Faire de chaque œuvre un livre unique devrait motiver tout éditeur digne de ce nom. Isabelle Pellouin, avec sa maison d'édition Les Petites Manies, fait en sorte que chaque exemplaire soit unique. En 18 années d'existence, elle a porté peu de livres, mais en s'investissant totalement pour chacun d'entre eux. Qu'il s'agisse d'une version illustrée du Corbeau d'Oscar Wilde ou d'une réédition très spéciale de l'utopie féministe Herland, de Charlotte Perkins Gilman.
Le 24/01/2020 à 09:20 par Antoine Oury
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Publié le :
24/01/2020 à 09:20
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Des Petites Manies aux petites mains, il n'y a pas grande différence : la plupart des titres du catalogue de la maison demandent plusieurs jours de travail à l'éditrice, Isabelle Pellouin, pour la seule fabrication. Aussi, la grande majorité est proposée en édition très limitée, entre 50 et 100 exemplaires. « Mon but n'est pas d'être une usine », nous explique-t-elle, « c'est de créer des choses, de les vendre, mais aussi de me renouveler, d'avoir de nouveaux projets ».
« Quand j'étais aux Beaux-Arts, j'ai découvert la résine, et j'ai pu assouvir un de mes fantasmes : créer plein de petites chaussures, les paires des Barbies me fascinent depuis que je suis toute petite. J'avais découvert le texte de Nathalie Quintane, Chaussure [publié chez P.O.L en 1997, Ndlr], alors j'ai eu l'idée de proposer ces petites paires dans des boites, accompagnées par un extrait de son texte. Quelques années plus tard, j'ai eu la chance de la rencontrer, et j'ai pu lui en offrir une », souligne Isabelle Pellouin.
À l'occasion d'un salon du livre jeunesse, à Rouen, elle déclinera ce concept artistique pour créer la collection « Mignardises », suivie un peu plus tard par « La Passerelle ». Cette dernière s'appuie aussi sur un objet lié à un livre, en un peu plus grand : « C'est venu, car j'ai fait un doudou en laine pour mon garçon... Et j'ai continué pour faire une autre mise en scène de la littérature, destinée aux enfants et aux adultes. » Une petite poule rousse, la souris verte ou encore le chat botté ont ainsi rejoint la compagnie des Petites Manies...
Le catalogue de la maison d'édition reflète la pratique artistique multiple qui est celle de sa fondatrice : « J'ai toujours fait de la couture, du tricot, de la broderie, du dessin, de la peinture... C'est aussi une éducation, celle de ma grand-mère, qui m'a appris à faire de la peinture, à tricoter, puis de ma mère, qui m'a appris à coudre. Ma mère et ma grand-mère étaient paysannes, elles faisaient du tricot et de la couture pour faire des vêtements, ma perspective est artistique, mais pas si éloignée de sa source, finalement. »
Un texte fort, assurément, dans l'air du temps, qui plus est, mais écrit en 1915 et publié en feuilletons par Charlotte Perkins Gilman dans son propre journal, The Forerunner. Née en 1860, morte en 1935, Charlotte Perkins Gilman fut l'une des plus importantes auteures américaines féministes de l'époque, engagée contre la ségrégation et dans des mouvements anticapitalistes.
« Pour l'autrice, il s'agissait de montrer que les femmes peuvent faire partie de la société, qu'elles peuvent créer et être au premier plan. Le roman évoque aussi différents thèmes, comme l'éducation, très marquée par les théories de Maria Montessori, ou l'écologie — toutes les Herlandaises sont végétariennes. »
Pour son édition de la traduction de Yolaine Destremau, Isabelle Pellouin décide de voir les choses en grand, et en illustration : elle signe elle-même plusieurs cartes et paysages, ainsi que la couverture, tandis que K et HubbubHum, qu'elle a rencontré dans des salons, ont illustré le texte. L'édition de l'œuvre de Perkins Gilman s'est poursuivie avec La Glycine géante, un recueil de nouvelles, écrites à la fin du XIXe, « dans lequel on trouve des textes plus gothiques, avec un côté Edgar Allan Poe. Elle écrivait parfois “à la manière de” tel ou tel auteur masculin. » Cette fois, la traduction de Virginie Walbrou est exclusive aux Petites Manies.
La publication de ces ouvrages a fait changer d'échelle la maison d'édition : « Généralement, il existe entre 50 et 100 exemplaires des livres des Petites Manies, là, nous en avons fait tirer 1000 exemplaires. » Sans perdre pour autant de vue le côté limité : une fois le tirage épuisé, aucun autre ne suivra.
Dans Trésor, créé en 6 mois en 2017, Isabelle Pellouin invite les femmes et les petites filles à connaître leur corps, à le respecter et à se l'approprier. Un livre en « moumoute rose » qui mêle peinture et broderie, limité à 9 exemplaires seulement, tous vendus à l'occasion de salon du livre, à Caen ou à Paris, notamment, ou en festival de la microédition.
Un goût du décalage qui s'applique aussi à La Petite Cochonne (2013), texte écrit par Pellouin, une variation féministe autour des Trois petits cochons : « J'aime bien écrire ces petits textes, légers, féministes, de temps en temps. Le conte sert à rester vigilant, à toutes les époques. »
Les éditions Les Petites Manies seront au cœur d'une exposition à la librairie La Curieuse, à Argentan, du 1er février au 28 mars prochain.
1 Commentaire
Isabelle Les Petites Manies
01/04/2020 à 20:29
Bonjour
Je soulève une grosse erreur :le Corbeau est un tire d'Edgar Poe et non Oscar Wild...
Merci de faire la correction.
Isabelle