Dessinateur, graveur et peintre allemand de la Renaissance, Albrecht Dürer est aussi théoricien de la géométrie et de la perspective linéaire. Malgré son héritage nordique, il intègre dans son oeuvre de nombreux traits de l'art italien, liés à ses nombreux voyages à Venise et en Italie du Nord. L'autoportrait, genre qui le fascine, lui permettra de laisser une trace glorieuse de sa vie. Et ce, en utilisant parfois un objet oublié du quotidien : les oreillers.
Le 02/03/2022 à 11:36 par Clémence Leboucher
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02/03/2022 à 11:36
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Le Portrait de l'artiste tenant un chardon est considéré comme l'un des premiers autoportraits indépendants de la peinture occidentale, et peint en 1493 par Albrecht Dürer. C'est aussi l'un des composants d'une longue série de peintures du même genre, dont le dessinateur allemand est un réel adepte. Assurés, fiers, les autoportraits de Dürer lui mettent en avant sa noblesse, obtenue en 1512, après être devenu le peintre de la cour de l'empereur Maximilien Ier de Habsbourg.
L'Autoportrait à l'oreiller, dessiné vers 1491-1492 et exposé au Metropolitan Museum of Art à New York, montre également à quel point ses autoportraits sont teintés d'émotion et de poésie. Dans ce dessin à double face, on trouve d'un côté un dessin de l'artiste semblant tenir un stylo, un oreiller se tenant sous les épaules d'Albrecht Dürer.
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L’oreiller « se dresse vers le spectateur, sans support, selon un angle difficile à expliquer », selon le conservateur du Metropolitan Museum Stijn Alsteens. Au verso, des représentations de 6 oreillers, couchés ou debout, montrent la volonté de l'artiste de placer son dessin entre rêve et réalité : ils sont brouillés, effacés, comme suite à une nuit et un sommeil agités.
Six croquis d'oreiller (verso de Autoportrait avec croquis de la main et de l'oreiller), domaine public
Si dessiner des oreillers comme cela paraît original, Albrecht Dürer manie en fait parfaitement l'étrange et l'imaginaire : les formes des oreillers et leurs plis, rappelant des visages déformés, prennent le mot allemand pour oreiller, Kopfkissen (oreiller de tête), au pied de la lettre. « Une fois mis en marche, ce jeu de "voir comme" peut être joué indéfiniment, transformant les coins en nez, mentons ou cornes de satyre, et les plis en bouches et sourcils » dira Joseph Leo Koerner, historien de l'art et cinéaste américain.
Exeunt donc les oreillers à plumes, Albrecht Dürer préfère plutôt l'oreiller à mémoire de forme, qui préserve autant le haut du corps physique, que nos rêves et les créatures qui les peuplent.
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Ce n'est pas la première fois qu'un artiste utilise les draps du lit pour défendre l'imaginaire : les études de draperie, qui permettent à chaque artiste d'étudier la luminosité des peintures, ont fréquemment été utilisées. On peut ainsi retrouver L'étude de draperie de Jean-Auguste-Dominique Ingres, mais également L'Étude de draperie pour Scène de déluge (1806), par Anne-Louis Girodet de Roucy-Trioson.
Étude de draperie pour Scène de déluge, Anne-Louis Girodet de Roucy-Trioson, Le Pèlerin
Crédits illustration : Domaine public, Autoportrait avec croquis de la main et de l'oreiller, Albrecht Dürer
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