Le mouvement promouvant l’accès ouvert (open access en anglais) à la recherche a été lancé avec une belle idée, celle de mettre les résultats de la recherche à la disposition de tous dans des archives ouvertes et des revues ouvertes. Ce mouvement conquiert maintenant le monde pour le plus grand bénéfice des auteurs, des chercheurs, des étudiants, des bibliothèques, des éditeurs, des universités et des centres de recherche. Et, tout aussi important peut-être, pour le bénéfice du grand public, quelle que soit sa formation et quel que soit son parcours professionnel.
Pour en savoir plus, merci de consulter la présentation de l’accès ouvert par Peter Suber. Certains passages ci-dessous sont d’ailleurs inspirés de cette présentation, un des multiples avantages de l’accès ouvert, à savoir pouvoir s’inspirer du travail d’autrui pour nos propres textes dans la mesure où le nom de la source originale et de son auteur sont impérativement cités.
kate_harbison CC BY SA 2.0
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1.1. Qu’est-ce exactement que l’accès ouvert?
Le mouvement promouvant l’accès ouvert est un vaste mouvement mondial visant à mettre les résultats de la recherche à la disposition de tous. Maintenant que nous avons un réseau mondial dénommé internet, il n’y a plus de raison de faire transiter les articles des chercheurs par le biais de revues scientifiques hors de prix alors que les chercheurs ne sont pas payés pour écrire ces articles puisqu’ils les écrivent dans le cadre de leur travail (et parfois tard le soir ou le week-end à la maison). De plus, en tant que citoyens, nous payons ces chercheurs par le biais de nos impôts et devrions donc pouvoir lire leurs articles gratuitement. L’accès ouvert est bénéfique pour tout le monde, à commencer par les chercheurs, assurés que leur travail est très lu et très utilisé. N’est-ce pas ce que souhaite tout chercheur digne de ce nom?
1.2. Quelle est l’origine de l’accès ouvert?
Le mouvement promouvant l’accès ouvert a été lancé par la Budapest Open Access Initiative (BOAI – Initiative de Budapest pour l’accès ouvert), un texte public signé en février 2002 par quelques pionniers de l’accès ouvert. Dix ans plus tard, ces mêmes pionniers rejoints par d’autres pionniers se sont retrouvés pour signer les BOAI10 Recommendations, sous-entendu de nouvelles recommandations dix ans après la signature de la BOAI pour que tous les résultats de la recherche – dans tous les domaines et toutes les langues – soient systématiquement en accès ouvert dans dix ans au plus tard (en 2022 ou avant).
1.3. Quel est le champ d’action de l’accès ouvert?
Ce mouvement mondial concerne d’abord les revues académiques – et donc les chercheurs – dans tous les domaines, aussi bien scientifiques que littéraires. Ces chercheurs écrivent des articles dans le cadre de leur travail pour faire part de l’avancement de leur recherche à leurs collègues – et au monde – et pour contribuer à l’avancement de leur carrière avec une liste de publications à leur actif, qui leur permet parfois d’envisager une promotion ou même un poste permanent. La mise à disposition gratuite de leurs articles ne constitue pas de manque à gagner financier pour eux. Elle leur assure au contraire une audience mondiale. Maintenant que tout le monde (ou presque) a l’internet, y compris via son smartphone et sa tablette, il n’y a plus de raison pour que les éditeurs de revues académiques touchent de gros profits sur des articles dont ils ne paient pas les auteurs, d’autant plus qu’ils ne paient pas non plus les directeurs de publication et les membres du comité de lecture (à de très rares exceptions près).
