Andy Warhol coupable d'avoir pillé une photographe
L’affaire Andy Warhol qui occupait la justice américaine – et nombre d’industries culturelles –, va dans le sens des ayants droit une nouvelle fois. La Cour suprême vient de statuer contre la Fondation Warhol dans une affaire étroitement surveillée. Et l’Association des éditeurs américains se réjouit de ce que le copyright soit protégé, entrainant au passage une jurisprudence sans précédent.
La photographe Lynn Goldsmith souffle : selon la décision de la juge Sonia Sotomayor, les œuvres originales de photographes « bénéficient de la protection du droit d’auteur, même contre des artistes célèbres ». Quid ?
Eh bien la Cour suprême des États-Unis avait à trancher pour savoir si l’artiste Andy Warhol avait violé le droit d’auteur de la photographe, en utilisant sans autorisation une photo de Prince. Depuis mars 2022 que le procès a débuté, cette histoire a fait couler beaucoup d’encre, tant le sujet était complexe.
Fair Use VS Copyright
Au cœur de la problématique, la transformation par Warhol d’une photo du musicien Prince qu’avait prise Lynn Goldsmith — un visuel largement exploité pour la Prince Serie en couleur. Le différend juridique, débuté en 2017, aura connu de multiples rebondissements, s’ancrant dans une histoire lointaine.
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En 1981, Goldsmith produit cette photo pour Newsweek, mais le magazine ne la publiera jamais. Trois ans plus tard, Vanity Fair autorise Andy Wahrol à utiliser le cliché pour une série de portraits. Et l’artiste américain le décline alors dans une série d’interprétations — que la photographe découvre en 2016.
À cette époque, Vanity Fair publie en effet l’œuvre de Wharol sans créditer Goldsmith. Dès 2017, la Fondation Andy Warhol prend les devants en demandant à la justice de déclarer que la Prince Serie n’enfreint pas le copyright, mais au contraire, bénéfice pleinement du Fair Use. La législation autorise un usage transformatif d’une création première sous droit, à condition d’apporter une véritable modification. Et ce fut là tout l’objet de l’examen juridique.
Bimbadaboum
Sauf que les juges, à 7 contre 2, ont considéré que la production de Warhol relève de la violation du copyright. Et le monde de l’art se décompose, avec d’un côté les défenseurs du droit d’auteur, de l’autre, les partisans d’une liberté de création.
Pour la Cour, l’usage de la photo de Goldsmith aujourd’hui par la Fondation est de nature commerciale. Premier point. Second : le Fair Use ne s’applique pas sur les productions de Warhol, attendu qu’il n’a pas été suffisamment démontré qu’il avait généré une nouvelle œuvre. En somme, sa série est trop proche de la photographie originale, versant donc dans la contrefaçon.
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La cour nuance toutefois en précisant que son interprétation « ne signifie pas que toutes les œuvres de Warhol dérivées d’autres, pas plus que leur utilisation, donneront lieu à une analyse juridique similaire ». En revanche, elle resserre l’étau sur les possibilités liées au Fair Use, contraignant les artistes à s’éloigner véritablement des contenus originaux.
Pour Maria A. Pallante, directrice générale de l’Association of American Publishers, la décision « renforce le rôle essentiel que joue le copyright dans notre société ». Et d’ajouter : « Il est fondamental de noter que le jugement réaffirme que l’utilisation transformatrice […] ne peut être interprété de manière trop vaste — au point qu’elle fasse disparaître les droits de l’œuvre originale. » L'AAP avait rendu un Mémoire Amicus Curiae pour aider la justice à se prononcer.
Précision : l’arrêt de la cour ne concerne ni l’exposition ni la vente des œuvres de cette série de Warhol.
Crédits photo : Andy Warhol, autoportrait - ActuaLitté, CC BY SA 2.0
Par Nicolas Gary
Contact : ng@actualitte.com
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