L'éditeur Emmanuel Bluteau a des auteurs qu'il chérit particulièrement: l'un d'eux est Jean Prévost, écrivain et résistant, mort les armes à la main dans le Vercors en 1944 à l'âge de 43 ans. Après avoir publié "L'affaire Berthet" que nous avons chroniqué, La Thébaïde fait paraître aujourd'hui Le journal de travail (1929-1943) de ce même Jean Prévost avec une préface de Jérôme Garcin (à qui l'on doit un "Pour Jean Prévost", biographie parue en 1994). "J'ai toujours pensé, écrit ce dernier (...) que Jean Prévost s'apprêtait à donner, après la guerre, son grand roman, son oeuvre majeure." Le destin ne l'a pas voulu. Et on lira donc ce journal de travail, cette "arrière-boutique" de l'écrivain, avec un sentiment mêlé d'admiration et de tristesse pour cette promesse qui s'annonçait déjà et ne fut pas tenue.
Le 03/11/2019 à 09:00 par Les ensablés
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03/11/2019 à 09:00
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Ce livre mérite évidemment d'être lu par tous les amateurs de Jean Prévost, auteur notamment du magnifique Les frères Bouquinquant (1930), mais également par ceux que le mystère de la création littéraire intrigue. Tout d'un coup, on est projeté dans le cerveau d'un écrivain en action.
L'ouvrage se compose pour l'essentiel de cinq cahiers s'étendant sur une période de quatorze ans, pour s'achever en 1943, à la veille de son départ pour le Vercors. A ce moment-là, il est en train de rédiger un roman Cette petite vie qu'il ne pourra pas terminer, ainsi qu'un essai sur Baudelaire publié à titre posthume en 1953 grâce aux soins de son ami Pierre Bost que les lecteurs de ce blogue connaissent bien.
Ce Journal de travail est un objet littéraire non identifié. Ce n'est ni un journal intime, ni un recueil de notes, ni un livre de comptes, c'est un peu tout cela. Prévost y jette ses pensées et son emploi du temps (très chargé): ayant renoncé au professorat, il doit "produire" pour nourrir sa famille, d'où de savants calculs. Il minute ses activités de la journée: lecture, rédaction d'articles alimentaires, écriture de ses romans en cours (nombre de pages à faire par jour). Chaque année, comme une entreprise, il dresse le bilan de ses activités. Pour lui, ce n'est jamais assez. Toujours plus! C'est sa devise. Il n'est pas un grand sportif pour rien. Pour lui, la vie littéraire, une vie littéraire réussie, entendons-nous, ne peut être que le fruit de l'effort: (...) je pourrais cependant résoudre tous les problèmes actuels par le travail seul (et l'art d'offrir mon travail).
Mais Prévost n'est pas proustien; il est stendhalien, en ce sens qu'il privilégie le premier jet, qu'il croit le seul sincère. Ce n'est donc pas un correcteur maniaque. Il a tant de projets dans sa musette qu'il y a toujours, on le sent très bien à la lecture, une hâte jamais démentie, un investissement total de sa personne. En dehors même du travail colossal auquel il se livre, l'homme impressionne par sa capacité à s'investir totalement dans ce qu'il fait, trait de caractère qui le conduira au sacrifice total.
Sa curiosité est insatiable. Il veut tout lire, tout connaître, dans tous les domaines de la pensée, comme si, au bout, il devait y avoir quelque chose: une récompense? Une Révélation? En attendant, il s'enrichit sans cesse en nouvelles connaissances.
Exemple: dans la dernière semaine d'octobre 1930, il déclare avoir lu une autobiographie de Darwin, une biographie sur Maurice de Guérin, le Journal du même Guérin, Paul Valéry et Arthur Gordon Pym de Poe.
Fin 36, il se fixe un programme pour 1937, en indiquant un échéancier: un sketch pour le 1er février, une pièce en un acte, 6 chapitres de roman pour le 15 avril (!) etc. Evidemment, il ne peut s'y tenir. Alors il s'adresse des reproches, cherche à gratter des heures sur son sommeil... Il y a en lui quelque chose du bon élève. Il n'est pas fils de directeur d'école pour rien.
Et puis, il y a ses rencontres: Paulhan, bien sûr, avec qui il entretiendra une relation suivie, Martin-du-Gard, Vaudoyer, Fabre-Luce (avant son ralliement au PPF de Doriot), et bien d'autres que l'on découvre au gré des pages.
Mais ce qu'on retiendra surtout, peut-être, ce sont ses aphorismes dont certains seront repris dans Les caractères (inachevé), où se mêlent morale, philosophie, littérature. Celui-ci par exemple, qui me semble bien définir la pensée de Prévost: "La pire promiscuité est avec soi-même. Nos rêveries ne sont que les excréments de notre esprit, où il ne fait pas meilleur vivre que dans les excrétions du corps." Ecrivain, Prévost se méfie néanmoins du rêve. Il n'a pas tort: écrire un roman est aussi et surtout un travail d'artisan. La jeunesse croit en l'inspiration, à l'opium, mais rien n'est plus astreignant que l'écriture: il faut être en forme, avoir beaucoup de courage et de foi!
