Dans le tumulte de la rentrée littéraire, apparaissait en 2019 un îlot de résistance : depuis Instagram, les Kevin de l’édition ruaient dans les brancards. Un humour d’agent infiltré — des insiders, diable ?! — qui ravissait l’industrie trop heureuse de sourire de ses propres travers. Surtout quand cela tombait sur les voisins. Et puis, en janvier dernier, un chant du cygne, et tout s’arrêtait.
Le 24/09/2020 à 16:55 par Nicolas Gary
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24/09/2020 à 16:55
En période de crise sanitaire où l’on découvre la géographie française à travers non 50 nuances de gris, mais des déclinaisons de carmin, rubis, grenat ou grenadine, le rouge devenait la couleur du ralliement. Sans marteau ni faucille a germé un compte aux élucubrations instagrammiques ravissantes : faisant place nette autant que Place Rouge, les éditions du Soviet éponge reprennent le flambeau des Kevin.
Des clins d’œil bien sentis, à l’image de ce que les Kevin produisirent en leur temps, les éditions du Soviet éponge répondent en claironnant à la dépression ambiante. Depuis deux semaines, les voici, moins exclusifs peut-être que les Kevin — ou sont-ce les mêmes joyeux trublions débauchés et rempilant pour de nouvelles aventures ? « Éditeur de livres capillotractés. Le second degré est notre premier degré. » Certes, mais encore ? Enquête...
Le mystère restera entier : contactés par ActuaLitté, la maison qui arbore tout de même une belle étoile rouge comme aux plus belles époques des clubs de foot soviétiques, martèle et martèle — d’un marteau sur… une éponge — qu’elle préfère à la célébrité sa facétieuse intimité. « Nous sommes flattés de l’intérêt, porté, et si l’on peut faire rire quelques personnes, c’est bien l’essentiel », répond-on pudiquement quand on leur propose de nous expliquer leur initiative. Ce n'est plus de la poupée gigogne, mais de la poupée gigote...
Seul mot d’ordre revendiqué, « apporter un peu de second degré parmi tous ces égos ». Alors, on s’en contentera, et d’un vibrant “Camarade” lancé depuis les messageries respectives, l’éditeur repart à ses Grandes Œuvres. Alors oui : satire dans tous les sens, sans prendre vraiment de précautions, matriochka contre le coeur, mais avec une douzaine de publications, l’éditeur apporte désormais sa pierre à l’édifice de la surproduction.
On sent bien que le principe est plutôt louvoyer que l'ouvrier, mais les travailleuses et travailleurs du livre s'en donneront à coeur joie – et leur employeur passera... l'éponge, évidemment.
D'ailleurs, quelqu'un sait qui était derrière les Kevin ?
Dossier - Lecteurs, communauté et réseaux sociaux : promouvoir le livre
photo : L'Ouvrier et la Kolkhozienne de Vera Ignatievna Moukhina, 1937
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