« Mignonne, allons voir si la rose » écrivait naïvement le fringant Ronsard, tranquillement installé dans son XVIe siècle. N’en déplaise au poète, cueillir les fruits de l’amour et de la jeunesse s’avère particulièrement difficile en ces temps de pandémie. Se jeter sur la bouche d’inconnu(e)s pour boire la passion à sa source n'est pas sans risque. Pour passer une Saint-Valentin correcte malgré tout, voici quatre ouvrages pour ressentir la brûlure de l’amour. Carpe diem et bonne lecture.
Le 13/02/2021 à 08:36 par Gariépy Raphaël
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13/02/2021 à 08:36
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La fête la plus rose et la plus sucrée de l’année arrive à grands pas et vous n’avez rien de prévu ? Ne vous précipitez pas dans la première boutique venue pour acheter du mauvais chocolat ou une babiole en forme de cœur. Enfermez-vous chez vous, coupez internet et plongez au cœur du sentiment le plus complexe et destructeur que renferme l’âme humaine. Qu’il soit déclamé en vers ou par SMS, l’amour est rarement simple, souvent source de problèmes. Mais il offre toujours une bonne matière aux auteurs. On vous propose un bref voyage sur les berges du sentiment amoureux en quatre œuvres très dissemblables.
« Paris est tout petit pour ceux qui comme nous s’aiment d’un aussi grand amour ». Tout au long de ses 800 pages, le livre d’Aragon se met en devoir de contredire Jacques Prévert. Aurélien et Bérénice passent leur temps à se manquer de peu au sein des murs de la capitale. De rendez-vous manqués en quiproquo ils finiront inéluctablement par s’éloigner, au grand désespoir du lecteur qui pensait se plonger dans une grande histoire d’amour.
Écrit en 1944, l’ouvrage nous plonge dans l’entre-deux-guerres, aux côtés d’un jeune bourgeois désœuvré. L’amour est traité au sein des pages comme un sentiment fuyant et ambigu. Laide dès le premier chapitre du roman, Bérénice occupera bientôt toutes les pensées de notre héros. Tous deux en quête d’absolu, les amants de l’œuvre ne vivront finalement que peu de moments ensemble.
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Ses brefs éclats de vie, volés à une existence autrement médiocre, les changeront à jamais. Lire Aurélien un soir de Saint-Valentin est particulièrement conseillé si l’on a du vague à l’âme. Au sein des pages du roman, l’amour n’existe pas réellement. Tout à la fois souvenir et anticipation, il échappe sans cesse aux protagonistes qui finiront par s’abîmer dans l’ennui et la séparation.
Qui n’a jamais vu le regard d’un proche se détourner lorsqu’il rencontre la couverture rouge et noir de Twilight ? Succès planétaire pour ce triangle amoureux entre vampire, loup-garou et humaine qui ne manque pas de bons sentiments, de fanfreluches et de sang.
Si vous cherchez à être bousculé, passez votre chemin, la morale restera sauve, pas forcément pour notre déplaisir. Les torses sont beaux, « marmoréens », un terme qui a gagné un véritable renouveau grâce à la traduction française, et nous en redemandons parfois. Amour dangereux, passion dévorante et violente, ici la sexualité est comme dans un slasher, on l’attend comme on la redoute, jusqu’à un dénouement tout à fait catholique.
Un ouvrage doudou pour tous ceux qui l’ont lu et veulent se consoler de passer la soirée en solitaire pour la Saint-Valentin. Pour les autres, n’oubliez pas, mieux vaut être seul que mal accompagné, et si vous apercevez un centenaire à la coiffure impeccable qui vous promet l’immortalité, fuyez.
Le regard moralisateur de votre entourage vous empêche de goûter avec délice aux Chroniques de Bridgerton ? Si vous êtes adepte de la galanterie et des mœurs archaïques, rien ne vous empêche de parcourir la carte du Tendre et de vous plonger dans La Princesse de Clèves.
La carte du Tendre
Roman précieux s’il en est, cet ouvrage signé par Madame de La Fayette a le mérite de proposer l'érotisme du regard. Le voyeur, le Duc de Nemours ne pourra détourner les yeux de la gorge de la princesse ni des caresses qu’elle offre à sa cane… Un érotisme désuet qui n’empêche pas une justesse dans la peinture des amours transies et de la morale régissant la sexualité.
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La lecture de ce classique permet également de se rassurer sur son sort. Savoir qu’une princesse dotée de toutes les qualités et promise à avenir radieux parvient elle aussi à échouer en amour est étrangement réconfortant.
Écrit en 1949 à Paris, Journal du voleur est une œuvre étrange. Seul ouvrage dont l’auteur assumera pleinement le caractère autobiographique, le texte est pourtant très loin de proposer une esthétique réaliste. Pour Sartre et Beauvoir qui préfaceront le livre, ce texte est un « Journal des exaltations ».
L’auteur ne propose pas un compte rendu exhaustif de son existence d’alors, mais poétise ses rapines et la crasse des villes pour leur donner une aura de légende. À travers les échappées lyriques du roman, Genet nous parle d’un amour qui transfigure la poussière, et la change en or.
Très loin des canons du puritanisme américain de Meyer, l’ouvrage offre au lecteur un érotisme savant, brut et sauvage à la fois. Là aussi, il est question de marbre d’un visage, de la beauté d’un organe, mais sans bons sentiments. La passion est rugueuse et en est d’autant plus belle. Un livre pour tous ceux qui détestent la guimauve, et probablement la Saint-Valentin…
1 Commentaire
Vie Quatresixquatre
14/02/2021 à 06:51
Bien. Il ne me reste plus qu'à commander Twilight. La façon dont vous en parlez me donne (enfin?) envie de le lire.