A l'avant dernière page de son journal, alors qu'il n'en a plus pour longtemps à vivre, lui qui promettait tant, il écrit:
Je me prie humblement pour mettre plus de méthode dans mon travail, pour préparer mon agenda et lui obéir, pour dominer la fièvre des circonstances. (...) Je me prie pour la sérénité, pour ces heures d'oubli dans le travail qui sont les heures d'éternité.
Enfin, on saluera ici le travail critique remarquable réalisé par Emmanuel Bluteau dont les notes en fin de volume éclairent les propos de Prévost, et plus globalement tout ce qu'il fait pour la littérature en ce temps où elle est si maltraitée ou négligée.
Par Les ensablés
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08/12/2024, 07:30
Pendant l’Occupation, voici le monde des collabos antisémites décrypté de l’intérieur : dans ce roman autobiographique, l’historienne Cécile Desprairies dresse un portrait intime de son passé familial. Pour mieux s’en libérer.
07/12/2024, 18:51
On connait tous « l’Amiral » pour ses coups de gueules ou son humour dans les émissions radio. Pourtant, derrière l’image de ce breton au long court, se cache un passeur d’histoire maritime et un humaniste. Par Christian Dorsan.
07/12/2024, 08:41
BONNES FEUILLES – Lors des vacances passées dans la maison de ses grands-parents, la narratrice, encore enfant, est confrontée à des souvenirs flous et traumatiques. Mes pieds nus tapent le sol (Éd. Double Ponctuation), Laure Martin explore ce rapport avec la mémoire, lorsque l’esprit veut oublier, mais que les souvenirs persistent.
07/12/2024, 07:30
BONNES FEUILLES – Sushina Lagouje, jeune femme myopathe, porte un désir simple et universel : celui de devenir mère. Mais ce rêve va rapidement se heurter à un mur de préjugés et de discriminations. Alors qu’elle souhaite juste Une grossesse ordinaire (Éd. Double ponctuation).
07/12/2024, 06:30
PODCAST – À travers Les Éphémères, Andrew O'Hagan, romancier originaire de Glasgow (Ecosse) offre une réflexion profonde sur la fragilité de l'existence. Seule ressource pour affronter la vie qui nous est donnée : la force des liens amicaux, souvent mise à l'épreuve de choix difficiles.
06/12/2024, 13:33
Véritable triomphe pour celui qui a déjà dompté l'Everest : Inoxtag, avec son acolyte Charles Compain, est sur le toit des ventes de livre de la semaine (du 25 novembre au 1er décembre), et ce pour la seconde fois consécutive. Instinct, Tome 1, s'est écoulé à 71.216 exemplaires. Bel exploit pour l'Homme de l'année selon GQ.
06/12/2024, 13:23
Quoi de mieux, quand on adore lire, que d’entrer dans l’apprentissage d’une langue grâce aux ouvrages les plus célèbres écrits par les plus grands écrivains. Avec l’espagnol, vous avez l’embarras du choix : tant d’auteurs se sont illustrés dans la langue de Cervantes…
06/12/2024, 13:10
BONNES FEUILLES – Vies et morts de Sophie Blind (Éd. Rivages, trad. Jakuta Alikavazovic), Susan Taubes nous plonge dans l’univers d’une femme en quête d’émancipation. Née en Hongrie, elle est petite-fille de rabbin, fille de psychanalyste, épouse d’universitaire.
06/12/2024, 07:30
#PiktosPoche – Certaines expériences de vie peuvent avoir un effet bénéfique sur nous, tandis que d'autres, en revanche, engendrent des états de mal-être. Comment les souffrances de l'âme influencent-elles la santé physique ? Il existe une relation constante entre l'âme, la psyché et le corps : si vos émotions sont perturbées, elles affectent votre être dans son ensemble, et si vous ne prêtez pas attention à cette influence, il est possible que votre corps en souffre également.
06/12/2024, 06:30
Comprendre le principe et l’utilité de la blockchain devient de plus en plus nécessaire, à la fois au niveau personnel et professionnel. Cependant, cet univers reste difficile à appréhender pour beaucoup d’entre nous.
05/12/2024, 13:58
Après l’album La synagogue, Joann Sfar poursuit son récit autobiographique en abordant cette fois son rapport au dessin et au décès de sa mère. Ce sont Les idolâtres (Dargaud). Disons-le tout de go : il est difficile de parler de cet ouvrage, car le décortiquer ne pourra jamais rendre justice à la magie qui l’habite.
05/12/2024, 13:01
C’est plat, mais quand même, c’est joli ! (Editions Flblb) Xavier Couteix nous présente Aster, qui fait de l’escalade à un haut niveau sportif. C’est une passion qui l’habite. Aster est aussi en dernière année d’une école de design à Amsterdam. Il aimerait faire son projet de fin d’études sur l’escalade, et se pose dès lors la question de pratiquer ce sport en pleine ville, de passer des hautes montagnes à un pays bas.