1.4. L’accès ouvert concerne-t-il uniquement les revues scientifiques?
Le mouvement en faveur de l’accès ouvert n’est pas limité aux revues scientifiques (y compris académiques et littéraires), même si ce domaine est prioritaire pour le moment. Ce mouvement concerne aussi les livres (scientifiques ou non), la musique et les films, à la différence près que les auteurs gagnent des royalties sur ces œuvres. Les auteurs de livres scientifiques sont de plus en plus nombreux à choisir un accès ouvert pour leurs livres, suite à un accord avec leur éditeur. Si l’auteur ne gagne pas plus de royalties, il gagne le plus important, à savoir être lu. Il peut par exemple proposer une version imprimée payante et une version numérique gratuite. Tout dépend des priorités que se donne l’auteur (royalties ou diffusion) et des possibilités que lui offre son éditeur. Chose très importante, on conseille souvent aux auteurs de conserver leurs droits sur leurs articles ou leurs livres (ou au moins une partie de ces droits), et de ne pas céder tous leurs droits à un éditeur comme par le passé. On leur conseille aussi d’utiliser une licence Creative Commons, qui permet la réutilisation de leur travail par d’autres chercheurs tout en gardant la paternité de ce travail.
1.5. Qu’est-ce qu’une archive ouverte?
Une archive ouverte est une archive en ligne permettant aux chercheurs de déposer leurs publications pour les mettre à la disposition de tous. Ces archives ouvertes contiennent d’une part des articles non encore évalués par un comité de lecture en vue d’une publication dans une revue (souvent appelés prépublications oupreprints) et d’autre part des articles acceptés, relus et validés pour publication dans une revue (souvent appelés post-publications ou postprints), que cette revue soit en accès ouvert ou payant. De plus en plus de revues payantes donnent leur accord pour le dépôt des articles dans une archive ouverte, avec accès ouvert immédiat ou différé (par exemple au bout de six mois).
1.6. Existe-t-il beaucoup d’archives ouvertes?
De plus en plus d’universités et de centres de recherche ont leur propre archive ouverte, à commencer par des universités de réputation mondiale comme Harvard avec DASH (Digital Access to Scholarship at Harvard) ou le MIT (Massachusetts Institute of Technology) avec DSpace@MIT. En général, les archives ouvertes sont soit institutionnelles soit thématiques, par exemple arXiv pour la physique et les maths. Certaines archives ouvertes ne sont pas limitées aux articles et peuvent inclure aussi des thèses, des mémoires, des livres, du matériel pédagogique et des fichiers audio et vidéo, entre autres. Le nombre d’archives ouvertes est en augmentation constante, avec deux grands répertoires mondiaux, ROAR (Registry of Open Access Repositories) et OpenDOAR (Directory of Open Access Repositories) pour s’y retrouver.
1.7. Qu’est-ce qu’une revue ouverte?
Une revue scientifique ouverte fonctionne comme une revue scientifique payante, avec comité de lecture et relecture des articles. La différence avec cette dernière est que les articles acceptés sont mis à la disposition de tous gratuitement, pour pouvoir être lus sans délai par d’autres chercheurs et par un large public. La gestion d’une revue ouverte n’est pas gratuite, bien entendu, mais les coûts sont payés en amont pour que le lecteur puisse la lire gratuitement, selon le principe d’une émission de radio ou de télévision. Payer une émission à l’unité nous semblerait totalement incongru. Mais nous nous ruinons pour lire des articles publiés dans des revues scientifiques payantes. Ou alors ce sont nos bibliothèques qui se ruinent, alors que leurs budgets sont eux aussi affectés par la crise. Les revues ouvertes apportent une solution à ces problèmes. Le coût de fonctionnement d’une revue ouverte peut être couvert par des subventions, des sponsors, des bannières publicitaires ou des frais de publication demandés aux auteurs. Ces frais de publication sont le plus souvent pris en charge par leur institution et ne concernent qu’une minorité de revues.
1.8. Que vont devenir les revues payantes?
Les revues ouvertes cohabitent paisiblement avec les revues payantes. Mais certains éditeurs de revues payantes voient maintenant diminuer les profits énormes dégagés sur les articles publiés – alors que leurs auteurs ne sont pas payés pour écrire ces articles, rappelons-le. Ces revues payantes avaient une utilité certaine avant l’apparition de l’internet puisque c’était le seul moyen qu’avaient les chercheurs de communiquer les résultats de leur recherche entre deux livres. Le prix de ces revues était également tout à fait abordable jusqu’à une époque récente, avec un abonnement payant permettant aux éditeurs de ces revues de couvrir leurs coûts de fonctionnement. Mais le prix de ces revues a explosé depuis les années 1970 pour atteindre maintenant une somme astronomique dans le cas de revues de réputation mondiale. Certains grands éditeurs comme Elsevier dégagent des profits supérieurs à ceux des plus grandes multinationales. Lire des revues scientifiques ne devrait pas être réservé à une élite. Les revues ouvertes sont accessibles à tous, riches ou pauvres, avec ou sans diplôme, que nous soyons étudiants, dans la vie active ou retraités.
