Les machines à sous ont souvent fait rêver quand on était enfant. On en croisait de toute sorte dans les fêtes foraines. Et, plus largement, on appelle d’ailleurs machine à sous tous les engins qui délivrent un quelconque produit contre une pièce de monnaie. Cela peut aller du bonbon à la peluche en passant par de l’argent ou encore des petites boites mystères.
Le 21/01/2023 à 09:08 par Victor De Sepausy
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21/01/2023 à 09:08
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Quand on pense aux machines à sous, immédiatement, c’est le doux tintement des pièces de monnaie qui tombent en cascade que l’on entend. Ces pièces sonnantes et trébuchantes ont fait rêver des générations d’enfants dans les fêtes foraines, avant de se retrouver dans les lieux un peu moins attrayants que sont les casinos aux lumières faussement feutrées, avec des tapis rouges en veux-tu en voilà.
Mais avant d’adopter des formes finalement assez consensuelles, les machines à sous ont déchaîné l’imagination des concepteurs. Il faut attendre 1892 pour voir apparaître les premiers exemples de ces pièces qui sont aujourd’hui des antiquités recherchées. Il suffisait alors, comme aujourd’hui, d’insérer dans la fente, dénommée slot par influence anglo-saxonne, une petite pièce pour commencer à jouer.
Entre la fin des années 1800 et le début du XXème siècle, on va assister à une frénésie de créations, avec des croisements entre Art déco et Art nouveau assez étonnants à observer a posteriori. Dans son livre Les machines à sous (Editions Alternatives, 208 pages), richement documenté et illustré, Jean Lemaitre nous fait découvrir l’histoire de ces objets promis à un bel avenir.
Si l’on a souvent surtout à l’esprit les machines qui donnent de l’argent contre de l’argent, l’inventivité des créateurs a d’abord donné lieu à de multiples propositions. On pouvait ainsi, en échange de quelques pièces, avoir aussi bien un bonbon, un parfum, un horoscope, des images animées, des peluches ou encore des cadeaux surprises. Selon les époques et les modes, les propositions variaient.
Cependant, en 1937, les machines à sous sont interdites en France, ce qui condamne à la destruction un nombre très important de ces objets qui trônaient dans les bars, mais pas seulement. Heureusement quelques amateurs passionnés ont mis de côté ces engins, avec parfois un usage clandestin qui persistait. C’est pourquoi on peut avoir la chance d’admirer encore des machines d’un autre temps chez quelques antiquaires. Des particuliers les utilisent comme objet de décoration, dans la même veine que les jukebox que l’on voyait partout dans les années 50 et 60 avant de progressivement disparaître sous l’effet de l’apparition du compact disc.
Après 1937, une certaine hypocrisie existe, car les machines ne disparaissent pas totalement, et se développent des salles de jeu clandestines dans toutes les grandes villes. Dans les années 70 et 80, le phénomène devient massif et génère de nombreux trafics et, surtout, une manne considérable pour les truands et autres membres du « milieu ». L’Etat, face à cet argent qu’il ne voit pas passer et aux règlements de compte que ce marché provoque, finit par légiférer. Finalement, la meilleure solution qui est trouvée, c’est d’autoriser l’usage de ces machines à l’intérieur des casinos, à partir de 1987.
Cette décision a eu des conséquences majeures sur le chiffre d’affaires des casinos qui s’est mis à grossir considérablement. Cependant, cette montée en puissance est allée de pair avec des addictions. De nombreux chercheurs en économie comme en sociologie se sont penchés sur la question. On peut avec intérêt parcourir l’ouvrage du sociologue Jean-Pierre Martignoni-Hutin qui a publié Ethnologie des machines à sous (L’Harmattan, 262 pages).
L’auteur s’intéresse à ces nouveaux clients qui ont fait le succès des casinos grâce à la banalisation des machines à sous à partir du début des années 90 en France. Le portrait type du joueur est quelqu’un qui joue plutôt le week-end, deux ou trois fois par mois. S’il cherche à gagner de l’argent, il vient surtout pour une forme de plaisir que lui procure l’espérance du gain. On aime alors l’attente, le bruit des pièces. Si, au départ, face aux plaintes des joueurs de poker, on a pensé remplacer les pièces par des jetons en plastique, l’idée a rapidement été oubliée. Le bruit fait partie du jeu ! Un rapport presque affectif se noue même avec la machine aux formes colorées et illuminées.
Si les économistes ont longtemps cru que l’on aimait jouer soit quand on était riche (c’étaient les premiers adeptes des casinos et les cibles historiques) soit quand on était pauvre, il s’avère qu’à l’étude, la masse des joueurs est plutôt entre les deux…
Crédits illustration Pexels CC 0
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