L'écrivain nigérian Dillibe Onyeama a reçu des excuses qu'il n'attendait plus, celles du collège d'Eton, à Windsor, à l'ouest de Londres. L'établissement avait banni Onyeama en 1972, à la sortie de son livre Nigger at Eton, qui racontait le racisme qu'il avait subi au collège, pendant sa scolarité. Simon Henderson, l'actuel directeur du collège, assure que Dillibe Onyeama est désormais le bienvenu.
Le 29/06/2020 à 15:02 par Antoine Oury
Publié le :
29/06/2020 à 15:02
Fondé en 1440 par le roi Henri VI, le collège d'Eton est l'une des institutions scolaires les plus prestigieuses du Royaume-Uni, qui a notamment accueilli entre ses murs George Orwell, Aldous Huxley ou encore John Maynard Keynes. Dillibe Onyeama, futur écrivain, est entré dans l'établissement deux ans après Tokunbo Akintola, premier élève noir du collège.
En 1969, Dillibe Onyeama sera toutefois le premier élève noir à obtenir un certificat de fin d'études au collège d'Eton. Trois ans plus tard, il publie, à l'âge de 21 ans, le livre Nigger at Eton, dans lequel il raconte les difficultés rencontrées durant ses études, et notamment le racisme systématique qu'il subit pendant les 4 années passées au sein de l'institution.
« Combien d'asticots tu caches dans tes cheveux ? » et « Ta mère a un os dans le nez ? » faisaient partie des réflexions récurrentes lancées par les élèves, indiquait Onyeama dans son livre. Le collège d'Eton, auréolé de prestige accueille des enfants qui, la plupart, sont nés dans des familles bourgeoises, aux conditions aisées. Dillibe Onyeama lui-même est le fils d'un magistrat établi au Nigéria, colonie britannique jusqu'en 1960.
La parution du livre, en 1972, avait valu à Dillibe Onyeama d'être banni du collège d'Eton, avec interdiction formelle d'y remettre les pieds. Sorti diplômé d'une école de journalisme, Onyeama est retourné au Nigéria en 1981, où il a poursuivi sa carrière d'écrivain.
Près d'un demi-siècle plus tard, Simon Henderson, actuel directeur du collège d'Eton, a tenu à présenter les excuses de l'institution à l'ancien élève, au micro de la BBC : « Je suis consterné par le racisme que M. Onyeama a vécu à Eton. Le racisme n'a pas sa place dans une société civilisée, à l'époque comme maintenant. » Le directeur propose même d'accueillir Onyeama sur place, pour rompre l'interdiction d'accès qui lui était imposée.
L'écrivain nigérien, qui avait raconté son expérience dans le cadre d'une série de la BBC, a admis qu'il ne s'attendait pas à de telles excuses : « Je pense que ce n'était pas nécessaire. Je n'ai pas demandé ces excuses, je ne les attendais pas, je ne me suis pas battu pour. [...] Pour moi, vraiment, c'est un non-événement », explique Onyeama. Vivant au Nigéria, il n'a rien contre l'idée de revenir à Eton, mais précise qu'il faudrait alors lui « payer l'avion, l'hôtel et les frais de déplacement ».
Le livre d'Onyeama à l'origine de son exclusion, Nigger at Eton, est toujours disponible au Nigéria, et l'auteur assure qu'il ne changerait pas son titre, s'il devait être réimprimé au Royaume-Uni. « C'est symbolique. Je suis un auteur noir. Et je me sers de cela. C'est un mot que l'on m'a envoyé au visage. »
via BBC, The Guardian
Photographie : Eton College, Elliott Brown, CC BY 2.0
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