La Fondation Praemium Erasmianum, patronnée par le roi des Pays-Bas, a attribué le Prix Erasme 2024 à l'écrivain indien Amitav Ghosh pour sa contribution passionnée au thème « imaginer l'impensable », où il donne forme à travers l'écriture à une crise mondiale sans précédent : le changement climatique.
Le 26/03/2024 à 10:24 par Hocine Bouhadjera
400 Partages
Publié le :
26/03/2024 à 10:24
400
Partages
Cette distinction annuelle est décernée à des personnes ou des institutions ayant apporté des contributions exceptionnelles aux humanités, aux sciences sociales ou aux arts, en Europe et dans le monde.
Nommé d'après Desiderius Erasme, humaniste de la Renaissance néerlandaise, le prix, doté de 150.000 € et d'une décoration conçue par Bruno Ninaber van Eyben, est remis lors d'une cérémonie au Palais Royal d'Amsterdam.
Amitav Ghosh plonge avec passion dans la recherche d'une réponse adéquate à une menace existentielle qui échappe à notre imagination : le changement climatique. À travers des histoires qui puisent dans le passé, il rend tangible un avenir incertain, mettant en lumière la crise climatique comme le symptôme d'une crise culturelle née d'une imagination déficiente.
Originaire de Kolkata, né en 1956, et ayant étudié l'anthropologie sociale à Oxford, il partage son existence entre l'Inde et les États-Unis. Son œuvre, riche de romans historiques et d'essais journalistiques, invite le lecteur à un voyage à travers les âges et les continents, s'appuyant sur une minutieuse recherche archivistique. Ses écrits, transcendant les barrières temporelles et spatiales, abordent avec sensibilité des thèmes cruciaux tels que la migration, la diaspora et l'identité culturelle, tout en préservant une perspective humaine.
La nature joue un rôle central dans l'œuvre d'Amitav Ghosh, notamment depuis ses recherches sur les paysages fluctuants des Sundarbans pour son ouvrage, Le Pays des marées, traduit par Christiane Besse pour Robert Laffont, où il note les ravages du changement climatique et de l'élévation du niveau de la mer. Ses écrits, enracinés dans l'histoire dense du sous-continent indien, révèlent comment les catastrophes naturelles y sont depuis toujours intimement liées au sort des hommes. À travers la trilogie Ibis, qui se déroule sur fond de culture du pavot et de guerres de l'opium, il expose les profondes cicatrices laissées par le colonialisme sur ces terres.
Dans son essai La malédiction de la noix de muscade (trad. Morgane Iserte), publié en France par Wildproject en janvier dernier, Ghosh remonte à l'origine de la crise planétaire actuelle, dénonçant une vision désastreuse qui réduit la Terre à une simple ressource, inerte et mécanique.
Un autre essai, Le grand dérangement, traduit par Morgane Iserte et Nicolas Haeringer pour Wildproject, en 2021, interpelle ses lecteurs, les invitant à considérer le changement climatique dans le contexte géopolitique des guerres et du commerce. À travers la compréhension et l'imagination, il ouvre la voie à l'espoir, élément essentiel pour le changement. L'auteur prône ainsi un humanisme renouvelé, prônant l'égalité de tous les êtres et la dissolution de la frontière entre l'homme et la nature.
Son dernier roman en date, La Déesse et le Marchand, traduit par Myriam Bellehigue pour Actes Sud en 2021, raconte Deen, un vendeur de livres anciens et spécialiste du folklore bengali, qui se lance dans une aventure le mène de la mangrove indienne à Venise.
Couronné de multiples distinctions, dont le Prix Médicis étranger en 1990 pour Les Feux du Bengale (trad. Christiane Besse, Seuil).
Mais aussi en 1997 le prix Arthur C. Clarke pour Le Chromosome de Calcutta (trad. Christiane Besse, Seuil), ou encore le prestigieux Prix Jnanpith en 2018, le plus grand honneur littéraire de l'Inde.
L'écrivain a par ailleurs été honoré d'un doctorat honoris causa par l'Université de Maastricht en 2019. Il a été reconnu par le magazine Foreign Policy comme l'un des penseurs globaux les plus influents de notre époque.
Parmi les précédents lauréats du Prix Erasme, on peut citer Charlie Chaplin, Ingmar Bergman, Olivier Messiaen, Claude Lévi-Strauss, Barbara Ehrenreich, Jürgen Habermas, David Grossman, Marc Chagall ou encore Wikipédia et sa communauté. Le lauréat 2023 a été l'acteur, humoriste et animateur de télévision sud-africain, Trevor Noah.
Par Hocine Bouhadjera
Contact : hb@actualitte.com
Paru le 01/09/2021
316 pages
Actes Sud Editions
23,50 €
Paru le 19/01/2024
354 pages
Wildproject
25,00 €
Paru le 15/03/2022
224 pages
Wildproject
20,00 €
Commenter cet article