S'il y a bien un auteur qui s'est efforcé de parler à tout le monde, c'est bien Charles Dickens. En effet, le roi du roman feuilleton anglais, publié d'abord dans les journaux de l'époque, et romancier le plus populaire de son époque, n'est pas connu pour son style alambiqué. Mais dans ses écrits privés, il va autrement. L'auteur d'Oliver Twist (Trad. Michel Laporte) utilisait également une sténographie personnelle, qu'il désignait lui-même, « d'écriture du diable », et qui resta diablement impénétrable pour tous les savants...
Le 12/02/2022 à 09:07 par Hocine Bouhadjera
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12/02/2022 à 09:07
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Les spécialistes de Dickens et les curieux de l'auteur anglais le savent, tel Batman, Charles Dickens avait sa batcave. Un refuge où il pouvait s'adonner à sa passion : non pas combattre le crime, mais poursuivre son œuvre littéraire. Des portes dissimulées vers ses pièces favorites dans des bibliothèques, garnies de faux livres aux titres savoureux... Et si Dickens se dissimulait ainsi, il en faisait de même pour certains de ses écrits.
Afin de révéler ces textes inconnus, un site Web, dédié au décryptage de ces textes mystérieux, The Dickens Code, a été lancé. Dans ce site, on explique que Dickens « a appris un système de sténographie difficile, appelé Brachygraphy, qu'il évoque d'ailleurs dans son roman, David Copperfield, l'appelant un mystère sténographique sauvage ».
Copie d'une lettre de Charles Dickens cryptée de 1859.
Concours : déchiffrez le Code Dickens
Le projet Dickens Code, affilié au site, et financé par le Arts and Humanities Research Council, est dirigé par le Docteur Claire Wood de l'Université de Leicester, en collaboration avec le professeur Hugo Bowles de l'Université de Foggia, et une série de partenaires internationaux.
Afin de résoudre cette énigme séculaire, la structure a souhaité créer une communauté de décodeurs, bien consciente du nombre de passionnés en cryptographie sur la toile. Des prodiges qu'il ne faut pas motiver longtemps avant qu'ils se mettent au travail. Cependant, pour être certain de leur motivation, le projet a décidé de remettre un prix doté pour celui ou celle qui proposerait une transcription sténographique convaincante, et organise des ateliers pour aider ces informaticiens-enquêteurs dans le processus de déchiffrement.
Un concours remporté par un certain Shane Baggs, « qui n'avait jamais lu un roman de Dickens de sa vie », explique Jenny Gross du New York Times. Si Baggs n'est pas un grand lettré, il est en revanche un spécialiste du support technique informatique de San Jose, en Californie, et grâce à ses connaissances informatiques, il a ainsi pu décoder une copie d'une lettre de l'auteur, datée du 6 mai 1859. Le féru d'informatique passa six mois à travailler sur le texte, « principalement après le travail, et a déclaré qu'il avait entendu parler du concours pour la première fois par le biais d'un groupe sur Reddit dédié au craquage des codes et à la recherche de messages cachés », ajoute Jenny Gross.
« Jamais je n'aurais imaginé que ce que je pourrais un jour intéresser les spécialistes de Dickens », s'étonne le prodige de l'informatique, interrogé par l'université de Leicester.
Un cahier de Dicken conservé à la John Ryland Library, où l'auteur explique son système de sténographie. (Université de Manchester)
Une lettre au rédacteur en chef du Times of London
Dans cette copie personnelle d'une lettre adressée au rédacteur en chef du Times of London, John Thaddeus Delane, Dickens, à l'époque où il écrit Le Conte de deux cités - Paris et Londres en 1793 - (Trad. Henriette Loreau), explique qu'un employé du journal a eu tort de rejeter une publicité qu'il voulait dans le journal. Il en profite également pour faire la promotion d'une nouvelle publication littéraire, et demande que cette publicité soit publiée.
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Une copie de mauvaise humeur pour lui-même, finalement assez anecdotique, et qui n'a, en réalité, été déchiffrée qu'à 70 %. Ainsi, le projet Dickens Code a encore du travail à faire, et continue de faire appel à des bénévoles pour les aider. En revanche, le prix rémunéré n'existe plus, visiblement détenu par Shane Baggs. S'offrira-t-il, avec son petit pactole, les oeuvres complètes de l'un des plus grands auteurs du XIXe siècle anglais ?
Crédits : Domaine Public
Paru le 13/08/2014
160 pages
Hachette
4,95 €
Paru le 13/06/2019
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