Les bouquinistes retirés des quais de Seine pour les JO 2024
Les bouquinistes entendaient profiter des Jeux olympiques 2024 et son afflux de touristes du monde entier, mais les autorités ne les ont pas conviés aux festivités, bien au contraire : la préfecture de police a ordonné que l’on retire ces boîtes vertes si caractéristiques durant les festivités, pour raisons de sécurité. « Ça va être un massacre : 200, 300, 400 boîtes vont être détruites et devoir être refaites à neuf », s’alarme le président de l’Association culturelle des Bouquinistes de Paris, Jérôme Callais.
Le 31/07/2023 à 16:23 par Hocine Bouhadjera
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Publié le :
31/07/2023 à 16:23
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En effet, les déplacer, c’est risquer de les endommager durablement, ajoute celui qui est bouquiniste depuis une trentaine d’années auprès de FranceInfo. Ce sont près de 570 boîtes qui devraient être enlevées des quais de Seine, a déclaré la préfecture de Paris. La problématique ? Elles se trouvent dans le périmètre de protection mis en place pour la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques.
Niet à la mairie
La mairie de Paris avait émis l’idée de maintenir les boîtes sur place, scellées et fermées 7 jours avant et durant les Jeux, et de faire venir le déminage. Une autre, présentée dans une réunion de concertation le 10 juillet dernier, est de déplacer les bouquinistes à Bastille, avec cette même question de potentiellement casser les boîtes dans leur déplacement. Des solutions qui n’ont donc pas été retenues par la préfecture de Paris.
Après cette réunion de concertation, les bouquinistes ont reçu un questionnaire à remplir pour se prononcer sur la proposition de la ville. Un constat : elle a été mal accueillie... « Ils veulent nous "déboîter"… Mais au moins, on nous demande notre avis », décrit une libraire, non sans humour, auprès de Marianne.
Face à la détérioration de certaines boîtes dans le transport, la mairie de Paris évoque une rénovation de ces dernières, avec un autre avantage brandi : cela soutiendrait la candidature des bouquinistes au patrimoine mondial de l’Unesco... Les bouquinistes sont déjà inscrits au patrimoine culturel immatériel français depuis 2019.
« Inimaginable »
« On veut nous enlever des quais pour quatre heures de cérémonie, c’est ahurissant, ça n’a pas de sens », s’insurge le représentant des libraires des quais de Seine. Et d'halluciner : « Le cahier des charges prévoit sept jours pour enlever les 600 boîtes, c’est inimaginable. » Le sentiment qui domine : « Colère, stress, inquiétude et angoisse. »
Il conclut : « On est un symbole majeur de Paris, on est là depuis 450 ans, et on voudrait nous cacher, on fait honte pour la cérémonie. Cette décision n’a pas de sens. » En août 2022, il expliquait auprès de France 3 : « C’est un privilège, un honneur d’être bouquiniste. Il y a très peu d’élus. Il faut en être conscient, en être fier. Nous sommes un peu des ambassadeurs de la culture française pour des millions de touristes qui passent chaque année sur les quais. »
La mairie pense néanmoins constituer un « village des bouquinistes » pendant les JO, afin de « mettre en valeur ce métier » et de permettre aux bouquinistes de bénéficier de l'afflux de touristes.
L’identité de Paris
Activité intrinsèquement liée à Paris, les bouquinistes sont autant les garants d’une histoire spécifique que d’importants représentants de la ville. Dans l’absolu, un bouquiniste doit être présent au moins 4 jours par semaine, avec la possibilité de se faire remplacer une fois. En échange, ils n’ont ni loyer ni charges à payer.
Le terme de bouquiniste s’impose vers la fin du XVIIIe siècle. On retrouve d’abord le terme « estaleur », défini dans le Dictionnaire de Savary de 1723 comme ces « pauvres libraires, qui, n’ayant pas le moyen de tenir boutique ni de vendre du neuf, [qui] étaloient de vieux livres sur le Pont-Neuf, le long des quais et en quelques autres endroits de la ville ; mais ces étalages ont été défendus par plusieurs arrêts et notamment par celui du 20 octobre 1721, à peine de confiscation, d’amende et de prison ».
