Jeu vidéo et lecture ont beaucoup à s'apporter, mutuellement : une équipe de bibliothécaires passionnés entend le prouver, encore et encore, avec des recommandations pour prolonger une expérience vidéoludique. Celle du jeu Cuphead, jeu d'action en 2D du studio indépendant MDHR, ne vous laissera pas indemne, avec sa difficulté colossale et ses graphismes splendides... Bienvenue dans Jeu vidéo, livre idéal.
Mickey's Craziest Adventures, de Lewis Trondheim et Nicolas Keramidas, 2016, Glénat
Les nouvelles éditions de Mickey chez Glénat font la part belle au graphisme. Des auteurs franco-belges s'emparent de Mickey et font ressortir l'aspect cartoon tout en s'adressant à un public un peu plus mature. À lire aussi, Mickey et l'océan perdu, de Denis-Pierre Filippi et Silvio Camboni (2018, Glénat) et Horrifikland, de Lewis Trondheim et Alexis Nesme (2019, Glénat). (Charles Goire, BMI d'Épinal, et Nicolas Quereuil, Pôle métropole de la Bibliothèque municipale de Lyon)
Catastrophe, le coffre-fort de Picsou a été dévalisé ! Les responsables ne sont autres que Pat Hibulaire et les Rapetou, ayant réussi à dérober la machine à miniaturiser conçue par Géo Trouvetou lui-même. Pour les arrêter, Mickey et Donald doivent unir leurs forces et partir à leur poursuite. C’est pour eux le début d’une course effrénée, du laboratoire du génial inventeur aux méandres d’une dangereuse jungle, en passant par les ruines d’une cité antique et secrète... Bref, la plus folle des aventures !
L'œuvre de Winshluss, et en particulier Pinocchio, 2009, Les Requins Marteaux
Auteur de bande dessinée et réalisateur, Winshluss trimballe derrière lui tout un bagage de références, dont certaines remontent aux strips et autres cartoons (qu'il s'est amusé à parodier directement) des débuts de l'animation. Ses illustrations les plus dérangeantes ne sont d'ailleurs pas loin des « phases » de certains ennemis dans Cuphead... Pinocchio relit un classique à la lumière de ces styles et récits, avec le style si particulier de l'auteur en prime. (Audric Gueidan, Commission Jeux de l'ABF, et Antoine Oury)
Avec Winshluss, le pantin de bois se transforme en androïde conçu par un ingénieur en mal de reconnaissance. Tandis que « le grillon qui parle » (ici un cafard) connaît un sort plus enviable que celui du roman, puisqu’il s’agit d’un SDF qui trouve à squatter dans la boîte crânienne du petit robot.
Cartoons, les Trésors de l’animation américaine, d'Andrew Farago, traduit par Philippe Tullier et Jean-Marc Lainé, 2017, Huginn & Muninn
Cuphead est évidemment allé chercher une bonne partie de son inspiration graphique chez Tex Avery et les premiers cartoons des studios Disney : si le livre de Farago évoque plus spécifiquement les dessins animés américains des années 1980, il permet de renouer avec quelques-unes de ces influences... (Nicolas Quereuil, Pôle métropole de la Bibliothèque municipale de Lyon)
Dans ce livre collector, le spécialiste californien Andrew Farago livre les plus grands secrets de l’histoire de ces célèbres dessins animés. Publiant pour la première fois de nombreux documents d’archives et les témoignages des scénaristes, animateurs et doubleurs, il décrit comme jamais auparavant l’épopée de ce véritable âge d’or du cartoon.
La Bête est morte !, d'Edmond-François Calvo, Victor Dancette et Jacques Zimmermann, 1944, Éditions G.P., puis Gallimard Jeunesse
Ce chef-d’œuvre de la bande dessinée et de l'illustration s'appuie sur le graphisme saisissant de Calvo, qui frappe dès la couverture, avec ce loup en dirigeant nazi au bras levé. L'album, qui a impressionné Walt Disney en personne, permet de se faire une idée de sa maîtrise de l'anthropomorphisme. (Antoine Oury)
Cette œuvre unique, ce bestiaire sanglant, qui s’inscrit dans la longue tradition du symbolisme animal, est à l’image de cet épisode le plus monstrueux de l’histoire de l’humanité : féroce et impitoyable. La satire est anthropomorphe. C’est la guerre mondiale chez les animaux. Chaque animal a un pouvoir symbolique et évocateur véhiculant certaines valeurs. Des loups affreux et féroces (les Allemands) massacrent, de toute la force de leur artillerie, de braves lapins et courageux écureuils (les Français), sans hésiter à envahir le territoire de fiers lionceaux (les Belges). Mais la résistance s’organise chez les résolus et flegmatiques bouledogues (les Anglais).
