En quoi consiste le magazine d’écriture ?
Le 26/03/2008 à 06:00 par Clément Solym
Publié le :
26/03/2008 à 06:00
Emma Gary Wallace, auteur professionnelle, possédait plus que des notions du monde l’écriture. Avec un CV qui comprenait des essais dans des magazines pour la tenue de maison ou la cuisine et une histoire de Noël assez populaire, Le Nouveau Voisin, elle était prête et capable de donner des conseils aux lecteurs du nouveau mensuel « Writing ».
« Les écrivains perdent un temps considérable à envoyer leurs travaux à travers le pays pour des marchés impossibles à toucher », observe-t-elle. « N’amenez pas de charbon à Newcastle ou n’offrez pas de la joaillerie à une forge. Chaque magazine a sa propre politique et s’oriente sur un type de clientèle. Étudiez-les et prenez le compte quand vous envoyez vos productions sur un marché. »
Nous étions en 1921 au moment de ces mots, les conseils pour l’écriture portaient et portent toujours sur le marché. Cet appel à l’aide lorsque quelqu’un passe de l’envie d’écrire à l’écriture puis à la publication a inspiré de nombreux livres, magazines et sites Web. « Successful Writing » devenu aujourd’hui « Writer’s Digest », est l’un des pionniers dans ce secteur. Basé à Cincinnati dans le siège social de F&W Publications, le magazine se publie encore à plus de 100 000 exemplaires.
« Le talent, c'est avoir envie de faire quelque chose »
Jacques Brel
« Je pense sincèrement que nous pouvons offrir quelque chose à un large spectre d’écrivains quel que soit leur niveau, du débutant au vétéran et dans tous les genres, » affirme la directrice de la publication de Writer’s Digest, Maria Schneider. Le propos reste toujours au final cette éternelle énigme : comment écrire, et écrire bien ? Comment se faire remarquer et vendre ?
« C’est comme se demander si on peut découvrir comment peindre un portrait ou composer une symphonie ? » explique le mystérieux écrivain Lawrence Block, éditorialiste récurrent de Writer’s Digest. « La plupart des arts sont assurément très difficiles, et il y a toujours plus de gens qui veulent faire que de gens qui peuvent. »
Writer’s Digest propose des entretiens, des études de marché et des conseils généraux. L’édition d’avril affiche en couverture le romancier vampire Laurell K. Hamilton, des mises à jour sur les genres « chauds » comme la romance et l’horreur ainsi qu’un essai par Bonnie Trenga, qui recommande de ne pas faire de phrases de plus de 40 mots, car « vos lecteurs ne peuvent rester concentrés très longtemps ».
« Il vaut mieux préférer un style lisible, clair à ce qu’on appelle un style ‘littéraire’, une méthode d’expression compliquée qui embrouille plutôt qu’elle ne clarifie l’idée », conseille un éditorialiste. Une suggestion pour les écrivains qui n’écrivent pas de fictions : « L’un des moyens les plus sûrs de plaire aux éditeurs est de paraître très informé. »
L’écriture, toujours en phase avec l’actualité
Le marché danse souvent au son des évènements. Dans les années 20, la montée des vols commerciaux a créé une vague de « fictions aéroportées », des histoires d’aventures dans les airs. L’abrogation de la Prohibition en 1933 a conduit à de nouvelles opportunités pour les revues d’industries de la bière.
Le cyberespace et la publication numérique semblaient de la science-fiction pour la plus grande partie du 20e siècle, et il a fallu un écrivain de science-fiction pour entrevoir le futur. Un essai de 1971 par le directeur de la publication de Galaxy magazine, Frederick Pohl, en outre écrivain primé de science-fiction, avait étonnamment prévu l’impression à la demande et le livre numérique alors qu’il imaginait le marché en 2001.
« Imaginons que vous vouliez lire un roman. Vous tapez le nom et la légende sur le clavier de votre télétype, et vous ‘commandez’ une copie du livre. L’impression de votre exemplaire commence immédiatement page par page, » écrit Pohl. « Et si vous ne souhaitez pas forcément (d’avoir le livre), vous pouvez très bien suspendre votre écran TV au-dessus de votre lire, avoir le livre présenté une page à la fois et lire à votre aise. »
La romance et le mystère ont toujours été demandés, bien qu’il y ait eu des tendances et les publications qui allaient et venaient.
Attention : « Concision demandée »
Derniers conseils : le marché était un code à craquer et des experts autoproclamés sont venus apporter leurs solutions, comme J. Berg Esenwein, dont les conseils « pincent le coeur des éditeurs de magazine ». Les lecteurs des années 20 et 30 ont sûrement entendu parler de la « nouvelle méthode de suggestion d’intrigue » de William Wallace.
Tous s’accordent sur le fait que l’unique façon de devenir écrivain est d’écrire. Le prolifique John Updike recommandait des habitudes de travail constantes, alors que Michael Chabon affirmait que rien n’était possible sans « talent », « chance » et « discipline ». Au début des années 20, un jeune nouvelliste prometteur proposait une troisième formule après qu’un pair moins fortuné cherchait de l’aide pour développer une intrigue.
« Votre lettre était très vague sur ce que vous vouliez vraiment, » grondait l’auteur. « Étudiez Kipling et O.Henry, et travaillez d'arrache-pied ! Je me suis fait refouler 122 fois avant de vendre une histoire. »
L’auteur, F. Scott Fitzgerald ne s’est pas découragé pour autant.
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