« Ce n’est pas un hasard si, durant toute sa vie, mon mari a perdu tant d’argent. Dès 2004, heureux de nous voir nous chamailler, ceux qui “l’encerclaient” n'avaient plus qu’une seule idée en tête : nous diviser, nous séparer, pour mieux nous déposséder », déplore Christine de Villiers. À la tête des éditions Gérard de Villiers, qui rééditent les romans SAS, elle sort d’une longue série de procédures judiciaires.
Le 22/11/2018 à 11:55 par Nicolas Gary
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22/11/2018 à 11:55
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« Le scénario est tristement basique : un entourage douteux, dont j’ai cherché à le protéger. Gérard faisait si facilement confiance » déplore, attristée, mais lucide et très combattive Christine de Villiers, sa veuve. Une femme que l'auteur avait rencontrée en 1986 alors qu’elle avait tout juste 29 ans, et qui est restée dans l’ombre durant près de 30 années.
La journaliste, élevée dans les Maisons d’Éducation de la Légion d’Honneur, n’aimait pas faire parler d’elle. Question d’éducation. Avec un père dans le renseignement, rien de bien étonnant à cela. « Gérard faisait trop facilement confiance aux flatteurs », déclare celle qui obtint son doctorat en Lettres classiques à la Sorbonne.
Fille d’Officier Général de l’Armée de l’Air, Christine de Villiers, qui a fait sienne la devise de l’École de l’Air, « faire face », est toujours gérante de la maison d’édition. « N’en déplaise à beaucoup, mais pas qu’à mes beaux-enfants, les avocats sont partie prenante dans cette affaire. Ils tirent tous profit et bénéfice de cette guerre de succession qui ne doit bien évidemment pas cesser. Et pour cause, elle rapporte gros. »
Elle rappelle les 2500 bouteilles de grands crus du Bordelais disparus depuis bien qu’emportés sous l’œil médusé de la gardienne. La statue La Guerre du sculpteur Philippe Hiquily a, quant à elle, été retrouvée par la BRDA par une personne qui s’était présentée partout comme Madame de Villiers… Y compris, et surtout, pour faire changer les serrures de l’appartement de l’Avenue Foch du couple de Villiers. Des faits qui avaient été signalés à l’Administration fiscale.
Depuis le décès de son mari, le 31 octobre 2013, les démêlés juridiques n’ont donc pas cessé. Sans compter les procédures en cours ou à venir : testament contesté, vols, plainte pour accusations mensongères, calomnieuses, portant atteinte à sa dignité et à son honneur.
« On ne dira jamais assez à quel point les auteurs, les artistes en général, sont encerclés par des personnages animés de mauvaises intentions. La loi de 1957 n’y fait rien. Elle n’a pas été modifiée. La liste d’artistes spoliés est digne d’un inventaire à la Prévert : Honoré de Balzac, Alexandre Dumas, plus proche de nous Françoise Sagan. J’ignore si mon mari en a pris conscience – pense que oui –, mais il était déjà tard, même s’il avait consulté trois nouveaux conseils aux fins de remplacer celui dont il ne parvenait pas à se débarrasser. Je pense qu’il avait compris, mais trop tard. Quand en novembre 2011, il m’a demandé en pleurant de l’aider à tout prix, je ne savais pas par où commencer », déclare encore sa veuve.
Concernant la maison d’édition, la succession n’aurait pourtant jamais dû faire l’objet du moindre doute : « Nous avons monté cette maison ensemble : elle a été conçue pour le protéger d’agressions extérieures, et défendre son œuvre. Elle a aussi été créée pour que je bénéficie de revenus en cas de malheur, puisque je suis usufruitière à 100 %. » Les enfants, l’ex-femme, tout ce petit monde s’est lancé dans une guerre sans merci, aux fins de récupérer un morceau ou la totalité du trésor SAS.
Après le décès, la valorisation de l’entreprise était très basse, « mais grâce au succès des réimpressions, nous avons probablement gagné plus de 10 fois la valeur attribuée en 2014 ». Encore loin, certes, de ce que fut la maison au faîte de sa gloire, à l’époque où Gérard de Villiers écrivait une nouveauté par trimestre. Mais quand même, c’était un sacré pari. Pourtant pour l’instant, gagné. Même si « mes beaux enfants et l’ex-épouse se permettent de critiquer ma gestion sans rien connaître de l’édition » explique la veuve.
Et de poursuivre : « Mais les avocats se chargent de faire peser toutes les charges sur moi, puis se précipitent pour raconter leur version à quelques journalistes en mal d’une pige. C’est le nouveau sport des avocats en mal d’affaires : chercher à se faire connaître par certains journalistes eux aussi inoccupés. »
« Jusqu’à présent, je n’étais pas encore prête », affirmait encore Christine de Villiers, en septembre 2017. « Mais je savais que je finirais par l’écrire, ce livre : depuis tant d’années, les médias s’étaient emparés de SAS, pour dénigrer l’œuvre de mon mari, la rangeant dans la catégorie : littérature de gare, ouvrages pornographiques — cela le peinait, me peinait. Gérard faisait mine de s’en moquer, mais il souffrait beaucoup de cet acharnement contre lui, contre son œuvre, il souffrait aussi de lire ce que certains journalistes écrivaient sur lui. Et, contrairement à la légende que certains ont véhiculée, il était absolument furieux lorsqu’il a lu sur son lit d’hôpital le papier du quotidien Le Monde. »
Mais les véritables enjeux étaient ailleurs, bien entendu. Bien enfouis dans des tentatives de rachat de son œuvre.
