Depuis la sonate de Vinteuil qui associe un violon chez Proust jusqu’à l’histoire de Novecento, d’Alessandro Baricco, génie du jazz vivant sur un paquebot transatlantique, le piano fait bon ménage avec la littérature. Aussi, ce 28 mars, consacré depuis trois ans comme le PianoDay à l’initiative du musicien (et pianiste fou) Nils Frahm, donne l’occasion de revenir sur l’un des pianos les plus excentriques : celui de Boris Vian.
En 2015, Nils Frahm propose de consacrer le 88e jour de chaque année au piano, considérant que, tout compte fait, cela ne fait pas de mal de célébrer l’instrument et tout ce qui gravite autour. Et ces 88 journées sont une référence directe aux 88 touches qui composent le clavier. Autrement dit, le 29 mars… sauf les années bissextiles.
Invention magique du roman L’Écume des jours, paru en 1947, le pianococktail offre, lorsque l’on joue, de composer un cocktail à partir des différents alcools et liqueurs qui y sont installées. On se souviendra de L’émission La boîte à musique, présentée par Jean-François Zygel, où l’artiste Voel Martin s’était livré à une petite démonstration, sur un modèle créé avec Aurélie Richer.
Si Boris Vian a marqué les esprits, n’oublions pas que Joris-Karl Huysmans, dans À Rebours (1884) proposait aussi une étrange machine : l’orgue à bouche.
Il s’en fut dans la salle à manger où, pratiquée dans l’une des cloisons, une armoire contenait une série de petites tonnes, rangées côte à côte, sur de minuscules chantiers de bois de santal, percées de robinets d’argent au bas du ventre. Il appelait cette réunion de barils à liqueurs, son orgue à bouche.
Mais il semble bien que ce soit l’héritage de Vian qui ait le plus marqué les esprits. D’ailleurs, le pianococktail de Voel Martin cherche actuellement un lieu d’accueil.
Pour les plus acharnés, l’hôtel Boris V., situé à Levallois-Perret propose, outre ses 49 chambres, de se plonger dans l’univers de l’écrivain… avec un authentique pianococktail à découvrir.
En remontant le temps plus loin encore, on découvrira l’invention de Jean-Pierre Huitéma, qui dans un bar de Saint-Sulpice Laurière (non loin de Limoges), avait présenté le Bottle-box – ou piano bouteille. C’est en mars 2004, mais il avait mûri cette entreprise en 1975, achevant la lecture du roman de Vian.
Le principe est toujours le même : chaque touche entraîne un goutte-à-goutte, et l’on compose alors sa boisson de la sorte. France 3 Limoges en avait proposé tout un reportage.
Une autre version du Bottle Box est dotée d'un système informatique qui identifie les touches du piano actionnées par le musicien et active l'ouverture de la bouteille associée à la note correspondante. Chaque bouteille, équipée d'une électrovanne, est connectée à un tube commun.
Chaque note jouée déclenche la libération d'une quantité prédéfinie d'un alcool ou d'un autre liquide spécifique. La programmation permet de préparer des cocktails de 5, 10 et 15 cl (avec la possibilité d'autres dosages) et de pré-enregistrer jusqu'à 15 cocktails. Le même cocktail sera servi quel que soit le morceau joué, mais il changera si un morceau différent est sélectionné. Le Bottle Box dispose de 88 notes reliées à 19 bouteilles, mais il est possible de connecter moins de notes et d'utiliser un nombre différent de bouteilles.
Et l’on retrouvera la séquence du film de 2013, L’Ecume des jours de Michel Gondry, avec Romain Duris et Audrey Tautou, adapté du roman :
Ou encore cette interprétation de Daniel Gueysset, lors d’une soirée à L’Apart, un bar de Limoges :
Illustration : affiche de La Rumeur.
Par Clément Solym
Contact : cs@actualitte.com
Paru le 09/03/2017
96 pages
Editions Gallimard
5,70 €
Paru le 21/07/2000
315 pages
LGF/Le Livre de Poche
8,90 €
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