Faust, Goethe, 1808 et 1832
L'histoire de Cuphead s'articule autour d'un pacte malheureux passé avec une créature peu recommandable : pourquoi ne pas revenir à l'une des œuvres fondamentales en la matière ? Les deux pièces de théâtre de Goethe ont posé les conditions de ces tristes contrats... (Virginie Bazart, BMI d'Épinal, Commission Jeux de l'ABF)
Faust (1808) s'ouvre sur un étrange pari entre Ciel et Terre : Dieu, qui a confiance en la nature humaine, accorde au diable d'induire un homme en tentation. Sous les traits de Méphistophélès, le diable propose un pacte à Faust, un savant désabusé : en échange de son âme, il lui promet de satisfaire éternellement sa soif de connaissance et de jouissance... Par la réécriture de ce mythe fascinant, Goethe explore les tiraillements de l'âme humaine et pénètre, au-delà du destin tragique de ce Prométhée moderne, jusqu'aux arcanes de l'esprit et du cœur humains.
Écrits sur le jazz, Boris Vian, 1999, Le Livre de Poche
La musique, autant que l'image, a bénéficié d'un soin particulier dans Cuphead, avec des sonorités jazz très marquées, proposées par Kristofer Maddigan. Pour découvrir un peu plus le genre, autant se tourner vers un croyant doublé d'un pratiquant, Boris Vian lui-même, avec ses Écrits sur le jazz... (Nicolas Quereuil, Pôle métropole de la Bibliothèque municipale de Lyon)
Dans ce recueil de plus de trois cents chroniques, parues dans Jazz Hot, Combat, Art, Jazz News, l'auteur de L'Écume des jours témoigne de cette passion née dès l'adolescence, alors qu'il allait applaudir Benny Carter ou Duke Ellington, et qui le conduisit à devenir lui-même trompettiste dans l'orchestre de Claude Abadie, puis au « Tabou ». Il explore au fil de ces écrits tous les univers du jazz, inconditionnel des grands classiques en même temps qu'attentif à l'innovation, pourfendant plagiaires ou suiveurs avec une verve inégalable. Aucune dimension ne lui est étrangère : technique musicale, coulisses du spectacle et de la production, signification d'une musique qui, après avoir été l'expression majeure des Noirs américains, porte les aspirations et la révolte de la jeunesse française.
Cartoon : L'animation sans peine, Preston Blair, traduit par Juliane Regler, 2016, Eyrolles
Cuphead relève le défi d'animer un jeu vidéo en utilisant certaines des techniques les plus éprouvées de l'animation traditionnelle. Pour ceux que cet art si particulier intéresse, le livre de Preston Blair constitue une bonne source d'informations. (Audric Gueidan, Commission Jeux de l'ABF)
Maîtriser les techniques d'animation des grands maîtres du dessin animé est toujours aujourd'hui un préalable indispensable à l'apprentissage des jeunes dessinateurs, y compris pour l'animation moins traditionnelle qu'est la 3D, par exemple. Célèbre animateur passé par les studios Disney (Fantasia, Bambi...) et Tex Avery, Preston Blair donne ici un cours sur le dessin des personnages, des corps et du mouvement, en mettant l'accent sur la perspective, la physionomie et les émotions, la synchronisation de la caméra, du personnage et du son, le traitement des arrière-plans et l'élaboration des storyboards. Il répertorie également les erreurs les plus habituelles à éviter quand on fait bouger (courir, danser, tomber...) un personnage.
CONSEILS: Jeu vidéo, livre idéal #3 : The Last of Us
Tout l'art de Cuphead, Eli Cymet, Chad Moldenhauer, Jared Moldenhauer, 2020, Pix'n Love
Ce beau-livre regorge d'illustrations commentées sur la création de l'univers du jeu et des personnages ainsi que le style graphique. (Cyrille Jaouan, Médiathèque Marguerite Duras, Paris 20e)
Pour la première fois, les deux créateurs lèvent le voile sur les coulisses de la création de Cuphead, à travers un ouvrage exclusif. Dessins, croquis de conception, storyboards, photos internes, maquettes et autres artworks éclatent au grand jour pour mieux comprendre la genèse de cette production singulière façonnée à la main, selon les techniques de l’animation traditionnelle.
Pour découvrir les cartoons qui ont inspiré le jeu, notamment Félix le Chat, Betty Boop, Popeye, Oswald le lapin chanceux ou encore les premiers Disney, la plateforme Internet Archive a constitué une collection à partir d'archives numérisées, à cette adresse.
Cette liste n'est pas exhaustive ! Si, entre deux morts dans Cuphead, vous avez eu l'occasion de découvrir une œuvre proche du jeu, n'hésitez pas à la partager en commentaires !
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