Quand Jeff Bezos a monté Amazon, le projet était de disposer du produit dont il existait le plus grand nombre de références pour le vendre sur la Toile. C’est tombé sur le livre. Depuis, la firme américaine fait régulièrement l’objet d’attaques, d’enquêtes, de dénonciation... Jeff l’entrepreneur aurait-il besoin d’un avis éclairé ?
Le 16/08/2017 à 17:19 par Nicolas Gary
Publié le :
16/08/2017 à 17:19
Même si sa place d’homme le plus riche au monde fut vite perdue, il n’en reste pas moins le 3e de la liste, avec plus de 90 milliards $ de fortune. Dernièrement, Jeff Bezos a même proposé à ses followers de lui suggérer des idées de dons pour des organisations, afin de rendre le monde meilleur.
Request for ideas… pic.twitter.com/j6D68mhseL
— Jeff Bezos (@JeffBezos) 15 juin 2017
Je réalise vouloir que mon activité philanthropique profite aux gens ici et maintenant – à court terme – au croisement des besoins urgents et d’un impact durable
Un conseil ? B.J. Hegedus travaille pour les Vroman’s Bookstore et Book Soup, et il vient de prendre le patron d’Amazon au pied de la lettre. Son conseil est assez mordant. « En tant que libraire, j’aimerais vous suggérer une chose : arrêtez de vendre des livres sur Amazon à des prix si cassés. »
Et de poursuivre : « Monsieur Bezos, votre stratégie a été brillante. Vous avez vendu des livres à des prix imbattables, et également amorcé une livraison gratuite. Le public a été conquis. Vous avez élargi votre offre, et proposé d’autres articles. Avec l’avantage de faire des achats 24 h/24 et 7 j/7, à partir de son ordinateur, vous avez métamorphosé la vente au détail. Et cela vous a rapporté une immense fortune. »
La suite est plus saignante : « Des années plus tard, vous continuez de commercialiser des livres avec une forte remise, souvent à la moitié du prix public. Pour nous libraires de brique et de mortier, le modèle économique que vous avez conçu fut dévastateur. Les librairies indépendantes dans tout le pays ont fermé leurs portes. Là où, auparavant, les librairies de quartier abondaient, de nombreuses communautés en sont aujourd’hui privées. »
Et le libraire d’expliquer, consciencieusement, qu’en lieu et place d’un nouvel engagement philanthropique, remonter le prix de vente des livres serait déjà un beau geste. Parce qu’en dépit des efforts de la librairie, et de la remontée depuis 2009, le secteur va toujours mal, « en partie à cause de vous ».
Incapables de concurrencer les tarifs proposés par Amazon, les librairies fermeraient plus rapidement encore, si elles tentaient simplement de s’en approcher. Et pourtant, elles continuent de vendre des livres, parce qu’elles sont dédiées et vouées à la parole écrite.
Les livres n’ont rien de commun avec une paire de bottes ou une batterie de voiture : « Ils racontent des histoires, constituent la base de notre culture. Ils nous ont permis de voyager dans des mondes que nous n’aurions jamais connus autrement. [... Ils] nous permettent d’échapper à nos problèmes ou de nous aider à les résoudre. »
C’est pourquoi, poursuit B.J. Hegedus, il faudrait que Jeff Bezos, plutôt que de demander des conseils d’investissements caritatifs, devrait « réfléchir à tout cela, à présent que vous avez atteint une position où vous désirez aider les gens. [...] Tout ce que je vous demande, c’est de faire du profit sur la vente de livres. Vous pourriez alors voir diminuer la quantité que vous écoulez, mais les gens continueraient d’utiliser votre site par facilité. Vous devez certainement savoir que c’est vrai ».
Mais surtout, ce changement d’attitude – le fameux dumping, par lequel Amazon perdrait de l’argent en vendant des livres, tout en s’en servant comme produit d’appel – serait révolutionnaire. « Vous offririez aux libraires de quartier indépendants une plus grande chance de survivre et de promouvoir la culture de la lecture, ici et maintenant. Ce serait un héritage durable. »
On attend la réponse de Jeff...
via LA Times
Commenter cet article