1.9. Y a-t-il un problème de qualité avec les revues ouvertes?
La qualité ou l’absence de qualité concerne toutes les revues académiques (scientifiques et littéraires), qu’elles soient ouvertes ou payantes. L’avantage des revues ouvertes est que tout le monde peut les lire, quel que soit son budget, et que les auteurs sont assurés d’une audience mondiale. De plus, nombre d’études récentes montrent que la qualité des revues ouvertes est au moins égale sinon supérieure à celle des revues payantes, et que les articles en accès ouvert sont davantage téléchargés, utilisés et cités. Il est vrai aussi que ces revues ouvertes sont plus récentes et donc souvent moins connues des chercheurs en quête d’une revue prestigieuse dans laquelle publier leur article, chose utile à leur carrière. Mais certaines revues ouvertes ont rapidement acquis une réputation d’excellence comparable à celles des meilleures revues payantes, par exemple les sept revues scientifiques gratuites de haut niveau lancées par la Public Library of Science (PLOS), dont PLOS ONE, la plus connue.
1.10. Faut-il se méfier des arnaques?
Avec le succès du mouvement pour l’accès ouvert, on assiste à l’apparition de fausses revues «scientifiques» ouvertes, surtout anglophones, destinées à arnaquer le chercheur, avec un comité de lecture bidon, et ne s’intéressant bien sûr qu’aux frais de publication qu’il va devoir débourser pour se voir publié. Mais ce n’est pas la première fois qu’une belle idée est détournée de son but premier à des fins mercantiles assez écœurantes, et ce n’est pas la première fois non plus qu’on voit débarquer des sites véreux sur le web. S’il veut publier ses articles dans une revue ouverte, le chercheur peut explorer le DOAJ (Directory of Open Access Journals), un répertoire de revues scientifiques en accès ouvert dans de nombreuses langues et de nombreux pays.
Gideon Burton, CC BY SA 2.0
2.1. Quelle est la définition de l’accès ouvert la plus connue?
La définition la plus connue est celle de la Budapest Open Access Initiative (BOAI – Initiative de Budapest pour l’accès ouvert) qui, en février 2002, définit l’accès ouvert ainsi: «Il existe de nombreux degrés et de nombreuses formes d’accès plus large et plus facile à la littérature de recherche. Par “accès ouvert” à cette littérature, nous entendons sa libre mise à disposition sur l’internet public, permettant à tout usager de lire, télécharger, copier, diffuser et imprimer ces articles, de lancer une recherche dans ces articles, de créer un lien vers le texte intégral de ces articles, de les compiler pour les indexer, de les convertir en données pour traitement logiciel, et de les utiliser à toute autre fin légale, sans barrières financières, juridiques ou techniques autres que celles de l’accès à l’internet lui-même. La seule contrainte pour reproduire et diffuser cette littérature et le seul rôle du droit d’auteur dans ce domaine devraient être de donner aux auteurs le moyen de contrôler l’intégrité de leur travail et le droit d’être mentionnés et cités de manière adéquate.» (traduction de l’auteure)
