Floride : une loi “anti woke” qui restreint la liberté d'enseignement
Aux États-Unis, l'enseignement, particulièrement à l'université, devient une question très politique. Depuis de nombreux mois, le conflit dans plusieurs états autour de la théorie critique de la race fait rage — et la tension ne cesse de monter. C’est à présent la Floride qui devient le centre de l’attention, alors que le corps professoral n’est plus autorisé à utiliser les mots « critique » et « race » côte à côte, dans les descriptions de modules universitaires. Pour cause : la mise en place d’un projet de loi visant à interdire la « théorie critique de la race » dans l'État.
Le 24/12/2021 à 17:02 par Valentine Costantini
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Publié le :
24/12/2021 à 17:02
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Développée dans les années 1970 et 1980, la théorie critique de la race est une discipline universitaire qui repose sur l’idée que le racisme est systémique dans les institutions et permet de maintenir la domination des Blancs dans la société américaine. Pour les partisans de cette matière, elle représenterait un outil important pour comprendre comment le racisme systémique peut perpétuer la discrimination et ses désavantages envers certains citoyens. Pour les opposants, c'est un plan subversif pour endoctriner les jeunes Américains à rejeter leur pays et son histoire.
Lors d'une réunion avec le corps professoral de l'Université de Floride en octobre dernier, un administrateur a indiqué que l'école doctorale n'approuverait plus le mot « critique » dans le titre d’un programme d'études — dans le cas d’une analyse du racisme et de l’antiracisme. Face à cette annonce, les membres du corps professoral ont conclu que l'administration demandait au collège « de changer le nom d'un programme intitulé “Étude critique de la race, de l'ethnicité et de la culture dans l'éducation”, vraisemblablement en un titre moins offensant pour la législature de Floride », a déclaré Christopher Busey. Ce dernier, professeur agrégé, serait notamment menacé de mesures disciplinaires s'il utilisait les termes « cours critique » dans la désignation et la conception de son module.
BIBLIOTHEQUE: “Une plus grande mobilisation” pour censurer
Un premier projet de loi promulgué par DeSantis, l'été dernier, oblige les universités d'État à effectuer des évaluations annuelles : celles-ci afin de déterminer s'il existe bel et bien une « diversité de points de vue » et une liberté intellectuelle dans leurs enceintes.
Après les université, les écoles
La semaine dernière, le gouverneur DeSantis annonçait la mise en place d’une nouvelle législation : celle-ci vise désormais les enseignements dits « controversés », autrement dit la théorie critique de la race, afin de les empêcher de trouver une place dans les salles de classe des écoles publiques — du moins en Floride.
« Cela viole les normes de la Floride de faire de quelqu’un un bouc émissaire en fonction de sa race, de dire qu'il est intrinsèquement raciste, de dire qu'il est un oppresseur, ou un opprimé, ou tout cela à la fois », a déclaré le gouverneur. « Mais nous devons également réaliser que nous devons faire plus pour nous assurer que cela soit vraiment le cas dans nos salles de classe et dans notre société », a précisé l'homme politique.
Un discours à double sens, qui promeut l'égalité d'une part, mais interdit d'autre part les études des mécanismes racistes et inégalitaires à l'œuvre au sein de la société américaine.
La loi « Stop Wrongs Against Our Kids and Employees Act », ou « Stop W.O.K.E Act », donne également aux parents la possibilité d'intenter des poursuites, de quoi assurer l’application effective de l’interdiction de la théorie critique de la race. Quant à l'acronyme « woke », il fait aussi, bien sûr, référence aux militants antiracistes, qui luttent pour les droits des minorités, que les conservateurs voient d'un mauvais œil.
Le président de la Florida Education Association (FEA), Andrew Spar, qui dirige le plus grand syndicat d'enseignants de l'État, a publié mercredi une déclaration en réponse à l'annonce du gouverneur DeSantis : « Les enseignants sont formés et expérimentés dans l'éducation des enfants et ont le devoir de préparer leurs élèves à contribuer efficacement à la société. Les enseignants devraient avoir la liberté d'enseigner des faits honnêtes et complets sur des événements historiques comme l'esclavage et les droits civils sans être censurés par les politiciens. L'annonce du gouverneur aujourd'hui va à l'encontre de cette valeur américaine fondamentale ». Et d’ajouter : « Tous les enfants de Floride devraient recevoir une éducation factuelle qui ne change pas en fonction de leur code postal. »
L’enseignement de sujets tels que la théorie critique de la race reste, pour beaucoup, un moyen de donner une perspective historique. Il devient alors possible de montrer aux enfants comment les lois racistes promulguées par le passé ont encore un effet sur la société actuelle. Pourtant, le pays semble doucement basculer vers une tendance à réprimer cette approche de l’enseignement, autant pour les jeunes élèves que pour les étudiants.
