes, des prestataires. On va former l’ensemble des acteurs concernés au projet, pas seulement les bibliothécaires, mais aussi les professionnels en dehors du champ culturel strictement, comme la petite enfance. »
De fait, le travail en réseau et la mutualisation s’avèrent cruciaux, note le rapport. L’importance de la coordination stratégique et politique des différents échelons de collectivités territoriales a été soulignée, tout comme la nécessité de créer du lien, de travailler ensemble pour les différentes parties prenantes (encourager la concertation des acteurs, créer des réseaux ou favoriser la mise en réseau, impliquer les habitants).
L’élaboration de projets culturels de territoire est également évoquée comme moyens de fédérer, d’associer, de mettre en cohérence les initiatives et de répondre aux besoins au plus près des territoires.
Si le mieux est l’ennemi du bien, la ministre de la Culture a obtenu des pistes de réflexions et de réponses à apporter aux problématiques rencontrées.
Le constat est simple : les artistes du spectacle vivant en milieu rural se produisent fréquemment dans des espaces polyvalents avec des formats flexibles. Leur présence artistique assure une proximité et s'intègre dans les lieux de convivialité quotidienne. Ces représentations offrent souvent aux habitants leur premier ou unique contact avec des artistes.
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Pour y remédier, le MCC propose d’encourager l'embauche occasionnelle d'artistes par les communes, associations, cafés, hôtels et restaurants pour organiser des concerts et spectacles.
L'objectif est d'exploiter des structures et lieux non spécifiquement dédiés au spectacle vivant : associations sportives, comités des fêtes, petits commerces comme les librairies, ou associations d'éducation populaire ou de quartier. Le GIP Cafés-cultures sera responsable de la mise en œuvre de cette mesure dans les aides qu'il attribue.
La présence des librairies dans le quotidien des Français est cruciale pour la visibilité du livre et le développement de la lecture. Elles jouent un rôle clé, aux côtés des bibliothèques, dans l'aménagement culturel du territoire et la médiation culturelle. Le libraire incarne souvent l’entrepreneur culturel local, animant la vie locale par son commerce et les événements qu’il organise.
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Cependant, il est plus difficile pour une librairie de se développer en zone rurale qu’en ville en raison de la rareté des clients et des charges plus lourdes, notamment les coûts de transport. Pour y rémédier, il s'agirait donc de doubler le soutien des DRAC aux projets d’action culturelle des libraires ruraux. Une nouvelle aide financera les animations et événements organisés par les librairies rurales ainsi que l'enrichissement de leurs assortiments.
Le ministère propose aussi de soutenir les projets d’itinérance en lançant une expérimentation pour les librairies combinant ces deux approches. Les projets de librairies itinérantes seront soutenus à condition qu’ils soient associés à des librairies fixes. Deux territoires d’expérimentation seront lancés dès 2024, avec de nouvelles cibles en 2025.
L’accès à la création contemporaine peut se renforcer en milieu rural en facilitant l’accès direct aux œuvres d’art par le prêt aux particuliers ainsi qu’aux mairies, bibliothèques et écoles. Les artothèques, fondées dans les années 1980, instaurent une relation inédite avec l’art contemporain, tout en soutenant la commande artistique. Elles transforment le sentiment de “ce n’est pas pour moi” en “c’est chez moi”. Une appropriation bienvenue, donc.
Elle prendrait la forme d'artothèques, avec l'ouverture d'une centaine de ces établissements sur le territoire d’ici deux ans. Ce déploiement s’appuiera sur la quarantaine d’artothèques existantes et sur les bibliothèques départementales qui pourront également être impliquées. En collaboration avec les régions, les 22 FRAC pourraient également être chargés de développer un service d’artothèque.
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Pour amplifier la circulation des œuvres et toucher la population rurale, des dispositifs mobiles pourraient compléter ce réseau : véhicules de présentation et prêts d’œuvres (artobus) et/ou modules itinérants de présentation d’œuvres (« La borne »). Le ministère soutiendra ce déploiement par un investissement permettant l’équipement de ces lieux et un programme de commande d’œuvres piloté par le CNAP, à partir des territoires, autour d’artistes et d’ateliers d’art liés à ces territoires.
Avec 15.500 lieux de lecture répertoriés, la France se distingue par la densité exceptionnelle de son réseau de bibliothèques et médiathèques. Cependant, des marges de développement existent encore dans certaines zones, notamment en milieu rural, en raison de la taille modeste des structures et des équipes.
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Les bibliothèques départementales jouent un rôle crucial en termes de mise en réseau et de professionnalisation. Elles fournissent souvent des collections mutualisées pour les bibliobus, aident à organiser des animations, expositions et festivals, gèrent des résidences d’auteurs, diffusent des contenus numériques aux usagers ruraux et forment les 60.000 bénévoles intervenant dans ces réseaux.
Ainsi, en généralisant les contrats départementaux lecture avec tous les départements d’ici fin 2026 (actuellement 69 sur 104), s'ouvriraient de nouvelles perspectives. Ces contrats visent à soutenir l’action des bibliothèques départementales au service des zones rurales, en particulier en développant des offres de services numériques. Le soutien à chaque contrat sera porté à 60 000 € en moyenne par an. La formation des bénévoles sera une priorité.
Côté créateurs, les services de Valois organiseraient volontiers une résidence d’artistes par département en milieu rural. Ces dernières sont des occasions privilégiées pour attirer des artistes en milieu rural. Elles permettent aux jeunes artistes d'enrichir leur formation par une immersion dans un territoire, tout en dynamisant la vie culturelle locale.
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En outre, elles offrent aux habitants, bibliothèques, associations et EHPAD un accès direct aux artistes. De plus, les artistes montrent un désir croissant de créer des œuvres en collaboration avec les habitants.
L'approche consisterait à ce que soit mise en place chaque année une résidence d’artistes par département en milieu rural, d’une durée de deux à six mois. Ces résidences se dérouleront dans des lieux tels que bibliothèques, services d’archives, EHPAD, entreprises, exploitations agricoles, centres PMI, structures d’éducation populaire, centres sociaux, foyers ruraux, accueils de loisirs. Les DRAC sélectionneront des projets réunissant jeunes artistes et artistes confirmés, en veillant à la qualité de l’accompagnement.
L'intégralité du rapport et les mesures pour le livre sont exposées dans notre précédent article.
Crédits photo : MA_MINACC0
Par Nicolas Gary
Contact : ng@actualitte.com
4 Commentaires
Vlody Polansk
14/07/2024 à 13:58
"C’était le projet phare du mandat de Rachida Dati, dont les jours rue de Valois sont hélas comptés"
Heu pardon ?
"dont les jours rue de Valois sont hélas comptés."
Y aurait pas une mouche dans le vinaigre là ?
Encore une entourloupe de la langue française of course...
Délit de compréhension.
"projet phare" truc fun Macronophile...
Nicolas Gary - ActuaLitté
14/07/2024 à 14:06
Alors, je ne comprends pas votre incompréhension.
Les jours de Rachida Dati sont comptés rue de Valois.
Rachida Dati, dont les jours rue de Valois sont comptés.
Quel est le problème ?
Vlody Polansk
14/07/2024 à 20:03
Le "hélas" interpelle...
Rien de gravissime...
Marie
15/07/2024 à 07:29
Excellent article, Monsieur Gary, merci.