Il sera toujours proclamé ce 3 novembre, mais le prix Goncourt 2021 a bel et bien débuté par quelques taches peu reluisantes. La nouvelle sélection présentée ce jour ne lavera pas plus blanc. Et l’on passe de 15 romans à 9 ouvrages qui poursuivent leur lente marche vers la dotation de 10 €.
Le 05/10/2021 à 13:48 par Clément Solym
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Publié le :
05/10/2021 à 13:48
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Philippe Claudel devenu secrétaire général, officiellement (après un intérim de quelques mois), l’équipe des académiciens était au grand complet pour dévoiler ce 7 septembre la première liste. Reste que la bisbille impliquant Camille Laurens, jurée, François Noudelmann et Anne Berest, nominés, a fait tache d’huile. La romancière s’était gentiment fait étriller dans une chronique publiée par Le Monde, où son ouvrage était comparé à « La shoah pour les Nuls » — un titre que même les éditions First n’avaient jamais osé. Et dans le même temps, était dévoilé le lien personnel entre la jurée et le romancier…
Car, très vite, on s’interroge : quel est le point de vue ? C’est essentiel, le point de vue, en littérature. Or, au début, Anne n’en a pas car elle est ignare ou feint de l’être, au point que lorsqu’elle interroge niaisement sa mère, on croirait parfois lire « La Shoah pour les nuls ». Puis elle s’enhardit mais, peu douée de réelle empathie pour ses personnages, elle adopte le point de vue… du lecteur, ectoplasme à qui il faut tout expliquer, tout montrer, surtout.
Chronique de Camille Laurens, Le Monde
« Tous les académiciens ont évidemment lu l’ouvrage que vous évoquez et plus de 4 l’ont défendu le mardi 7 septembre sinon il ne figurerait pas sur la liste de la première sélection du Goncourt », précisait Françoise Rossinot, déléguée générale de l’Académie Goncourt, à ActuaLitté.
Un tel flagrant délit, de mémoire d’universitaire, ne s’était jamais aussi visiblement fait remarquer : si l’Académie a resserré les rangs, pour ne faire plus qu’un, la possibilité d’une radiation pour « motifs graves » a manifestement été balayée.
Professeur des universités à Michel de Montaigne Bordeaux III, Olivier Bessard-Banquy analysait : « Ce sont plutôt ceux des membres qui ne se sentent plus en accord avec le fonctionnement de l’académie qui partent d’eux-mêmes en général. Il manque de toute évidence au sein du jury une grande figure morale capable d’imposer des règles claires et de sauver le prix par des décisions inattaquables. »
La nouvelle sélection du Prix Goncourt 2021 se compose comme suit :
Christine Angot, Le Voyage dans l’Est (Flammarion)
Anne Berest, La carte postale (Grasset)
Sorj Chalandon, Enfant de Salaud (Grasset)
Louis-Philippe Dalembert, Milwaukee Blues (Sabine Wespieser)
Agnès Desarthe, L'Éternel fiancé (L'Olivier)
Clara Dupont-Monod, S'adapter (Stock)
Abel Quentin, Le voyant d'Étampes (L'observatoire)
Mohamed Mbougar Sarr, La plus secrète mémoire des hommes (Philippe Rey)
Tanguy Viel, La fille qu'on appelle, Éditions de Minuit
Nul ne s’attendait à ce que les deux livres ayant provoqué la polémique demeurent en lice, mais moins encore que l'un des deux demeure. Reste désormais à mesurer ce que cette incartade aura de conséquences…
La grande morale de cette sélection restera, sans aucun doute, la mise au point opérée : désormais, les « ouvrages des conjoints, compagnons ou proches parents des membres du jury », seront exclus de toute liste. De quoi reconnaître en creux que la présence du livre de François Noudelmann posait problème, de par ses liens avec la jurée.
Le président du jury, Didier Decoin, ajoute auprès de Livres Hebdo que les membres de l’Académie seront tenus d’informer de leurs liens. En outre, s’ils publient des chroniques dans les médias, interdiction sera faite de produire des articles sur les ouvrages retenus dans la liste du Goncourt.
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Par Clément Solym
Contact : cs@actualitte.com
1 Commentaire
MAC
06/10/2021 à 08:34
Le bal des vieux cons ou l'entre-soi parisianisme...
À l'exception notable de l'Observatoire (Deo gratias !), tous ces éditeurs sélectionnés exigent des manuscrits en papier... Sans doute un formidable hasard de la sélection basé sur l'unique qualité des auteurs.
On est en 2021, presque en 2022. L'envoi électronique devrait être la règle, le papier l'exception. Mais tous ces « grands » éditeurs, qui exigent du gouvernement une loi pour pouvoir envoyer gratuitement ou à prix réduit leurs livres par la Poste, exigent du maillon faible un effort financier démesuré pour que ces Seigneurs daignent jeter un œil sur leurs proses...