Un pas de plus vers la censure
Face à ce projet de loi, l'ONG PEN America attire l’attention sur cette nouvelle étape au cœur d’une guerre de l’éducation aux États-Unis : « Ce projet de loi censurera les enseignants et refroidira le discours en classe » autour de sujets liés à la race, à la sexualité, ou encore à l’histoire du pays.
« Placée sur un projet de loi budgétaire incontournable, la loi stipule qu'aucun élève de la maternelle à la 12e année [l’équivalent de la terminale en France, NdR.] ne peut être “exposé, instruit, inculqué ou contraint d'exprimer sa croyance ou son soutien” à un ensemble d'idées sur la race, le sexe et d'autres catégories », explique le PEN America. Une loi qui permet aux établissements de se délester d’un ou d’une enseignante, et toute personne « prétendant être lésée » pourra s’attaquer juridiquement à une institution scolaire ou universitaire.
PEN America alerte aussi sur la mise en place d’un système de surveillance, avec la création de lignes d'assistance téléphonique : ces dernières pourraient être mises à disposition afin que le public puisse signaler un enseignant qui « omet le contexte pertinent et important » d'une leçon. « L'un des principaux objectifs de ces dispositions est de terrifier les éducateurs pour qu'ils réfléchissent à deux fois à la façon dont ils discutent de la race, du sexe et de l'histoire américaine — un fait que le gouverneur DeSantis a franchement admis dans ses remarques la semaine dernière. »
via AP News, News 4 Jax
Crédit photo : gguy44 / Unsplash
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11 Commentaires
Aradigme
25/12/2021 à 11:14
L'auteur écrit: "Quant à l'acronyme « woke », il fait aussi, bien sûr, référence aux militants antiracistes, qui luttent pour les droits des minorités..."
Certains mots me semblent ici détournés de leur sens premier. Ces militants WOKE promeuvent la théorie critique de la race qui assigne à chacun des comportements et des caractéristiques en fonction de la couleur de peau, du sexe, etc... Pour eux, un mâle blanc est nécessairement un dominant raciste coupable jusqu'à la fin des temps et obligé de s'excuser en permanence, le genou à terre. Selon eux, un mâle blanc bénéficie du "privilège blanc", même s'il s'agit d'un ouvrier au chômage atteint d'un cancer.
Ces militants ne luttent donc pas pour le droit des minorités discriminées à obtenir les mêmes droits que tous, mais pour la diabolisation d'un groupe humain parmi d'autres (les mâles blancs) ainsi que l'affirmation de la supériorité d'autres groupes humains (noirs, femmes, gays, etc...).
Ces militants hiérachisent les humains dans ce qu'ils définissent par le terme d' "approche intersectionnelle". En gros, selon eux, une femme noire lesbienne subira de par sa nature une discrimination supérieure à celle vécue par un homme chinois hétérosexuel. Ils considèrent qu'elle se trouve dès lors en droit de demander des compensations particulières (traduisez: des privilèges) même si aucun acte de discrimination prouvé n'a été posé à son égard. Sa nature suffit à la classer sur une "échelle de la discrimination et de la repentance".
Les WOKE estiment qu'un Blanc a automatiquement bénéficié de l'esclavage qui existait au XIXe siècle et en porte le poids moral, même s'il s'agit d'un Finlandais émigré aux USA en 1980. Ils estiment qu'un Noir a automatiquement souffert de l'esclavage historique, même si c'est un Ethiopien émigré aux USA en 1999.
Ces militants défendent donc l'obtention de droits spécifiques pour certaines "minorités", en fonction de la race, du sexe, de la religion, etc... ce qui est quand même un peu différent de la lutte pour l'égalité des droits de tous les citoyens. Ils pronent une théorie qui éclate l'humanité en un grand nombe de groupes classés sur une échelle de la discrimination supposée et automatique. Leur projet va bien entendu à l'encontre de l'égalité des droits pour tous les citoyens.
La parole doit évidemment rester libre, même lorsqu'elle émet des âneries, et personne ne censure ces inepties aux USA.
