Ancien PDG des Éditions La Découverte, François Gèze, est mort
« C'est avec une profonde tristesse que nous avons appris la disparition de François Gèze », révèle Editis. Président-Directeur Général des Éditions La Découverte de 1982 à 2014, Stéphanie Chevrier lui a succédé en 2018.
Le 29/08/2023 à 17:41 par Dépêche
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Publié le :
29/08/2023 à 17:41
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François Gèze demeurait Directeur de collection au sein de la maison. Pionnier de l'édition engagée, il nous a quittés à l'âge de 75 ans. Son héritage en tant qu'éditeur et visionnaire perdurera dans les pages de l'histoire de l'édition et de la pensée critique.
François Gèze a façonné les Éditions La Découverte en une maison d'édition renommée, synonyme de qualité intellectuelle et d'engagements. Son dévouement à l'édition en tant qu'acte de résistance et de changement positif a profondément influencé le paysage éditorial.
« Au-delà de son immense talent, nous n’oublierons pas sa bienveillance infinie, sa finesse aiguisée et sa passion indéfectible pour son métier d’éditeur. Les collaborateurs qui l’accompagnaient aimaient ses immenses qualités humaines autant que son excellence littéraire » déclare Michèle Benbunan, Présidente-Directrice générale du groupe Editis.
« En cette épreuve, nos pensées vont à sa famille, à ses équipes et à ses nombreux amis. Nous partageons leur peine et leur chagrin et leur adressons nos plus sincères condoléances », conclut Editis.
Mise à jour - 18h20 :
Le Syndicat national de l'édition apprend, avec une très grande tristesse, le décès soudain de François Gèze.
« Précurseur dans la compréhension des enjeux et des mutations de l’édition, François Gèze s’est toujours porté en première ligne de tous les grands combats de notre métier, en particulier la défense du droit d’auteur. Nous devons beaucoup à son engagement indéfectible dans l’action collective au service de l’édition et de la chaîne du livre. » salue Vincent Montagne.
François Gèze présidait depuis sa création en 2002 le groupe universitaire du Syndicat national de l’édition.
Mise à jour 31 août - 9h :
Hommage de Rima Abdul Malak, ministre de la Culture, à François Gèze :
C’est avec tristesse que j’ai appris la disparition de François Gèze, grand éditeur, chercheur ouvert sur le monde et intellectuel engagé.
Né à Casablanca au Maroc, François Gèze a passé son enfance entre l’Allemagne et la France, au gré des différentes affectations de son père officier dans l’armée. Il est élève au Lycée Pierre Fermat de Toulouse lorsqu’éclatent les évènements de mai 1968 qui fondent son éveil politique. « C’est vraiment mai 1968 qui a changé ma vie », avait-il déclaré dans ses entretiens avec Thomas Baumgartner en 2013. Brillamment admis à l’Ecole des Mines, « un endroit absolument formidable où l’on ne foutait rien », il s’installe à Paris en 1969 et suit parallèlement un cursus d’économie du développement à l’Institut d’Etudes du Développement Economique et Social.
La même année, François Gèze s’engage au Parti Socialiste Unifié et au centre d’études et d’initiatives de solidarité internationales où il consolide son engagement politique et développe son intérêt pour les questions coloniales.
Mais ce sont les voyages de François Gèze en Amérique du Sud au début des années 1970 qui structurent véritablement tout à la fois son engagement politique et son travail d’écriture.
De retour en France, il créé le Comité de soutien aux luttes du peuple argentin et sera l’un des fondateurs du Comité pour le boycott de l’organisation par l’Argentine de la Coupe du monde de football de 1978. Il fonde également avec Alain Joxe le Comité de soutien à la lutte révolutionnaire du peuple chilien, en réaction au coup d’Etat du général Augusto Pinochet.
François Gèze n’aimait pas parler de lui, mais il se définissait comme un « passeur ». Sa carrière dans le monde du livre, qu’il marquera par sa créativité et son souci de la transmission, en sera une magnifique expression.