C’est chez ces colporteurs que l’on retrouve notamment beaucoup d’ouvrages des bibliothèques privés d’aristocrates guillotinés.
S'adapter ou mourir
Concrètement, le métier naît en même temps que l’imprimerie et consistait en des libraires sauvages, proposant œuvres interdites ou d’occasion. Ces derniers se fixeront véritablement sur les quais à la suite des grands travaux haussmanniens et l’adjonction de ces boîtes vert wagon. S’ils gardent longtemps une certaine aura sulfureuse, ils sont ainsi officialisés au XIXe siècle. Au début du XXe, leur emplacement est géré par l’hôtel de ville qui leur prête des boîtes en concessions renouvelables.
À LIRE - Le livre d'occasion à l'âge des grandes plateformes
La diminution du lectorat concomitante à l’augmentation de l’activité touristique a forcé les bouquinistes à se diversifier. En revanche, plus on s’éloigne des zones touristiques et plus la littérature reprend ses droits, que ce soit du côté de Jussieu ou de Port Royal. Internet, rendant accessible n’importe quel texte, a également favorisé la normalisation de leur offre à des fins de subsistance.
Claude Attard (CC BY-SA 2.0)
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14 Commentaires
LE BIBLIOPHILE
01/08/2023 à 10:32
Bonjour,
Honteux de supprimer même temporairement un des charmes majeurs ambulatoires des bords de Seine parisiens,
la mairesse de Paris ne mérite pas son poste si elle ne s'y oppose pas farouchement.et le ministre de la Culture doit aussi intervenir en force pour défendre le livre en général et ceux qui aident à la propagation de la culture en particulier ,les bouquinistes dans ce cas spécifique.
Vivent les bouquinistes, vivent les bibliovores.
Yves MICHEL éditeur
01/08/2023 à 14:35
Les bouquinistes virés pendant les J.O. ? Encore un bel exemple de faux-prétexte (pré-texte ?) pour dégager tout ce qui fait désordre avec l'Ordre impérial de l'industrie, que ça soit du tourisme ou autres : rien ne doit dépasser !
Lisons ou relisons Naomi Klein (La Stratégie du Choc) : l'Etat saisit toute occasion de resserrer son emprise sur nos libertés, par effet cliquet (bah, ce n'est pas si grave cette fois-ci... mais les "fois" s'enchaînent).
Soyons vigilants...
Cecile
02/08/2023 à 15:05
Scandaleux ! Il existe d’ailleurs une pétition pour sauver les bouquinistes : https://chng.it/HCNQqqtsjB
Jean-Daniel
05/08/2023 à 18:13
ineptie anti tourisme
Homère85
07/08/2023 à 13:40
Que dire devant autant d'outrances ?
Un petit gouvernement déciderait de bafouer l'Histoire de notre capitale pour une simple cérémonie ? Des quais de Paris aux images « propres » devraient remplacer des quais « souverains » au prétexte de la rentabilité ?
Cette rentabilité qui assassine notre monde ?
Sommes-nous en Chine ?
Alors précisément non, monsieur Claude Attard.
J'ai tant d'ouvrages que je saurai vous affirmer qu'Internet est très loin de rendre « n'importe quel texte accessible » comme vous le prétendez. Cet Internet au demi-million de datacentres dans le monde qui réchauffe notre atmosphère ! Ce que vous avancez relève du mensonge qui pour sa part, joue très directement son rôle dans la diminution du lectorat comme celui de l'intellect planétaire qui décroît quotidiennement par sa quête constante et insupportable de productivité.
Sans la consécration innée de l'Histoire, l'humanité n'a aucune sémantique d'avenir à louer.