Cependant, certains états dont la Floride ont considéré que ce genre de théorie authentiquement raciste, sexiste et clivante, qui conduit nécessairement à terme à des affrontements entre les groupes ainsi définis, ne devrait pas être enseignée aux enfants et que les livres qui les prônent n'avaient pas plus leur place dans les librairies scolaires que "Le protocole des sages de Sion" ou "Mein Kampf". Il ne s'agit donc à mon sens pas de censure, mais du refus par un état démocratique de supporter l'enseignement une idéologie mortifère.
Rob
25/12/2021 à 14:27
Tout à fait d’accord et il est grand temps de lutter contre le wokisne et tout ce qui tourne autour. Je suis ravi que la floride se réveille et puisse les autres états faire de même
Locke
27/12/2021 à 08:57
C'est tellement un gloubi-boulga de conneries rances et de clichés mal renseignés que j'ai la flemme de commencer à vous éduquer. Renseignez-vous véritablement sur ces études critiques au lieu de régurgiter ce genre d'idioties. Vous racontez n'importe quoi, à ce niveau de déconnexion ça en devient ridicule.
PauvreMonde
26/01/2023 à 09:31
Aradigme a tout à fait raison.
On importe un concept américain, initialement bien pensant mais qui dérive complètement de son but premier. On l'a vu avec l'UNEF en France ou avec nombre de commentaires mysandriques ou "anti-blancs" jusque dans le journalisme alors qu'au bout d'un moment il faut arrêter : tout le monde a le droit au respect et pas plus certains que d'autres ou certains au détriment des autres.
Stop de nous faire ch*** avec ces délires d'extrémistes décérébrés.
ShakeG
26/01/2023 à 17:34
<<Ces militants WOKE promeuvent la théorie critique de la race qui assigne à chacun des comportements et des caractéristiques en fonction de la couleur de peau, du sexe, etc... >>
FAUX -> La théorie critique de la race prend acte que les races n'existent pas sur un plan scientifique mais note l'existence de personnes racisées, c'est à dire perçues différemment par leurs pairs en raison de leur couleur de peau ou de leur origine. Et c'est un constat absolument indéniable, parfaitement légitime.
<<Pour eux, un mâle blanc est nécessairement un dominant raciste coupable jusqu'à la fin des temps et obligé de s'excuser en permanence, le genou à terre. >>
FAUX (et particulièrement ridicule) -> Aucun militant de BLM n'a jamais tenu de tel propos. Les personnes de couleur aux Etats-Unis demandent à ce que le profilage raciale par la police cesse, que les bavures policières (qui touchent en majorité des personnes racisées) soient plus sévèrement punies, ils veulent la fin de la société à deux vitesses créée pendant l'apartheid et qui subsiste encore à plein d'échelons de la société américaine. CA N'A AUCUN RAPPORT AVEC UNE EVENTUELLE CULPABILITÉ D'ÊTRE BLANC, ET C'EST TOTALEMENT RIDICULE DE PRÉTENDRE CECI.
<<Ces militants ne luttent donc pas pour le droit des minorités discriminées à obtenir les mêmes droits que tous, mais pour la diabolisation d'un groupe humain parmi d'autres (les mâles blancs) ainsi que l'affirmation de la supériorité d'autres groupes humains (noirs, femmes, gays, etc...).>>
FAUX -> L'idée que des êtres humains soient naturellement supérieurs à d'autre EST JUSTEMENT CE QUE LES MILITANTS ANTIRACISTES COMBAT !!! Seule l'extrême-droite tient des discours sur des races soi-disant supérieures aux autres.
<<Ces militants hiérachisent les humains dans ce qu'ils définissent par le terme d' "approche intersectionnelle".>>
FAUX -> L'approche intersectionnelle vise à identifier des individus victimes de plusieurs discriminations simultanément, de manière à pouvoir les aider plus efficacement, réduire le taux de suicide dans ces catégories de population et trouver des solutions ciblées. AUCUNE NOTION DE HIERARCHIE D'HUMAINS N'INTERVIENT ICI !! (et c'est terriblement malhonnête de le prétendre)
<<Les WOKE estiment qu'un Blanc a automatiquement bénéficié de l'esclavage qui existait au XIXe siècle et (...) qu'un Noir a automatiquement souffert de l'esclavage historique, même si c'est un Ethiopien émigré aux USA en 1999.>>
FAUX -> Premièrement, Woke n'est pas un terme qui désigne un groupe d'humains précis, donc affirmer que les woke font ceci ou font cela n'a aucun sens. Deuxièmement, être woke c'est être conscient des discriminations vécues par un certain groupe social, de manière à les prendre en compte dans les réflexions politiques et sociales, ça n'a AUCUN LIEN AVEC DES INDIVIDUS ET LEUR PARCOURS PROPRE.