A partir de 1977, il rejoint la maison d’édition de François Maspero dont il prendra la tête cinq ans plus tard et qui deviendra les Editions La Découverte. Sa ligne éditoriale sera marquée par d’importantes collections et ouvrages en sciences économiques et sociales. Parmi eux, l’annuaire L’Etat du Monde, conçu avec Yves Lacoste et Alfredo Vallado, dont les publications annuelles proposaient une observation exhaustive et minutieuse de l’état des Nations. Toujours animé par le souci de décloisonner et diffuser le savoir, François Gèze lance aussi la collection de poche Repères, composée d’ouvrages démocratisant les travaux d’universitaires à l’attention du grand public. La Découverte publiera également de nombreux ouvrages sur la culture et les politiques culturelles.
Militant convaincu de l’édition des connaissances, François Gèze avait saisi très vite le potentiel de l’outil numérique. Au début des années 2000, il participe au lancement du portail Cairn.info dont il deviendra par la suite le président. Il sera également l’une des forces vives du programme ReLire de numérisation des livres indisponibles du XXe siècle, qui a inspiré plusieurs articles importants de la directive de 2019 sur le droit d’auteur. [Ndlr : La cour de justice de l'union européenne a mis un terme à ReLIRE en juin 2016]
Fervent défenseur de l’industrie du Livre et en particulier du droit d’auteur, il s’était engagé dans ses instances interprofessionnelles et institutions majeures, au Syndicat national de l’édition, au Cercle de la librairie, à la Bibliothèque nationale de France ou encore à l’Ecole nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques.
Témoin et acteur majeur de l’évolution du monde de l’édition, François Gèze venait de mettre un point final à son essai La double nature du livre – Quatre décennies de mutations dans la “chaîne du livre” qui paraîtra cette automne.
François Gèze a consacré sa vie à nous montrer le monde et à nous faire grandir. Son intelligence, son humilité et son regard bienveillant vont nous manquer.
Crédits photo : ActuaLitté, CC BY SA 2.0
La double nature du livre. Quatre décennies de mutations dans la "chaîne du livre"
Paru le 06/10/2023
160 pages
Belles Lettres
13,90 €
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4 Commentaires
Kujawski
30/08/2023 à 09:39
Quelle différence entre François Gèze et la quasi-totalité de ses ex-confrères qui émargent dans les grands groupes ? Gèze était un éditeur. Ou plutôt un Éditeur, « E » majuscule. Une personnalité, un engagement réel et profond, en direction, pour Gèze, des anciennes colonies françaises au Maghreb, et de leurs peuples aujourd’hui martyrisés, le continuateur d’une maison d’édition altermondialiste, et orientée « à gauche », au sein d’un groupe fermement capitalistique et tout aussi fermement orienté vers le business. Dont Gèze avait accepté les règles, jusqu’à s’en revendiquer.
Quelqu’un qui nous impressionnait autant qu’il nous troublait. Et qui, pour toute réponse à nos interrogations sur l’héritage de François Maspéro, sur l’édition « de gauche », sur le capitalisme, semblait immuablement nous répondre, à la façon d’un Mélenchon (qu’il n’affectionnait pas) : « Faites mieux ».
Jean-Luc BANNIER
30/08/2023 à 09:57
Suis profondément ému de la perte d'un homme auquel j'étais très attaché. Je te serre fort sur mon cœur, François. Tant que nous penserons à toi, tu continueras ta route parmi nous. Jeanluc
Vincent Monadé
30/08/2023 à 11:25
Infinie tristesse. François Gèze fut pour beaucoup dans la numérisation des livres indisponibles et dans la création de Relire. Outre qu'il sut, à La Découverte, prendre remarquablement la suite de Maspero, être un éditeur de sciences humaines majeur, un acteur engagé de la gauche intellectuelle, un passeur de concepts et d'idées comme peu avant lui, un formateur généreux, François Gèze comprit les mutations du numérique avant tout le monde. Il va rester un grand vide, et toujours l'impression de voir un escogriffe aux cheveux épais et gris plongé dans la lecture du Monde, le replier d'un coup et tonitruer "allons manger!". Salut, François.
Ahmed MANAI
05/09/2023 à 02:07
Un grand parmi les grands