Coup de pompe et goût du pompeux
Le 20/11/2009 à 15:32 par Clément Solym
Publié le :
20/11/2009 à 15:32
La nouvelle a fait trois fois le tour de l'Élysée avant de partir sur le net et voilà que tout le monde s'interroge : pour vouloir caser Albert Camus au Panthéon, doit-on en déduire que Nicolas Sarkozy a lu le penseur et romancier ? Pire : s'il l'a lu, a-t-il compris ? Et s'il a compris, va-t-il l'imposer au programme de l'agrégation de ces feignasses d'étudiants de Lettres ? Oh, incertitude...
En tout cas, les professeurs, ou anciens tout du moins n'ont pas tardé à sortir du bois pour dire ce qu'ils pensaient de ce genre d'initiative. Surprise ? François Bayrou n'est pas vraiment chaud pour cette histoire : « Certaines personnes ont plus le goût de la panthéonisation que moi. Car je pense que la reconnaissance nationale n'a pas besoin de pompe et je suis sûr que Camus n'aurait pas aimé cette pompe-là. »
Et le président du MoDem de déclarer à l'AFP que « le pouvoir politique, et spécialement ce pouvoir-là, a tendance à trop manipuler les symboles et fait du sentiment profond de la nation un matériel de communication ». Évoquant une récupération gênante, et une manipulation politique, François n'en reste pas moins un fervent admirateur de Camus, mais voilà, le Panthéon, a « quelque chose de trop solennel et froid pour des sensibilités aussi chaleureuses ».
Pas besoin de mise en scène, comme pour l'amour, il assure considérer « le Panthéon comme un cauchemar, je préfère les cimetières ensoleillés ». Et pourquoi pas un cimetière marin, pendant qu'on y est...
Michel Onfray online !
Du côté de BibliObs, on s'est offert les réflexions de Michel Onfray pour quelques questions sur Camus et notamment comprendre la notoriété aujourd'hui. « Nous sommes sortis de l'ère idéologique, qui fut celle de la violence révolutionnaire, du terrorisme, du mensonge, de la mauvaise foi, du compagnonnage avec les totalitarismes, de la justification des camps, du goulag. Avant tout le monde, Camus avait critiqué cette passion pour la mort. »
Mais la passion, celle du président, soudaine et inédite pour un homme n'ayant jamais vraiment manifesté de goût particulier pour les lettres et l'esprit ?
Quand Bush & Sarkozy le citent, on peut imaginer qu'ils obéissent à un cabinet de communicants... Mais pareillement pour Rocard... Lisons-le, on y trouvera un libertaire irrécupérable : la gauche et la droite en prenaient pour leur grade, il pensait par-delà ces catégories en visant la justice sociale incarnée et non l'idée de justice. Voilà pourquoi il peut tant plaire : il ne relève ni de la politique politicienne, ni de la politique spectacle, ni de la politique à papa (vieille droite contre vieille gauche), ni de la politique idéaliste (celle des Normaliens...), mais de la révolte aux côtés des opprimés, des exploités, des sans-grade, des victimes de l'Histoire...
(Désolé pour cette longue citation, Grégoire...)
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