« Sous le label Gérard de Villiers, il serait compliqué de publier de nouveaux auteurs, car l’empreinte laissée par les 200 romans de Gérard est trop forte, même pour un auteur de qualité qui débuterait », précise-t-elle. Ce qui n’empêche pas de penser à l’avenir et d’envisager de nouvelles publications. « Juste différemment ».
« Bien entendu, il y a eu l’ouvrage lamentable qu’a publié Plon en mai dernier, avec cette horrible photo que Gérard détestait, mais ce n’est pas tout. D’abord, je suis la seule femme avec laquelle il est resté aussi longtemps — et il ne fut pas un ange pour autant, je vous l’assure », ajoute-t-elle. « Cette fois, j’en ai eu assez : je me suis décidée à écrire sur lui, sur nous, pour rectifier les mensonges qu’on lit dans la presse. Oui, j’étais réticente, mais avec le temps, trop de saloperies, de mensonges ont été écrits... »
« J’ai été accusée de détournement de fonds, d’abus de biens sociaux, ce qui a justifié l’arrivée d’une administratrice provisoire dans mon entreprise. Aucune vérification n’a été faite par le tribunal de Commerce de Paris, rien n’a été rectifié auprès du juge commissaire. Mais maintenant que la vérité est là, bien têtue, je vais me retourner contre mes accusateurs, et les poursuivre, à mon tour, pour ces accusations graves, sans fondement. Et ce, alors que l’on a tenté par tous les moyens de m’arracher la société, dans des conditions très douteuses, honteuses même. »
Ces affaires de succession laissées volontairement mal, voir pas, résolues, par la malice d’avocats, ont convaincu la dernière épouse du romancier d’écrire la vraie vie de ces 30 années passées avec celui qu’on appelait… SAS. Christine de Villiers se lance enfin dans l’écriture d’une biographie, tant de fois repoussée. « Elle sera publiée entre mai et juin l’an 2019. Je rends mon manuscrit sous peu. » Elle paraîtra évidemment aux éditions Gérard de Villiers.
Un grand format avec des photos privées, alimenté par la plume d’une femme qui fut journaliste durant plus de 15 années, dans des publications allant de Cosmo à l’Express, en passant par VSD, « une formation particulièrement riche ».
Alors que l’entreprise connaît une réelle réussite économique, de nouvelles perspectives se profilent : un certain Greg Shapiro a acquis les droits pour l’adaptation des séries SAS en film, les négociations étaient en cours secrètement depuis avril 2015, un premier contrat qui déboucherait sur d’autres projets cinématographiques.
Gérard de Villiers est déjà vendu aux États-Unis, traduit en anglais par William Rodarmor, le traducteur de Katherine Pancol, publié chez Knopf Doubleday
Par Nicolas Gary
Contact : ng@actualitte.com
4 Commentaires
domi montesinos
25/11/2018 à 14:02
Elle est bien courageuse cette dame
Domi Montesinos
auteur de "Mamilou et Grand'père en short autour du monde"
Jeannine Osman
28/02/2019 à 23:06
Entre 1963 et 1968 nous résidions en Thailande mon mari et moi. Nous avons alors fréquenté Gerard de Villiers qui venait souvent dans ce pays qu’il aimait beaucoup et qui l’inspirait. Voir ´ je crois que c’est le titre exact « l’homme de la rivière Kwai. » il venait avec une de ses amies qui se prénommait Alexandra, puis en alternance avec sa femme Annick . C’est loin tout ça mais je me souviens de nos virées chez les antiquaires , dont les 2 bouddhas qui décoraient son appartement Avenue Foch, et une bijoutière qui s’appelait Suzy.
Je m’arrete la, mais que de souvenirs.
Guy de Saint-Cyr
03/01/2021 à 15:59
Je soutiens l'action de Madame. J'ai été amené à rencontrer GdV à plusieurs reprises. Je compatis avec la souffrance de sa veuve. Il y a un moment où les charognards et les vautours devront payer.
Ce que je ne comprends pas, depuis que nous apprenons les déboires des héritiers qui se chamaillent à couteaux tirés, pourquoi rien n'est clairement précisé en amont? Ça libèrera les salles des tribunaux...Une procédure sans appel devra être instaurée.
Philippe Paraire
26/05/2022 à 23:26
Madame Christine de Villiers,
Je ne vous ai jamais rencontré. Il m'est arrivé deux fois de croiser votre mari dans les années 90, alors que j'étais un auteur chez Bordas et directeur de collection chez Hachette-jeunesse. Je trouve excellente l'idée d'une défense de GDV, prenant pour base une biographie que vous connaissez, et moi pas du tout. Ce sera sûrement captivant. Pour ma part, professeur retraité de Lettres classiques et docteur en philosophie, j'ai entamé la relecture annotée de la totalité des 200 romans et, à la manière d'un doctorat de Lettres clandestin ( la Sorbonne n'aurait jamais accepté un doctorat sur S.A.S., c'est évident), j'ai rédigé une défense critique de la série SAS d'un point de vue historique, sociologique et littéraire. Je suis auteur de plus de quarante livre publiés. Désirez-vous lire mon manuscrit PDF? J'en serais honoré. Mes hommages. Philippe Paraire