Est-ce une provocation ? Alors que l'on célébrera le trentenaire - bon anniversaire, ma petite - de la Loi Lang de 1981, une chose incongrue nous est signalée. Si, si, incongrue.
Pour faire simple, la loi Lang permet aux éditeurs de fixer un prix de vente unique pour leurs ouvrages. Ainsi, chez n'importe quel revendeur de bouquins, le même livre sera au même prix. Contrairement à ce qui se passe outre-Manche, outre-Atlantique, où une telle législation n'existe pas, et permet donc aux marchands de proposer des remises sur les ouvrages papier. Papier uniquement, puisque le contrat d'agence permet aux éditeurs de fixer le prix de vente des livres numériques.
Pas de remises, donc, en France, même durant les soldes. Et pourtant.
Soldes, - 30 %, - 50 %
Les amateurs d'Harry Potter trouveront sur cette page une étrange offre, mettant 50 % de réduction sur les Reliques de la Mort, le dernier opus de la saga Potter.
Incompréhensible ? En tout cas, de quoi laisser le grand public dubitatif.
Surtout que l'on retrouve la même chose pour le Prix Goncourt de l'an passé, Syngué sabour, Pierre de patience, est frappé de la même remise de 50 %.
Toute la grande liste des ouvrages, bénéficiant de remises de 30 % ou 50 %; est disponible à cette adresse. Autant de remises qui sont particulièrement intrigantes, car selon les apparences, en violation de la loi Lang.
Vraiment ? Pas tout à fait
Selon l'article 5 de la loi Lang, « Les détaillants peuvent pratiquer des prix inférieurs au prix de vente au public mentionné à l'article 1er sur les livres édités ou importés depuis plus de deux ans, et dont le dernier approvisionnement remonte à plus de six mois. »
L'opération effectuée par Decitre et Alapage rentrerait donc dans la cadre de cet article, permettant ainsi de grosses ristournes, mais pas sur des nouveautés de moins de deux ans. La pratique est donc tout à fait légitime, mais quelque peu brutale. (merci @Silvae)
Question : pourquoi les autres grosses machines du net n'ont-elles alors pas lancé une opération similaire ?
MàJ :
À lire, le billet chez Notes d'un économiste
MàJ 2 :
Article repris pour détailler servir d'exemple à l'article 5 de la loi Lang. La situation était en effet suffisamment étrange pour avoir trompé des libraires eux-mêmes, qui nous avaient avertis de cette campagne de soldes. Contacté - nocturnement - l'un d'eux nous explique : « C'est vrai que je ne connaissais pas cet article. En fait, des livres qui restent chez nous plus de deux ans, c'est assez rare. Et nous pratiquons forcément peu ce genre de campagne promotionnelle. Ça démontre en tout cas que l'on a bien besoin de parler d'elle, tant pour le grand public, que même parmi les professionnels. » [NdR : la loi précise 6 mois sans réassort, et non deux ans]
En réponse à notre article, un éditeur nous expose sa réflexion : « Vous avez bien fait de m'avertir, çar ça reste néanmoins une première utilisation qui va changer la donne. C'est surtout Alapage qui lit bien et en détail la Loi. »
Pour compléter ces informations, il faut noter que c'est la quatrième année qu'Alapage réalise cette campagne, nous précise-t-on. « Ce sont souvent des "fonds de tiroir" d'éditeurs qui s'en débarrasse ainsi, ce qui rend service aux dits éditeurs, et à Alapage ou Chapitre »
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