Le 10/08/2010 à 10:35 par Clément Solym
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10/08/2010 à 10:35
Quoi qu’il en soit, les mémoires de Tony Blair, The Journey (Le Voyage) ne passeront pas inaperçues. L’homme a marqué l’histoire anglaise : en 1997, il remporte la plus large victoire du Parti Travailliste (New Labour) aux élections pour le poste de premier ministre.
Il y fera trois mandats, deux guerres, et un processus de paix (Irlande du Nord) couronné de succès. Dans l’histoire anglaise, le « vicaire » comme il était surnommé à cause de son ton messianique, restera sans doute comme l’égal de Thatcher, côté opposé.
Ce n’est pourtant pas pour cela que la parution de ses mémoires s'attire les foudres, mais plutôt pour son prix. Si l'édition « de base » est à 25 £ (30 €), sa maison d'édition, Random House, en propose une pour la bagatelle de 150 £ (180 €) ! Prix évidemment justifié par la signature de l'ancien premier ministre, par la rareté de l'édition, et par sa présentation « unique ».
Pas aux yeux de tous cependant : Charlie Whelan, ex-conseiller de Gordon Brown : « je serais bien plus heureux s'il donnait l'argent au Parti travailliste ». Le livre est au final conçu pour le marché américain, l'auteur étant bien plus populaire dans les colonies que sur le sol de la mère patrie.
Même la forme du pavé (624 pages) fait grincer. Il faut reconnaître que l'ouvrage a un côté biblique, tant par sa taille, que par sa forme ou encore le rouge « cardinal » dont il est paré. Sans oublier le nom de l'auteur et le titre en grosses lettres dorées. Connaissant le plaisir que trouvent nos confrères anglais à la critique acidulée, une telle présentation était un pari osé pour celui dont les discours « évangéliques » ont toujours été critiqués.
Tony Blair aurait-il la mémoire sélective ?
Surtout que le livre ne tient pas vraiment de la confession. Tony Blair, lui, le pense : « c'est un bilan franc de ma vie politique […] qui retrace les décisions difficiles, les hauts et les bas » mais il est bien le seul. Dans la vidéo promotionnelle du livre (c'est beau le progrès inutile) l'anglais se montre à son avantage : l'entrée au 10 Downing Street sous les acclamations de la foule, des plans avec trois présidents américains (Clinton, Bush Jr et Barack Obama). Son successeur, Mr Brown, n'apparaît qu'une fois, et les émeutiers anti-guerre, jamais.
Le problème de Tony aura peut-être été, finalement, de se déconnecter de la planète Terre. Disons au moins de la belle Albion, même si en anglais c'est un synonyme. S'il était à jour, donc, ce cher Tony, il aurait remarqué qu'Amazon, la semaine dernière, avait lancé le livre numérique à 2 £ au pays de la rose rouge.
150 £ le livre, la semaine qui suit, c'est soit de l'humour britannique auquel, c'est bien connu, nous sommes imperméables, soit une énorme boulette. Les 4,6 millions de livres sterling (je ne convertis pas en Euros, c'est indécent) touchés d'avance de la main de l'éditeur c'est... indécent. Surtout que Gordon Brown, successeur non charismatique, borgne et un brin ennuyeux, sort lui aussi son bouquin, les bénéfices étant reversés à des associations caritatives. Élémentaire, mon cher Tony.
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