2.2. Pourquoi «open access» est-il souvent traduit par «accès libre» en français?
Traduire «open access» par «accès libre» et non par «accès ouvert» me semble une interprétation et non une traduction. Puisque le français dispose du terme «ouvert» pour traduire «open», autant l’utiliser. Lorsque le mouvement en faveur de l’accès ouvert a été lancé il y a douze ans, le but était aussi de lancer un nouveau concept, proche de l’accès libre, il est vrai, mais plus récent et un peu différent. Si l’accès libre touche de nombreux supports, l’accès ouvert toucherait en priorité les publications – d’abord les revues scientifiques, puis les livres scientifiques, puis toute forme de publication, multimédia ou non. Nos amis espagnols ont d’emblée traduit «open access» par «acceso abierto», nos amis italiens par «accesso aperto», nos amis portugais par «acesso aberto», nos amis roumains par «acces deschis», nos amis catalans par «accés obert», etc. Dans le monde francophone, le fait d’avoir traduit «open access» par «accès libre» ne nous permet pas de distinguer «open access» (accès ouvert) de «free access» (accès libre) dans le même texte puisque nous utilisons le même terme, d’où de nombreuses confusions sur un sujet qui n’est déjà pas si facile à comprendre, sans parler des nombreuses difficultés de traduction.
2.3. Quelle est la différence entre «accès ouvert gratis» et «accès ouvert libre»?
Les termes «gratis» et «libre» sont empruntés à la terminologie des mouvements apparentés du logiciel libre ou du logiciel à source ouverte (ou logiciel open source). En résumé, le champ de l’accès ouvert gratis est moins large que celui de l’accès ouvert libre. L’accès ouvert gratis ne supprime que les barrières liées au prix de vente (ou d’abonnement). Il n’a aucun coût mais n’est pas libre de restrictions liées au droit d’auteur et aux licences d’utilisation. Les usagers doivent se limiter au droit de citation (dénommé fair use par nos amis américains et fair dealing par nos amis anglais) ou demander l’autorisation pour une utilisation plus large de l’œuvre. L’accès ouvert gratis ne concerne donc que la gratuité de l’œuvre en tant qu’objet et ne concerne pas la gratuité de l’œuvre en tant qu’ensemble d’idées. Par contre, l’accès ouvert libre supprime à la fois les barrières liées au prix de vente (ou d’abonnement) et les barrières liées à la nécessité d’autorisations, ou tout au moins certaines de ces dernières. Il concerne la gratuité de l’œuvre à la fois en tant qu’objet et en tant qu’ensemble d’idées. Il est donc préférable de choisir l’accès ouvert libre si possible.
2.4. En quoi les revues ouvertes se distinguent-elles des archives ouvertes?
La différence essentielle réside dans l’évaluation ou non des articles, avec une évaluation dans les revues ouvertes – avec validation ou non des articles par un comité de lecture – et l’absence d’évaluation dans les archives ouvertes. Cette différence entraîne aussi d’autres différences pour les coûts de lancement et les coûts de gestion.
2.5. À quoi correspondent les termes «voie dorée» et «voie verte»?
La dénomination «voie dorée» (gold OA) concerne les revues ouvertes – quel que soit leur modèle économique – tandis que la dénomination «voie verte» (green OA) concerne les archives ouvertes. La distinction entre «voie verte» et «voie dorée» permet de distinguer les lieux et moyens de diffusion. Elle ne concerne pas les droits des usagers ou les degrés d’ouverture de l’accès ouvert. Certaines revues payantes adoptent elles aussi la voie verte en permettant aux auteurs de déposer les articles validés par un comité de lecture dans des archives ouvertes.
2.6. Quelle est la différence entre une prépublication et une post-publication?
Le terme «prépublication» («preprint» en anglais) s’applique à toute version d’un article antérieure à son évaluation par un comité de lecture puis à une publication dans une revue. Il s’agit en général de la version soumise à la revue. Le terme «post-publication» («postprint» en anglais) s’applique à toute version approuvée après évaluation par un comité de lecture. Il existe deux types de post-publications: (a) celles qui ont été évaluées par un comité de lecture mais non encore révisées, (b) celles qui ont été à la fois évaluées par un comité de lecture, révisées et validées. Certaines revues payantes autorisent leurs auteurs à déposer les premières mais pas les secondes dans une archive ouverte.
