Le prix Anaïs Nin a couronné le livre de Virginie Despentes, Vernon Subutex, l'histoire d'un ancien disquaire, ultime témoin d'un monde en voie de disparition. Mais ce sont bien d'autres histoires qui se croisent dans ce roman multiple. Le prix est doté de 3.000 € et la traduction en anglais de l'œuvre primée est soutenue par les sociétés Coriolis (télécommunication et Very [habillement]. Nelly Alard et Capucine Motte, les deux romancières à l'origine de ce projet, nous racontent cette aventure.
Le 26/01/2015 à 09:27 par Nicolas Gary
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26/01/2015 à 09:27
« L'idée de réaliser un prix devait s'accompagner d'une autre intention : le marché anglo-saxon est souvent imperméable aux œuvres des écrivains français. Nous avons choisi cette piste, pour assurer la promotion à l'international d'auteurs qui ne sont pas toujours les mêmes », précise Nelly Alard.
Mieux représenter la France, aux États-Unis, est un enjeu d'envergure : en 2010, une étude du MOTif indiquait que 37.000 œuvres littéraires étaient traduites à Paris, depuis l'anglais, contre 640 à New York, depuis le français. « Les écrivains le savent, une traduction en anglais déclenche d'autres traductions, dans d'autres langues », ajoute-t-elle. Et la figure d'Anaïs Nin, évidemment, dispose d'un rayonnement puissant.
Des personnalités littéraires comme Antonin Artaud, Henry Miller, et d'autres, furent attirées par cette femme. « Elle incarne une image particulière, pour avoir écrit son journal d'enfance en français, qui fut par la suite écrit en anglais. » Or, le prix entend aussi « garder l'esprit de son œuvre : c'est une certaine idée de la liberté, face à l'ordre moral, mais également un féminisme lié à l'indépendance. Il correspond à une version très actuelle, qui ne verse pas dans le victimisme », précise Capucine Motte. « Et pour ne parler que de littérature, c'est magnifique ! »
Ayant obtenu l'autorisation des ayants droit, pour l'utilisation de ce nom, les deux femmes ont alors choisi de faire reposer ce prix « sur un message de liberté, tout en s'appuyant sur la dimension d'une littérature à exporter ».
Vernon Subutex est un ancien disquaire, rescapé d'un monde en voie de disparition. Beaucoup de ses amis proches sont morts, ou ont quitté Paris. Reste Alex Bleach, chanteur populaire, qui est la dernière personne de son entourage à pouvoir l'aider à payer ses factures. Un soir, Alex Bleach se filme, dans l'appartement de Vernon, sous coke. Quelques semaines plus tard, il décède d'une overdose. Vernon est expulsé de l'appartement qu'il occupait depuis dix ans. Il ne lui reste qu'à se faire héberger chez les uns, chez les autres, mais les connaissances qui lui restent ne sont pas toujours en mesure de lui apporter de l'aide.
Retrouver Vernon Subutex 1, en librairie
« Nous souhaitions que ce prix parvienne à donner un autre retentissement à la littérature française. D'autant plus que le français est la langue la mieux représentée aux USA », ajoute Capucine Motte. Et la route est longue pour ce faire. L'étude du MOTif indiquait que la littérature traduite aux États-Unis était considérée comme haut de gamme, alors que c'est une littérature plus populaire que l'on importerait de l'anglais – avec un quart des œuvres qui sont des classiques du patrimoine français.
Après tout, une nouvelle venue s'est installée l'an passé à New York, la librairie Albertine, proposant des ouvrages francophones dans la Big Apple. Avec plus de 14 000 titres d'auteurs français ou francophones, de tous les genres — du roman aux sciences humaines et sociales, de l'art à la bande dessinée ou à la littérature pour enfants — la librairie Albertine proposera la sélection la plus large de livres en français et en traduction de New York, offrant au public francophile et francophone un panorama unique de la richesse littéraire et intellectuelle française.
Une autre piste ?
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