C'est à distance sanitaire et en petit comité qu'a été attribué ce jour à Akira Mizubayashi le Prix des Libraires 2020 pour son Âme brisée, roman paru chez Gallimard.
Ce prix est un prix de libraires : une dizaine d'entre eux établissent une première sélection de 5 titres, parus durant les rentrées littéraires de septembre et de janvier précédant le prix. Ce sont cette année, et dans un contexte particulier, plus de 360 libraires français et francophones qui ont participé au vote, et ont dû départager les titres sélectionnés.
Nathalie Iris, Présidente du Prix, a rappelé que depuis 1955, date de création cette distinction, nombre d'auteurs en devenir ont été récompensés, tels Patrick Modiano, Eric Fottorino, Laurent Gaudé, Delphine de Vigan, Pierre Assouline, Marc Dugain ou encore Gaëlle Nohant, primée en 2018 pour Légende d’un dormeur éveillé, et marraine du Prix cette année.
Cette dernière a tenu à rappeler son très grand attachement aux libraires et à ce prix qui « témoigne de la diversité et de la richesse de vos choix. [...] Les liens que vous créez avec vos lecteurs et votre exigence de nourrir leur curiosité, de les emmener chaque fois un peu plus loin, me paraissent plus nécessaires et précieux que jamais. »
Elle assure d'un « roman riche de mille nuances humaines dont les variations subtiles continuent de résonner après qu'on l'a fermé. [..] Ce roman déplace nos centres de gravité de quelques millimètres, pour faire résonner en nous la fraternité universelle de l’art, la transmission des voix brisées mais aussi le chemin patient et lumineux de la réparation. »
L'auteur, Akira Mizubayashi, en duplex depuis le Japon, a quant à lui exprimé sa joie : « Je ne m'y attendais absolument pas, pour moi être publié par Jean Marie Laclavetine était déjà énorme, imaginez la surabondance de joie et de bonheur que vous me procurez par cette décision extraordinaire de me décerner cette distinction ! Elle me fait d'autant plus plaisir que je sais depuis ma première publication en français comment vous, les libraires, vous travaillez au quotidien pour transmettre la passion de la littérature et votre goût de la lecture. Je me considère comme l'un des écrivains les plus heureux et les plus chanceux de l'année 2019 - 2020 ! »
Et d'ajouter, à propos d’Âme brisée, comment ce roman trouvé sa genèse dans la publication d'Armistices , un recueil de textes d'une trentaine d'écrivains publié à l'occasion des célébrations de la fin de la grande guerre et auquel il a contribué. « Il s'agissait pour moi d'une réflexion sur les zones de catastrophes qui engendrent des fantômes. L'histoire que je raconte dans Âme brisée est issue de cette période récente de ma vie, hantée, habitée par les fantômes. Elle n'est pas du tout autobiographique, mais ce petit garçon de onze ans traumatisé est certainement le résultat d'une projection mi consciente mi inconsciente. Oui, j'aime infiniment ce mot de transmission et vous l'aurez remarqué c'est l'un des thèmes qui me tiennent à cœur. Je suis heureux, très heureux de savoir que cette histoire a pu toucher un très grand nombre de lecteurs, grâce précisément à votre travail de transmission. »
Antoine Gallimard s'est déclaré très heureux de ce prix, insistant sur la « subtilité qui se déploie dans ce livre qui nous a beaucoup touchés, une harmonie qui se dévoile comme des fiançailles entre la littérature et la musique ». L'occasion aussi de s'adresser aux auteurs : « Arrêtez de faire une fixation sur le mois de septembre et ses prix, la rentrée littéraire, pour moi, c'est tous les mois ! »
Jean-Marie Laclavetine, son éditeur, a quant à lui été extrêmement ému par cette « histoire très simple, très belle, très inattendue ». Et a souligné combien ce roman était touchant « parce qu'il a été écrit par un japonais. Depuis Une langue venue d'ailleurs, son premier titre, publié dans la collection L'un et l'autre, où il expliquait comment le français l'a en quelque sorte sauvé, cette problématique de la relation entre les langues et son amour très profond, et très argumenté, pour le français, alimente tous ses livres. Cette passion pour la langue a de multiples significations pour lui, à la fois esthétiques et politiques, qui nourrissent le roman de façon tout-à-fait captivante. Il est extrêmement émouvant pour nous, français, de voir notre langue ainsi honorée par un auteur venu de si loin, qui vient en faire un cadeau littéraire de très grande qualité. »
Outre le travail de transmission que poursuivront les libraires pour porter ce prix et ce titre, Akira Mizubayashi, par l'intermédiaire de son éditeur, recevra de la part du Prix des Libraires des chèques-lire, des abonnements à des magazines, Lire et Légende, le nouveau magazine d'Eric Fottorino (consacré pour ce premier numéro à Zinedine Zidane et distribué en librairie par l'équipe Gallimard), et une caisse de vin (étonnamment - ou précautionneusement ? - égarée au moment de cette réception).
Actualitté, partenaire du Prix, assure par ailleurs une campagne de soutien active du Prix des Libraires et du titre lauréat.
Akira Mizubayashi - Âme brisée – Gallimard – 9782072840487 – 19 €
#PrixdesLibraires2020
Paru le 29/08/2019
256 pages
Editions Gallimard
20,00 €
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