2.7. Pourquoi l’accès ouvert concerne-t-il d’abord les revues scientifiques?
L’accès ouvert concerne d’abord les revues scientifiques parce qu’il permet aux auteurs des articles – qui ne sont pas payés pour écrire ces articles, rappelons-le – de choisir une diffusion en accès ouvert sans perte de revenus. Les universitaires et autres chercheurs écrivent des articles à la fois pour participer à l’avancement du savoir dans leur domaine et pour contribuer à l’avancement de leur carrière. Ils écrivent pour l’impact et non pour l’argent. Comme les universitaires ne gagnent pas d’argent sur les articles de revues, ils sont plus enclins à accepter une diffusion en accès ouvert que les auteurs de livres, les musiciens et les cinéastes, qui gagnent des royalties sur leurs œuvres. Autre facteur important, le choix de l’accès ouvert pour une revue scientifique entraîne également une réduction des coûts pour l’éditeur de cette revue.
2.8. L’accès ouvert se limite-t-il à la littérature scientifique?
L’accès ouvert ne se limite pas à la littérature scientifique. Il peut s’appliquer à tout contenu numérique, par exemple des données brutes ou semi-brutes, des images, des fichiers audio, vidéo ou multimédia ou encore des logiciels. Il peut s’appliquer aussi à des œuvres qui sont d’emblée numériques ou alors à des œuvres plus anciennes qui ont été numérisées, comme la littérature du domaine public ou les œuvres de toutes sortes constituant notre héritage culturel.
2.9. L’accès ouvert est-il envisageable pour les livres payants?
Tout à fait. Les livres payants – par exemple les monographies de recherche, les manuels et même les romans – peuvent être en accès ouvert à partir du moment où les auteurs donnent leur accord. Dans un premier temps, ces auteurs étaient assez réticents à l’idée de mettre leurs livres en accès ouvert parce qu’ils craignaient une perte de revenus. Mais ces auteurs sont maintenant nombreux à voir les bénéfices de l’accès ouvert, à commencer par une audience accrue, plus importante à leurs yeux que les royalties qu’ils vont toucher. Ils pensent aussi que l’accès ouvert à leurs monographies va entraîner une augmentation des ventes des versions imprimées, un facteur qui s’est souvent avéré vrai. Ces dernières années, les auteurs de monographies de recherche sont de plus en plus nombreux à mettre leurs livres en accès ouvert.
Julia Forsuthe, CC BY 2.0
3.1. Les revues ouvertes sont-elles gratuites à produire?
Les revues scientifiques ouvertes ne sont certainement pas gratuites à produire, mais elles sont nettement plus économiques à produire que les revues scientifiques payantes, même si ces dernières sont uniquement diffusées en ligne et n’ont pas (ou n’ont plus) de version imprimée. Le modèle économique propre aux revues ouvertes est de trouver de meilleures formules pour couvrir les frais que de demander aux lecteurs de payer l’accès aux articles et de créer ainsi des barrières d’accès au savoir scientifique.
3.2. En quoi les revues ouvertes sont-elles plus économiques à produire que les revues payantes?
L’accès ouvert élimine le fait de devoir gérer des abonnements (à savoir le fait de solliciter des abonnés potentiels, recenser les abonnés existants et encaisser le prix des abonnements). L’accès ouvert élimine la nécessité de gérer des droits numériques (le fait d’authentifier les usagers, de distinguer les usagers autorisés des usagers non autorisés, et de bloquer l’accès des usagers non autorisés). L’accès ouvert réduit ou élimine les frais juridiques (le fait de rédiger des licences restrictives et de les faire appliquer). L’accès ouvert élimine le marketing traditionnel et dépend uniquement de supports gratuits: moteurs de recherche, blogueurs, forums de discussion, étiquetage social et réseaux sociaux.
