Frédéric accompagne son ami Raoul ainsi que la sœur de celui-ci, en Russie.
Raoul est un peintre parisien en vue qu’Irina, qui tient une galerie d’art à Moscou, a invité afin d’assurer la promotion de l’exposition de ses œuvres dont le vernissage ne peut, à ses yeux, que bénéficier de la réputation sulfureuse d’homosexualité notoire qui précède l’artiste.
Frédéric, russophile averti et érudit, entend profiter de ce voyage pour compléter des recherches sur Gorki.
Irina, symbole de l’ouverture du bloc de l’Est aux valeurs de l’Ouest, dynamique et entreprenante, est fondamentalement aux antipodes de Iermolaï, son frère, peintre lui aussi, introverti et délibérément à contre courant de la mode artistique dont sa sœur fait son fonds de commerce.
Dominique FERNANDEZ se joue des ses cinq personnages que tout rassemble et tout sépare et en profite pour nous régaler de quelques magnifiques détours culturels au sein d’une Russie qu’il maîtrise à la perfection tant dans son Histoire que dans ses évolutions politiques, sociales et culturelles les plus récentes.
C’est un plaisir d’imaginer, de voir ou de revoir, par son écriture, les rues et les quartiers de Moscou et de Saint-Pétersbourg, d’y visiter des rues, des monuments, des halls d’hôtel ou des maisons transformées en musées.
Plaisir aussi que de l’écouter évoquer au hasard des pages les artistes russes connus ou oubliés. De Maïakovski à Chostakovitch. D’Akhmatova à Pouchkine. De Tchaïkovski à Pasternak. De tant d’autres simplement esquissés, caricaturés ou simplement banals. Il mélange habilement vérités historiques et propagande politique, âme russe et relents soviétiques.
Alors pourquoi a-t-il fallu qu’il n’accorde pas de foi au fait que l’accès à son érudition puisse être suffisante pour gorger d’intérêt son récit et qu’il se sente obligé d’y coller en surimpression une histoire d’homosexualité débridée dans laquelle je en suis pas sûr que nombreux seront ceux qui s’y reconnaîtront ?
Comment peut-il vouloir nous faire croire qu’un amour vrai et profond, partagé et durable entre deux êtres, peut se forger , pour l’un, à partir d’une simple photographie alors qu’il est, par ailleurs, décrit comme un boulimique sans retenue ni tabou, pour l’autre, à partir de la seule perception d’une auréole de gloire précédant un artiste en vogue, même s’il lui est possible, artistiquement, de ressentir l’âme qui s’exprime derrière les couleurs d’une toile ?
Et alors qu’il s’escrime à nous expliquer que le rapport culturel à l’amour et au sexe a bien évolué au cours des siècles passés (à un point tel, selon lui, qu’il ne ferait aucun doute quant au fait que Madame de Mortsauf céderait sans aucun scrupule, aujourd’hui, à Félix de Vandenesse : Honoré, tu dois te retourner dans ta tombe !), le voilà qui nous assène tout d’un coup une virevoltante rédemption par l’épreuve, entre autres, de l’abstinence pleinement acceptée et du romantisme le plus éculé.
Non ! Cela a trop de mal à tenir debout.
J’aurais préféré le suivre plus longuement dans une ballade initiatique sur les bords de la Moskova.