<<La parole doit évidemment rester libre, même lorsqu'elle émet des âneries, et personne ne censure ces inepties aux USA.>>
VRAI -> Et personne ne censure non plus les discours "ANTIWOKISTE" beaucoup plus répandus, beaucoup plus bruyants, et qui représentent en réalité un concentré d'idéologie d'extrême-droite extrêmement dangeureux, porté à travers les réseaux sociaux par des individus très peu scolarisés et qui ont été radicalisés sur Internet. Ces discours ANTIWOKISTES visent à répandre la haine raciale, cela débouche sur des fusillades, des attentats, des meurtres. Alors que la théorie critique de la race et la pensée Woke n'ont jamais tué personne et visent à pacifier la société, les ANTIWOKISTES ont pour but de créer de la violence sociale, de la division et d'augmenter le racisme. Ils y parviennent d'ailleurs très bien.
<<Cependant, certains états dont la Floride ont considéré que ce genre de théorie (...) n'avaient pas plus leur place dans les librairies scolaires que "Le protocole des sages de Sion" ou "Mein Kampf". Il ne s'agit donc à mon sens pas de censure, mais du refus par un état démocratique de supporter l'enseignement une idéologie mortifère.>>
FAUX -> Les livres interdits en Floride sont par exemple "Le Petit Chaperon Rouge", "Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur" (immense classique de la littérature américaine), "La servante écarlate", "Maus" (qui est un ouvrage brillant reconnu mondialement) et même... des manuels de mathématique !!
Nous sommes donc bel et bien dans de la censure idéologique pur et dure, digne des heures les plus sombres de l'Histoire et qu'aucun de vos sophismes, aucun de vos mensonges, aucune de vos hypocrisie ne pourrait jamais justifier.
Aradigme a donc tort sur toute la ligne. Son discours est hypocrite et malhonnête. La pensée qu'il diffuse est dangereuse et inepte.
Toinou
25/12/2021 à 13:55
"Professeur agrégé" dites-vous. J'ai un net doute, sachant que l'agrégation n'existe pas hors de France.
Amazigh
30/03/2022 à 01:22
"Qui restreint la liberté d'enseignement" Joli exemple d'orwellisme. L'endoctrinement des enfants par une éducation orientée idéologiquement c'est la "liberté d'enseignement" haha .
Bref total soutien à l'état de Floride pour cette loi précieuse qui protégera les enfants et l'autorité que leurs parents ont sur ces derniers et sur l'éducation qu'ils souhaitent leur fournir.
ShakeG
25/01/2023 à 15:29
"Joli exemple d'orwellisme." Sacrément culoté de se référer à Orwell, qui a passé sa vie à alerter contre le péril que représente l'extrême-droite pour défendre une politique de CENSURE menée par des élus d'extrême-droite dans le but de faire du révisionisme, c'est à dire de réécrire l'Histoire américaine sans le racisme et sans l'esclavage. !!
Ce qui est orwellien,. c'est le terme "woke" ou "wokisme", novlangue creuse et artificielle destinée à décrédibiliser l'empathie.
ShakeG
25/01/2023 à 15:32
La gue-guerre ridicule de l'extrême-droite contre cet ennemi invisible (et inexistant) qu'elle a elle-même créée et baptisée "wokisme" atteint les sommets du pathétique. Et évidemment, la cancel culture (c'est à dire le phénomène par lequel l'extrème-droite censure les bibliothèques, les écoles et l'Histoire en général pour faire du révisionnisme acharné) continue.
Moiu
12/03/2023 à 01:28
Les accusations contre l'homme blanc occidental proviennent surtout des régimes totalitaires d'Afrique,du Proche Orient et d'Asie
Dutch Thought
26/04/2023 à 10:59
Ce qui me gêne aux USA qu'un noir est un Afro-Américain d'une part. Et lorsqu'on parle de Abraham Lincoln on ne parle pas de l'élimination des indigènes qui vivaient aux états-unis. Ce sont les indigènes les américains : les blancs sont donc des Euro-Américains ... Effacer donc des évènement de l'histoire américaine n'est pas une nouveauté.