3.3. Qu’en est-il de l’évaluation des articles dans les revues ouvertes?
L’évaluation des articles par un comité de lecture est un processus essentiel pour les revues ouvertes comme pour les revues payantes. L’évaluation dans des revues ouvertes utilise les mêmes procédures, les mêmes normes et jusqu’aux mêmes personnes (directeurs de publication et membres des comités de lecture) que les revues payantes. Si ces personnes font en général don de leur travail, cette évaluation a toutefois un coût pour distribuer les fichiers aux membres du comité de lecture, contrôler qui fait quoi, suivre la progression du travail, relancer les retardataires, recueillir les commentaires sur les articles proposés et les transmettre aux bonnes personnes, faciliter la communication des uns avec les autres, rassembler les informations utiles, et ainsi de suite. Des logiciels – notamment des logiciels libres ou à source ouverte (open source) – permettent d’automatiser ces tâches.
3.4. Quel est le modèle économique utilisé par les revues ouvertes?
Il n’existe pas un modèle économique mais plusieurs modèles économiques pour les revues ouvertes. Ces revues ouvertes financent les coûts nécessaires à leur fonctionnement de la même manière que les chaînes de télévision ou les stations de radio qui – depuis longtemps – financent les coûts de production en amont pour nous permettre d’accéder gratuitement au contenu qu’elles proposent. Il existe plusieurs cas de figure. Certaines revues reçoivent une subvention accordée par une université ou par une association professionnelle. D’autres revues facturent des frais de publication pour les articles acceptés, ces frais étant payés par l’auteur ou par le sponsor de l’auteur (employeur ou agence de financement). Quel que soit le modèle économique choisi, les frais réels d’une revue ouverte (évaluation des articles, traitement des manuscrits, diffusion en accès ouvert) sont très inférieurs aux frais d’abonnement (souvent hors de prix) d’une revue payante. Il existe de nombreuses façons de payer les coûts en amont afin que les lecteurs puissent accéder gratuitement au contenu des revues scientifiques. Ces modèles économiques sont très différents selon les domaines et selon les pays et ils sont en évolution constante.
3.5. Qu’en est-il des frais de publication payés par l’auteur?
La majorité (70%) des revues ouvertes ne facture pas de frais de publication aux auteurs, y compris celles qui reçoivent des subventions institutionnelles. Les revues ouvertes facturant des frais de publication suppriment le plus souvent ces frais si l’auteur a des difficultés économiques. Certaines revues ouvertes ont des frais de publication peu élevés parce qu’elles disposent de revenus provenant d’autres publications (par exemple des livres) ou provenant de la publicité ou de services annexes. Certains organismes et certains consortiums proposent des remises sur les frais de publication. Certains éditeurs de revues ouvertes (par exemple BioMed Central et la Public Library of Science) suppriment les frais de publication pour tous les chercheurs affiliés à des institutions qui ont souscrit un abonnement annuel à leurs services.
3.6. Les frais de publication sont-ils plus fréquents dans une revue ouverte?
La majorité des revues ouvertes (70%) ne facture pas de frais de publication à la charge des auteurs. Par contre, contrairement à ce qu’on peut penser, la majorité des revues payantes (75%) facture des frais de publication à leurs auteurs. Lorsque les revues ouvertes facturent des frais de publication, ces frais sont le plus souvent (à 88%) pris en charge par les sponsors des auteurs (employeurs ou agences de financement) ou alors supprimés, et ne sont donc pas payés de la poche des auteurs. De plus en plus d’universités ont un budget spécifique destiné à payer les frais de publication de leurs professeurs et chercheurs lorsque ceux-ci choisissent de publier leurs articles dans des revues ouvertes à participation payante.
Kate_Harbison, C BY SA 2.0
4.1. En quoi consiste l’archive ouverte d’une université?
L’archive ouverte d’une université permet non seulement d’assurer la diffusion des articles qui y sont déposés mais aussi leur conservation à long terme. Une archive ouverte ne propose pas d’évaluation par un comité de lecture, mais les articles déposés dans ces archives ont été le plus souvent évalués par ailleurs ou alors ils sont en cours d’évaluation pour publication dans une revue scientifique. Une archive ouverte peut contenir des prépublications (versions soumises à une revue), des post-publications (versions approuvées par une revue) ou les deux. Elle peut comprendre aussi des thèses et mémoires, du matériel d’enseignement pour les cours, des bases de données, des fichiers audio et vidéo, des fichiers numérisés de fonds spécialisés, etc. Le coût de gestion d’une archive ouverte est très variable puisqu’il dépend du nombre de services procurés aux chercheurs.