Et il serait vain de prétendre le contraire, car plusieurs millénaires soutiennent le poids de mes mots qui m'attriste et me laisse penser que notre pays mérite davantage d'éloquence dans sa gestion notamment culturelle.
Claude
21/08/2023 à 08:30
Où est le texte de la pétition d'Hubert Bouccara ?
Guy Kugler
21/08/2023 à 18:44
INADMISSIBLE
Athénaïs
22/08/2023 à 18:00
Les bouquinistes ne paient pas de loyer effectivement, par contre, ils paient l'impôt foncier car les boîtes leur appartiennent (bien meuble). Bonne journée à vous
Mank
07/09/2023 à 17:12
C'est scandaleux, en plus d'être idiot.
Les Bouquinistes font partie du paysage Parisien.
Va t on aussi enlever la Tour, les Pavés, les chaises des tuileries... Les pigeons, mon dieu, qui sait si un drône ne va pas se glisser parmi eux, allez hop, ouverture de la chasse...
Richard Walter
11/09/2023 à 09:28
Totalement idiot et injustifié de "cacher" ses bouquinistes qui font partie INTEGRALE du paysage....
Lili
18/09/2023 à 23:26
Bonsoir
Je ne veux pas que l'on enlève les bouquinistes !
Courage.
Béné
28/09/2023 à 08:59
Scandaleux !
On détruit l'histoire, on détruit le peuple et on continue, vive la France !
Christopher McAndrew
26/10/2023 à 13:25
Quelle honte incommensurable.
Retirez-donc les boîtes, placez-les dans la trappe du Père Ubu, mais aussi les quais, les péniches, la tour Eiffel et les pigeons. Notre culture n'a rien d'éphémère devant vos Jeux provisoires à l'argent cinglant, qui hantent et défient tous les dépositaires de notre histoire profonde.
Dans cette augure des plus ombrageuses, n'omettez point d'enlever le palais de votre Justice ténébreuse et de sa Cour du Mai, le Louvre autant que le musée d'Orsay où Madeleine Renault dans une pièce de Beckett jouait Winnie, déclamant à peu près :
« Oh les beaux jours, où sommes-nous passés, où sont-ils passés, les beaux jours, eh bien, qu'est-ce que je dis ? »
Comment tolérer l'intolérable ? nous disait Camus tant primé au bord de l'eau dans ces boîtes à rêves.
Ô France, terre des Lumières, des mots, des idées et de la liberté ! Comment peux-tu envisager d'ôter aux quais de la Seine ces gardiens de notre trésor littéraire, ces bouquinistes qui incarnent l'âme de notre culture depuis le 16e siècle ? Supprimer les bouquinistes, c'est comme arracher des pages de notre histoire, brûler des livres sacrés, et fermer les portes du savoir.
Les bouquinistes des quais de la Seine sont les gardiens de nos pensées les plus profondes, de nos rêves inscrits sur papier, de notre héritage littéraire. Ils sont les sentinelles de la créativité, les ambassadeurs de notre patrimoine, et les témoins silencieux de notre quête de connaissance. Leurs étals colorés rappellent chaque jour à tous les passants que Paris est la capitale mondiale de la culture.
Supprimer les bouquinistes, c'est faire taire la voix de Victor Hugo, des écrivains, des poètes, des philosophes qui ont sillonné ces quais depuis des siècles. C'est priver les générations futures de la possibilité de découvrir les trésors cachés dans ces livres anciens et de se connecter avec notre riche passé littéraire.
Faisons appel à la raison, à la préservation de notre héritage culturel, face à l'avidité ou l'indifférence étouffer ce lieu de mémoire vivante.
Les bouquinistes sont les gardiens de notre âme littéraire, et leur disparition serait une perte incommensurable pour notre société. Laissez-les prospérer, car ils sont les gardiens de notre trésor, les gardiens de notre âme, et les gardiens d'une frange incontestable de notre propre histoire.
Durand
17/11/2023 à 20:46
Honteux. Pour raison de sécurité!!! C'est inimaginable de lire ce genre d'inepties.