Selon une étude, la longueur des livres, en nombre de pages, aurait augmentée de 25 % sur les quinze dernières années. Une comparaison entre plus de 2500 best-sellers a révélé qu’ils étaient passés d’une longueur moyenne de 320 pages en 1999 à 400 pages en 2014. L’étude a été menée à Vervesearch, une agence de contenu basée à Londres, et publiée par Flipsnack.
Le 11/12/2015 à 13:48 par Camille Cornu
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11/12/2015 à 13:48
James Finlayson, directeur de l'étude, pense pouvoir expliquer cette évolution par l'arrivée du numérique. Il a expliqué son point de vue au Guardian :
« Quand on choisit un grand livre dans une librairie, on peut parfois être intimidé, alors que sur Amazon le nombre de pages est juste précisé dans une note de bas de page à laquelle on ne fait pas vraiment attention. J’hésite toujours avant d’acheter de gros livres pour partir en vacances, parce que je ne veux pas avoir à les transporter partout. Mais une fois rangé dans le Kindle, ce n’est plus un problème. »
Il met donc en avant un des avantages du livre numérique : sa transportabilité. Mais le numérique aurait peut-être tout simplement permis de faire du format une considération secondaire, laissant exister des textes très courts comme des plus longs.
Interrogé sur la question, l’agent littéraire Clare Alexander met plutôt en avant un changement culturel dans cette prise de longueur : « Malgré tout ce qui a pu être dit de la mort du livre dans sa compétition avec les autres médias, les gens qui aiment lire préfèrent les textes longs et immersifs. C’est le total opposé des miettes de rumeurs et des bribes d’informations dont internet nous mitraille en permanence. »
Max Porter, éditeur chez Granta, a publié The Luminaries (Les Luminaires, trad. Erika Abrams, Buchet/Chastel, 2014), livre de 800 pages lauréat du prix Booker en 2013. Il trouve l’arrivée de ces livres longs sur le marché « réconfortante », mais n’est pas non plus convaincu que cela soit dû à l’arrivée du numérique. Il cite d’ailleurs des études montrant que 60 % des livres téléchargés ne sont jamais commencés, et que les livres lus entièrement peuvent n’atteindre que les 20 %.
Pour lui, un livre papier aura plus de chances d’être lu : « Un gros livre s’installe chez vous. C’est une incarnation physique de votre attention, de passer le temps qu’il faudra à le lire. »
Alex Bowler, éditeur chez Jonathan Cape, ajoute qu’il n’est « pas inondé de romans de 200.000 mots. La majorité de ce que je reçois est des romans qui font entre 250 et 350 mots ». Il souhaite modérer cette prise de longueur des best-sellers, et rappelle les astuces des éditeurs pour les faire paraître plus longs : mettre plus d’espace entre les mots ou affiner la largeur des colonnes de texte.
Les éditeurs peuvent en effet être rassurés à l’idée de proposer un objet plus conséquent à la vente, assurant au lecteur qu’il en aura pour son argent.
Et si les lecteurs peuvent également prendre plaisir à s’immerger dans un univers développé, avec des personnages auxquels ils peuvent prendre le temps de s’attacher, il semblerait que la prise de longueur des romans ne soit pas explicable de cette façon. Peut-être cette taille les fait-elle tout simplement sortir du lot sur le bureau des éditeurs et sur les étals des librairies, attirant davantage de lecteurs.
Comme le souligne l’agent littéraire Clare Alexander : « Je dirais qu’il y a aussi une force opposée en jeu avec l’intérêt pour les formats courts et la forme brève, mais parfaite de la nouvelle. En tant qu’agent, le format le plus difficile est maintenant tout ce qui se trouve au milieu : tarif moyen, milieu de carrière, taille moyenne — en fait tout ce qui est moyen. »
Un livre plus gros représente pourtant plus de risques pour un éditeur qui aura plus de frais à engager. Le fait est que les livres longs sont surtout représentés par des best-sellers, notamment les « séries », de Harry Potter à 50 nuances de Grey.
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