4.2. Quel est le rôle des universités?
Les universités peuvent conseiller sinon demander (ou même exiger) que les articles publiés par leur corps enseignant soient en accès ouvert. Les universités sont d’ailleurs de plus en plus nombreuses à instituer une réglementation dans ce sens. Déposer de nouveaux articles ne prend que quelques minutes et l’archivage est fait par les chercheurs eux-mêmes. De plus, l’accès ouvert est très bénéfique à l’image de marque des universités. Les archives ouvertes favorisent la visibilité des articles de leurs auteurs, la visibilité des auteurs eux-mêmes et la visibilité de leur institution.
4.3. Quel est le rôle des agences de financement?
Les agences de financement jouent elles aussi un rôle essentiel dans ce domaine, et demandent souvent aux auteurs subventionnés de mettre leurs articles en accès ouvert. Le retour sur investissement s’en trouve accru puisque l’accès ouvert rend les résultats de la recherche subventionnée plus accessibles, plus faciles à trouver, plus faciles à télécharger, et donc plus utiles. Pour les agences de financement utilisant des fonds publics, l’accès ouvert permet de mettre cette recherche à la disposition des contribuables (dont les impôts alimentent les fonds publics).
4.4. Qu’est-ce exactement que le protocole de l’OAI?
Le protocole de l’OAI (Open Archives Initiative) est un protocole d’interopérabilité entre les archives. Les archives ouvertes sont donc plus utiles si elles se conforment à ce protocole. En pratique, ceci signifie que les usagers peuvent trouver un article dans une archive conforme au protocole de l’OAI sans se soucier de savoir au cas par cas quelles archives existent, où elles se trouvent et ce qu’elles contiennent. Les usagers se soucient seulement de trouver l’article ou les articles dont ils ont besoin. Toute université dans tout pays devrait avoir sa propre archive ouverte conforme au protocole de l’OAI.
5.1. En quoi l’accès ouvert décuple-t-il la portée d’un article scientifique?
Outre une audience mondiale bien supérieure à celle de la meilleure revue payante, un article en accès ouvert accroît la possibilité pour les lecteurs de trouver cet article (souvent au moyen d’un logiciel libre ou à source ouverte), de le lire et de le télécharger. Comme il n’existe plus de barrières d’accès liées au prix de vente (ou d’abonnement), l’article est donc accessible à tous les lecteurs, quel que soit leur niveau de vie. L’accès ouvert facilite aussi des activités de tous ordres sur un article donné: recherche plein texte, indexation, extraction des données, résumé d’un texte, traduction, création de liens vers un texte, recommandation d’un texte, signalement d’un texte, inclusion d’un texte dans un mash-up (à savoir un contenu rassemblé à partir de nombreuses sources différentes), etc.
5.2. Qu’en est-il du droit d’auteur pour les articles en accès ouvert?
La base légale de l’accès ouvert est le consentement du détenteur des droits d’auteur, qui est le plus souvent l’auteur mais qui peut être aussi son éditeur si l’auteur lui a cédé ses droits. Comme l’accès ouvert se base sur le consentement de l’auteur (ou de l’éditeur), il ne requiert pas la réforme, l’abolition ou la violation de la législation existante sur le droit d’auteur. En outre, il existe une solution simple, efficace et de plus en plus populaire pour indiquer qu’un article est en accès ouvert, à savoir l’utilisation d’une licence Creative Commons (il en existe plusieurs pour répondre à divers cas). En utilisant une licence Creative Commons, l’auteur (ou l’éditeur) consent ainsi à l’avance à l’utilisation sans restriction du texte intégral de son article (ou de son livre) pour lecture, téléchargement, copie, partage, stockage, impression, recherche dans le texte, création de liens vers l’article et compilation du texte intégral de l’article. Selon la licence Creative Commons choisie, l’auteur peut également autoriser ou bloquer la réutilisation commerciale de son article, ou alors autoriser ou bloquer la modification de son article par d’autres auteurs.