05/12/2024, 11:58
BONNES FEUILLES – Dans Le ciel de Tokyo (Editions Rivages), nous sommes invités à observer, à travers la ville, les trajectoires croisées d'une galerie de personnages. Une fois arrivés, nous posons nos valises dans une pension bohème, où expatriés et voyageurs viennent tisser, au gré des rencontres, les fils d'une existence partagée.
05/12/2024, 08:30
BONNES FEUILLES – Avec Flamboyante Zola (Les Presses de la Cité), Jean-Louis Milesi fait revivre Alexandrine, compagne puis épouse d’Émile Zola, dans un roman mêlant fiction et réalité. Une plongée bouleversante dans le destin d’une femme trahie, mais qui, face aux épreuves, se transforme en une héroïne éclatante et résiliente.
05/12/2024, 07:30
#PiktosPoche – Nous sommes tous magnétiques, à des niveaux différents. Utiliser son magnétisme et le développer est une volonté propre à chacun. Si vous êtes désireux d'explorer cette voie, Jacques Mandorla met à votre disposition des conseils et des exercices afin de savoir magnétiser.
05/12/2024, 07:00
Dans Une colère simple (trad. Marianne Faurobert, Éditions du Masque), voici la troisième enquête de l’équipe de choc montée à Turin par Davide Longo, dont la réputation de « nouvelle star du polar italien » est décidément bien méritée. L'auteur était en début d’année la coqueluche des médias transalpins qui l’annonçaient comme la star du nouveau polar italien.
04/12/2024, 15:29
BONNES FEUILLES – Avec Ma grand-mère et le Pays de la poésie (Flammarion), Minh Tran Huy retrace l’histoire de sa grand-mère, figure centrale de son enfance, et explore son héritage vietnamien entre douleur et merveilleux. Un hommage qui mêle souvenirs, contes et quête de sens.
04/12/2024, 08:30
BONNES FEUILLES – Dans Tout est chaos (Les presses de la Cité), Carmen Bramly nous entraîne dans le quotidien d’une jeune femme de la génération Z plongée dans l’univers exigeant de la publicité. Entre ambitions professionnelles, relations éphémères et scandales au travail, elle interroge les contradictions de notre époque et les dégâts du post-#MeToo.
04/12/2024, 07:30
L'helléniste Édith Hamilton voit son ouvrage majeur, La mythologie - ses dieux, ses héros, ses légendes, rééditée chez Dervy, dans une belle édition illustrée. Dans cette sorte de manuel d’histoire à l'usage de tous les publics, elle revient sur les grands mythes et légendes qui « constituent le fondement même de notre culture et continuent d’inspirer profondément notre époque ».
03/12/2024, 16:10
S’il y a bien une langue que l’on aime à entendre, c’est l’espagnol. Quel plaisir, en effet que ces sonorités chaleureuses qui ont toujours comme un air de vacances, de soleil et de bonne humeur. Voilà autant de bonnes raisons de vouloir se mettre à l’étude de la langue de Cervantes.
03/12/2024, 15:44
#PiktosPoche – La conscience n'est pas enfermée, elle peut voyager hors du corps. Dans cet ouvrage riche de témoignages, Bernard Raquin propose de nombreuses méthodes largement expérimentées - autohypnose, déplacement des sensations, exercices de visualisations -, qui permettent de sortir de son corps en toute sécurité, et d'y revenir.
03/12/2024, 12:02
BONNES FEUILLES – Dans une veine eastwoodienne expurgée de son chauvinisme américain, porté par une écriture sauvage et déclassée, Transformers met sur le devant du ring la beauté et la grandeur de la boxe, devenue la langue de ceux à qui les mots n’ont pas été donnés. Chez Amine Adjina, le sport, universel, est à la fois l’outil d’émancipations des êtres et leur moyen de communier.
03/12/2024, 10:00
BONNES FEUILLES – Adunni, 14 ans, est vendue par son père comme épouse. Mais dans La fille qui ne voulait pas se taire (trad. Laura Derajinski, Harper Collins), Abi Daré raconte l’histoire d’une adolescente prête à tout pour briser le silence et conquérir son droit à l’éducation. C’est à la fois un cri de révolte et une ode à la résilience.
03/12/2024, 08:30
Tom King et Barnaby Bagenda ont produit, avec Omega Men, un album d’une audace rare. Relecture brillante des codes du space opera, cette aventure s’empare d’un des plus emblématiques héros du corps de Lantern – White Lantern, celui qui réunit toutes les couleurs, parce que non, le blanc n’est pas une couleur, ce sont toutes les couleurs ensemble.
02/12/2024, 17:06
BONNES FEUILLES – Mère est elle morte de Vigdis Hjorth (traduction Hélène Hervieu) raconte l'histoire de Johanna qui, trente ans après une rupture familiale douloureuse, retourne pour la première fois dans sa ville natale. Un soir, après un verre de vin de trop, elle téléphone à sa mère. Regrettant aussitôt cette main tendue – un aveu de faiblesse –, elle est d’autant plus tourmentée lorsque sa mère refuse son appel.
02/12/2024, 16:41
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