Pour ceux qui en doutaient encore, non, le monde du livre n'est pas moins sexiste qu'un autre secteur, comme le prouve ce sondage du Guardian opéré auprès d'employés de l'édition au Royaume-Uni. Au total, 92 réponses : 80 femmes et 12 hommes, travaillant tous dans l'édition. Et des témoignages qui révoltent.
Prof.lumacorno (CC BY-SA 4.0)
Voilà un sondage qui en dit beaucoup. Le sexisme existe aussi dans le monde de l'édition, on n'en doutait pas, mais les témoignages recueillis par le Guardian au Royaume-Uni n'en sont que plus inquiétants. En tout, 70 % des femmes interrogées considèrent avoir été traitées différemment au travail à cause de leur genre, contre 50 % des hommes ayant répondu au sondage.
« Un homme qui venait de se faire embaucher par mon entreprise, qui possédait le même niveau d'études et les mêmes missions que moi, gagnait 8 000 £ de plus que moi pour son salaire de départ », raconte l'une des femmes interrogées, qui admet que l'employé en question possédait effectivement plus d'expériences, mais se voit « insultée » par une différence de salaire aussi grande.
Au-delà du salaire, c'est même au niveau des postes proposés que les discriminations se font. « Il y a cette pensée que les femmes sont plus douées dans la création et l'art, mais n'ont pas le même sens des affaires que les hommes, et sont donc moins aptes à travailler dans la haute direction », témoigne l'une d'entre elles.
Et beaucoup se trouvent découragées, jusqu'à accepter la situation pour ce qu'elle est. L'un des hommes à avoir répondu au sondage raconte ainsi être chargé de mission par un homme, briefé par un homme, devoir faire ses rapports auprès d'un homme, côtoyer des techniciens hommes, tandis que la personne qui s'occupe du recrutement... est une femme.
Et bien sûr ressort l'éternel argument de la maternité... « On m'a demandé de but en blanc si j'avais prévu d'avoir des enfants ou non (bien que cette question soit illégale) pendant des entretiens et au travail. Je sais déjà que je perdrai tout respect ainsi que mon statut et mon poste si je pars en congé maternité », raconte un autre témoignage.
Dans les faits, les jeunes mères se retrouvent bien souvent mises en difficulté par leurs employeurs, y compris dans les grandes maisons d'édition. Les chargées d'édition en retour de congé maternité se voient ainsi confier moins de livres, sans que leurs objectifs de ventes changent pour autant ; certaines, moins chanceuses, sont même rétrogradées.
Dave O'Brien, spécialiste de l'industrie culturelle à l'université d'Édimbourg, explique que ces problèmes ne seront malheureusement pas résolus avant longtemps : « Il est certain que le temps seul n'arrangera pas les choses, et les entreprises doivent plus se pencher sur les raisons pour lesquelles les femmes n'accèdent pas à des postes plus élevés. »
En faisant attention toutefois : selon lui, il ne suffira pas d'embaucher plus de femmes, histoire de remplir les quotas, mais de considérer la notion de genre dans les mêmes termes que celles de classe sociale, de handicap ou d'origine ethnique. En résumé, ne pas prendre le problème à la légère, mais comme ce qu'il est : une question de discrimination.
Via The Guardian
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