Il y a quelques mois, une eurodéputée du Parti Pirate, Julia Reda, a proposé un rapport contenant quelques propositions pour une réforme du droit d'auteur en Europe. Depuis, le torchon brûle entre entre une partie de la chaîne du livre et la Commission, Reda et ses partisans. Un débat les réunira bientôt dans la même pièce.
Le 10/04/2015 à 13:19 par Antoine Oury
Publié le :
10/04/2015 à 13:19
Pierre Dutilleul au Salon du Livre de Paris 2014 (ActuaLitté, CC BY SA 2.0)
L'une des manifestations les plus marquantes de cette fracture entre ceux qui proposent, et ceux qui refusent avait pu être observée au Salon du Livre de Paris 2015. Une table ronde, « L'Europe croit-elle encore à sa culture », consacrée au droit d'auteur, s'était distinguée par l'absence flagrante de contradicteurs, et une parole libre assez limitée.
Un membre du Parti Pirate avait en effet essayé de faire passer un autre point de vue en force, et s'était vu promettre un temps de parole en fin de débat, qui sera finalement annulé. L'incident avait été capté en vidéo :
Maintenant que le grand raout du livre dans la capitale est un peu plus loin derrière nous, il est temps de relativiser. En modérateur du débat, Pierre Dutilleul, le président de la fédération européenne des éditeurs, s'était retrouvé bouc émissaire de cette absence de diversité et de liberté au sein du Salon du Livre de Paris. « Au Salon du Livre, je n'organisais rien, je n'ai pas choisi les invités, on m'a proposé de faire une sorte de modération. Et quand vous avez deux ministres et un commissaire européen, il est difficile de maîtriser le temps », nous explique-t-il. D'où l'absence d'un temps de parole en fin d'événement.
Néanmoins, un problème avait été identifié : le débat sur le droit d'auteur n'en était pas un, car chaque « camp », pirate ou industrie du livre, n'interroge finalement que ses partisans, et le mélange des opinions est difficile.
Au Salon du Livre, c'était évident : aucun représentant du Parti Pirate, aucun bibliothécaire, chercheur ou archiviste... Difficile de prétendre au titre de débat. De la même manière, un débat organisé ce matin par le Forum d'Avignon sur le droit d'auteur — à l'occasion duquel nous avons interrogé Pierre Dutilleul — reflétait aussi un certain manque de pluralité. Seules des interventions d'avocats spécialisés, du cabinet EY, ou de l'économiste François Benhamou, ont apporté quelques arguments contradictoires.
Signalons néanmoins que Julia Reda avait été invitée au Salon du Livre pour le débat sur le droit d'auteur, mais qu'elle n'a pas pu s'y rendre, comme le rappelle Pierre Dutilleul.
Les membres du Parti Pirate présents au Salon du Livre de Paris sont restés en contact avec le président de la fédération européenne des éditeurs, et l'idée d'un véritable débat fait son chemin. « Nous n'avons pas encore formalisé cette rencontre, mais nous allons la faire. Nous souhaitons organiser ce débat de manière à ce qui y est dit puisse être reproduit, et dans un délai convenable par rapport à celui de la Commission [l'échéance de la réforme est située à l'automne prochain, NdR]. »
Pas de lieu pour l'instant donc, mais une véritable volonté d'organiser « une discussion au pluriel », souligne Pierre Dutilleul. Vincent Montagne, président du Syndicat national de l'édition, se serait montré très volontaire à l'idée d'un tel débat. Rayon invités, un photographe, un illustrateur, mais aussi un bibliothécaire ou un chercheur pourraient prendre place autour de la table. Un représentant des autorités européennes pourrait aussi se joindre à la discussion.
« Cela permettrait d'avoir une parole libre, sereine, décontractée et diverse », assure le président de la Fédération européenne des éditeurs. Le rendez-vous est pris.
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