Outre la consigne gouvernementale de rester chez soi, les gestes barrières restent d’actualité. Avec cette perspective que se laver les mains régulièrement compte parmi les mesures les plus simples à adopter. Et face à la pénurie de gel hydroalcoolique, le romancier Thierry Crouzet propose de se changer en petit chimiste — aucune connaissance spécifique n’étant nécessaire.
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C’est à un professeur suisse, Didier Pittet, que l’on doit l’invention du gel hydroalcoolique, en 1995. Cette solution permettait avant tout aux médecins de se nettoyer les mains avant d’entrer en contact avec un patient.
Très vite, la formule est rendue accessible à tous, afin de démocratiser au plus vite ce gel qui permet de réduire sensiblement les infections nosocomiales. Reprise par l’Organisation mondiale de la Santé en 2005, et aujourd’hui à l’œuvre dans plus de 170 des 194 états membres des Nations Unies, cette solution a permis de faire baisser fortement la mortalité dans les structures hospitalières.
En mai 2014, Thierry Crouzet avait publié un ouvrage, Le geste qui sauve, aux éditions L’Âge d’homme, traduit en sept langues et gratuitement mis à disposition sur internet, dans sa version numérique. Et il le reste. En creative commons qui plus est.
Mais la thématique demeurait : en publiant Resistants deux ans plus tard, il s’intéressait à une conséquence de l’apparition des antibiotiques : la résistance des bactéries. « Je voulais trouver une solution pour parler au plus grand nombre, d’un sujet grave. » Et pas des moindres : selon les scientifiques, la résistance des bactéries aux médicaments serait aussi sérieuse que le réchauffement climatique.
Depuis l’apparition du virus COVID-19, l’écrivain tente de lutter contre les aberrations que l’on voit fleurir sur la toile. « Depuis que je vois des recettes folkloriques circuler, je me dis qu’il faut rectifier, prévenir, dénoncer les impostures, surtout quand des médias officiels comme France 3 publient des trucs qui frisent le ridicule, sortis d’un chapeau de magicien. Comme si trois gouttes d’huile essentielle pouvaient tuer les bactéries et les virus. Si c’était le cas, nous n’aurions tout simplement plus besoin de gel », explique-t-il.
Alors voilà qu’il a décidé de présenter, en toute simplicité, une véritable recette qui ne nécessite pas plus qu’une balance électronique et quelques emplettes en pharmacie.
À l’origine, ce sont donc les Hôpitaux Universitaires de Genève, et le docteur Didier Pittet qui ont inventé le gel. La formule présentée par l’OMS avait d’ailleurs été concoctée par les HUG, nous précise-t-il. « J’ai simplement converti la préparation OMS et donné les proportions à partir d’éthanol 90 %, celui qu’on trouve en pharmacie. »
Voici donc la préparation, en poids, plutôt qu’en volume.
2/ Récupérer un ancien flacon de solution ou de gel de 100 ml et le laver au savon, puis le sécher.
3/ S’installer dans un local aéré, à température ambiante.
4/ Déposer le flacon sur une balance, la remettre à zéro.
5/ Verser dans le flacon 73 grammes d’éthanol, puis 2 grammes de glycérine, puis 4 grammes d’eau oxygénée et enfin 6 grammes d’eau distillée ou d’eau au préalable bouillie durant 20 minutes (pour les petites quantités, on peut utiliser une paille comme pipette). Se tromper d’un gramme ou deux ne nuira pas à l’efficacité.
6/ Fermer le flacon et le secouer.
7/ Attendre trois jours pour que l’eau oxygénée ait tué les éventuelles spores.
« On ne crée pas ainsi un gel, mais une solution hydroalcoolique très liquide avec une teneur de 80 % d’éthanol. Si en pharmacie on ne trouve que de l’éthanol à 70 %, il faut en ajouter 84 grammes et se dispenser d’ajouter de l’eau puisque l’alcool est déjà fortement dilué. On obtient alors une solution avec 68 % d’éthanol, qui reste efficace dans la plupart des situations, notamment contre les virus enveloppés comme les coronavirus.
Si d’aventure l’eau oxygénée vient à manquer, on peut éventuellement l’oublier, l’alcool de pharmacie tout comme l’eau des robinets étant dépourvue de spores (en cas de doute, dans la brousse par exemple, il faut absolument utiliser l’eau oxygénée). »
#lavetesmainsetprendstonbouquin#coronavirus#confinementtotal#gniarfffff
— TitiLibraire (@TitiLibraire) March 18, 2020
Artiste : Danial Kheirikhah https://t.co/Tq55OpoPFYpic.twitter.com/749XaJAjmo
Thierry Crouzet apporte également plusieurs précisions à consulter avant de se lancer dans l’aventure. Avec quelques indications anti-infox : il est faux de dire que se laver les mains au savon peut remplacer le gel hydroalcoolique. « Trente secondes de friction hydroalcoolique équivalent à deux minutes de lavage des mains au savon. Dans le premier cas, on tue les germes, dans le second, on les décroche. »
3 Commentaires
Jujube
22/03/2020 à 04:31
Le jeu de mains de Danial Kheirikhah est à mourir de rire! On en guérirait!
Merci, Monsieur Gary, pour la recette et la minute de pure joie.
Kock
22/03/2020 à 10:25
« C’est à un professeur suisse, Didier Pittet, que l’on doit l’invention du gel hydroalcoolique, en 1995. Cette solution permettait avant tout aux médecins de se nettoyer les mains avant d’entrer en contact avec un patient. »
Premièrement, votre formulation laisse penser qu'avant 1995, les médecins n'avaient rien pour se nettoyer les mains avant d'entrer en contact avec un patient, ce qui fait frémir rétrospectivement. Vous semblez n'avoir jamais entendu parler de Lister ou Semmelweis... (voire de Pasteur).
Deuxièmement, si j'en crois Wikipedia, Didier Pittet ne semble qu'avoir rendu populaire la formulation de la solution hydro-alcoolique... formulation alors vieille de vingt ans et due à William Griffith.
Toto
23/03/2020 à 08:56
Attention, le gel ne NETTOIE pas les mains : il les désinfecte. Vos mains pourront être sales et désinfectés.