5.3. Les auteurs ont-ils besoin d’une autorisation pour déposer leurs articles dans une archive ouverte?
Les auteurs n’ont pas besoin d’une autorisation pour déposer leurs prépublications dans une archive ouverte. Lorsqu’ils finissent de rédiger une prépublication, ils sont toujours détenteurs des droits d’auteur sur ce texte. Si une revue refuse de considérer les articles ayant circulé en tant que prépublication, il s’agit d’une politique de soumission des articles propre à cette revue (souvent appelée règle Ingelfinger) et non d’une obligation spécifiée dans la législation sur le droit d’auteur. Dans tous les cas, même s’il cède certains de ses droits à un éditeur, l’auteur doit conserver le droit de déposer ses articles dans une archive ouverte, pour pouvoir les déposer de son propre chef sans devoir négocier avec son éditeur.
5.4. Qu’en est-il lorsque l’auteur transfère ses droits d’auteur à un éditeur?
Si l’auteur transfère ses droits à un éditeur, le fait de déposer un article dans une archive ouverte requiert l’autorisation de cet éditeur. La majorité des éditeurs (plus de 60%) autorise déjà d’emblée l’archivage des post-publications. Nombre d’éditeurs ne l’autorisant pas d’emblée donnent cette autorisation lorsque celle-ci est demandée. Presque tous les éditeurs donnent leur accord si le dépôt des articles dans une archive ouverte est exigé par l’agence de financement subventionnant l’auteur ou bien par l’employeur de l’auteur. Mais, même si les éditeurs donnent cette autorisation dans leur majorité, ils sont encore nombreux à ne pas la donner. En outre, nombre d’entre eux posent plusieurs conditions à cette autorisation et certains ajoutent même de nouvelles restrictions telles que des frais de publication ou des périodes d’embargo.
5.5. Est-il préférable que l’auteur conserve l’essentiel de ses droits?
Il est en effet préférable que l’auteur conserve au moins le droit de mettre ses articles dans une archive ouverte s’il ne peut pas conserver l’ensemble de ses droits par le biais d’une licence Creative Commons (ou d’une autre licence similaire). Pour conserver le droit de mettre ses articles dans une archive ouverte, l’auteur peut utiliser un addendum permettant de modifier l’accord standard du transfert de ses droits vers l’éditeur (des modèles d’addendum sont proposés dans l’Open Access Directory – OAD). Mais il est préférable que l’auteur autorise l’accès ouvert à son article lorsqu’il est encore détenteur de ses droits. Ainsi il n’aura pas besoin de demander l’autorisation de son éditeur par la suite et il n’aura pas besoin non plus de se demander s’il ne viole pas la législation sur le droit d’auteur en mettant ses articles en accès ouvert. Certaines agences de financement (par exemple le Wellcome Trust et le National Institutes of Health – NIH) exigent des auteurs qu’ils conservent l’essentiel de leurs droits lorsqu’ils publient leurs articles dans des revues. Dans certaines universités (par exemple Harvard et le MIT), le corps enseignant accorde d’emblée à l’université le droit non exclusif de diffuser leurs publications en accès ouvert.
5.6. L’implication des auteurs est-elle essentielle pour promouvoir l’accès ouvert?
L’implication des auteurs est en effet essentielle pour promouvoir l’accès ouvert. Comme la majorité des éditeurs et des revues autorise d’emblée le dépôt des articles dans des archives ouvertes, il appartient aux auteurs de saisir cette opportunité. Cela signifie que les auteurs peuvent publier leurs articles dans pratiquement n’importe quelle revue acceptant leur travail (revue ouverte ou non) tout en mettant aussi leurs articles à la disposition de tous dans une archive ouverte. Ces articles seront ainsi plus faciles d’accès pour les lecteurs, avec une audience accrue, et ils auront aussi un meilleur impact pour les chercheurs, à la fois pour l’avancement de leur recherche et pour leur carrière.
Copyright © 2016 Marie Lebert
Licence CC BY-NC-SA version 4.0
Par Marie Lebert
Contact : marie.lebert@gmail.com
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