Tyler Durden fabrique du savon avec de la graisse humaine, d'autres font des couvertures de livres en peau d'êtres humains. Chacun son truc. L'exercice de la biblioplégie anthropodermique n'est, comme on peut le concevoir, pas très répandu, mais il a bien eu ses adeptes et ses usages, jusqu'à devenir une tradition à la peau dure.
Si une version humainement tannée d'American Psycho est prévue, qu'il soit clair que nous en précommandons d'ores et déjà un exemplaire. Mais peu de chances de voir débarquer sur les rayonnages de la Fnac un étalage d'épidermes : la pratique s'est en effet perdue après une grosse demande pendant les XVIIe et XVIIIe siècles.
Ainsi, la vague de répression dirigée contre les instigateurs de la Conspiration des poudres en 1605 (relisez V pour Vendetta si cela ne vous dit rien) conduisit le roi Jacques 1er à condamner à la pendaison le jésuite Henry Garnet, qui, en respectant le secret de la confession, n'avait pas révélé le complot qui se tramait contre le Parlement. Mais rien ne se perd, et la peau de Garnet a été utilisée pour orner les exemplaires d'un recueil des charges à son encontre, intitulé A True and Perfect Relation of the Whole Proceedings Against the Late Most Barbarous Traitors, Garnet a Jesuit and His Confederates. Certains vont jusqu'à voir sur l'exemplaire ci-dessous, tel un saint Suaire, le visage du prêtre.
À l'époque, il caracolait en tête des ventes.
Autre création originale, et peut-être une idée-cadeau pour l'anniversaire de votre moitié : une comtesse française, désespérément amoureuse de l'astronome Camille Flammarion, cherchait un moyen de se faire remarquer. « Elle ne manque pas de chair ! » a dû penser Flammarion en découvrant que celle-ci lui avait envoyé une bande de peau provenant de son épaule. Flammarion, qui était excellent scientifique, mais visiblement un peu allumé (il prédisait régulièrement la fin du monde ou la venue des extraterrestres), a rendu hommage à Madame en l'incluant à la couverture d'un exemplaire de Terres du Ciel, publié en 1877.
Si vous voulez tenter l'expérience, Anthony Bliss, conservateur des livres rares à l'Université de Californie, vous guide : « Faire des livres avec de la peau humaine plutôt qu'avec du cuir de vache n'est pas si difficile, puisque que le cuir est simplement plaqué sur une structure rigide ». Toutefois, attention, « la peau n'est pas comme du cuir de chaussures, c'est à peu près aussi épais que trois feuilles de papier ». À manipuler avec précaution donc, si vous ne voulez pas écorcher tout votre entourage et passer pour l'Hannibal Lecter du monde des Lettres.
Enfin, nous sommes confus de ne pas avoir réussi à nous procurer une photographie, mais une rumeur court comme quoi un exemplaire de l'Éloge des seins de Sade aurait une couverture ornée de... Bon, vous voyez ce qu'on veut écrire.
Par Clément Solym
Contact : clements@actualitte.com
Paru le 21/04/2005
526 pages
10/18
10,70 €
Paru le 16/09/2009
296 pages
Panini France
30,39 €
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