Blasphème digne des bûchers de l'inquisition romaine ? La méthode de Thomas Jefferson ne fut en tout cas pas des plus orthodoxes lorsqu'il décortiqua les Évangiles à sa façon. Estimant que tout en ce monde, religion y comprise, méritait d'être examiné à la lumière de la raison, il s'est particulièrement penché sur la vie de Jésus relatée par ses disciples. Il aurait trouvé dans les paroles attribuées au personnage tellement de contradictions qu'il se serait refusé de croire que ces discours provenaient d'un seul et même esprit.
Le 25/09/2013 à 16:51 par Julien Helmlinger
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25/09/2013 à 16:51
Smithsonian's Institution
Si on se souvient surtout de Jefferson comme du troisième président des États-Unis et principal auteur de la Déclaration d'indépendance, il était également un philosophe du temps des Lumières doublé d'un bibliophile passionné. Outre le fait qu'il posséda la plus importante bibliothèque privée du pays, il accoucha d'un système de classification d'ouvrages retenu par la Bibliothèque du Congrès. On lui attribue souvent l'invention des bibliothèques publiques, et par extension, de la notion defair use.
La question religieuse n'échappa guère à ses recherches. Le 18 octobre 1813, Thomas Jefferson écrivait à John Adams : « Nous devrions réduire notre volume aux Evangiles, sélectionner en chacun d'entre eux les seules paroles de Jésus. On y trouverait alors le code de morale le plus sublime et bienveillant qui n'ait jamais été offert à un homme. »
Il était alors à pied d'oeuvre depuis 1804, année au cours de laquelle il commenca à trier parmi les Évangiles des apôtres « le diamant du fumier », avec dans l'idée de recomposer sa propre version de la Bible. Dans sa demeure de Monticello, il s'est penché sur diverses éditions en grec, en latin, en français et celle anglaise de King James. Il a coupé les passages qu'il voyait comme de véritables enseignements de Jésus et les a collés, dans les quatre langues côte à côte.
Six ans avant sa mort, en 1820, Jefferson a produit son propre volume relié de cuir intitulé La vie et la morale de Jésus de Nazareth, comprenant 84 pages. Il avait alors éliminé tout ce qui dans la Bible concernait les miracles, ayant notamment terminé le récit évangélique de l'exécution et de l'enterrement de Jésus, en omettant l'anecdote de la résurrection.
Après avoir mis son idée en pratique et examiné les Évangiles, Jefferson en est ressorti avec un sentiment mitigé. Cette même année, il écrivit à William Short qu'il avait trouvé nombre de passages de bonne imagination et moralité, et de la plus belle bienveillance, quand d'autres en revanche lui semblaient révélateurs d'ignorance, d'absurdité, si incroyables qu'il les associait à du charlatanisme. Une imposture à ses yeux, que de vouloir faire croire que ces paroles contradictoires étaient celles du même être.
Un ouvrage original à consulter gracieusement en ligne via la plateforme de la Smithsonian, et également commercialisé sous forme de reproductions.
(via OpenCulture)
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