Le Forum de Chaillot, dérivé du Forum d'Avignon qui se tient chaque année en novembre dans la cité des Papes, a poursuivi les réflexions que ce dernier développe à chaque édition. Invités prestigieux, hauts responsables culturels et ministres européens se sont retrouvés pour débattre joyeusement. Toutefois, un léger malaise s'est fait ressentir avec l'arrivée, et le blocage, des intermittents devant le théâtre, ce vendredi.
Le 07/04/2014 à 14:11 par Antoine Oury
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07/04/2014 à 14:11
Les intermittents au Forum de Chaillot, vendredi 4 avril 2014 (ActuaLitté, CC BY-SA 2.0)
Dès le début de l'après-midi, alors que l'arrivée du président François Hollande était connue de tous à l'intérieur du bâtiment, des slogans revendicatifs se sont fait entendre à l'extérieur du Théâtre. Le gros des manifestants, pour la plupart intermittents ou futurs intermittents, a rapidement été encerclé par les forces de l'ordre présentes. Le tout s'est fait sans violence, les manifestants étant plutôt pacifiques, mais les touristes juchés sur les bus auront eu un bel aperçu de la démocratie française, sans aucun doute.
Quatre heures plus tard, les manifestants sont toujours encerclés, avec impossibilité, y compris pour la presse, de se rapprocher pour poser quelques questions. Entre-temps, Denis Gravouil, secrétaire général de la CGT-Spectacle, est parvenu à s'introduire dans une conférence pour relayer les revendications des manifestants, moquant quelque peu les fastes de Chaillot : « C'est intéressant de faire des grands discours, mais si les budgets sont coupés comme en Irlande de 30%, en Croatie de 50% ou baissés comme en France, on aboutit à des problèmes d'emploi et de service public de la culture », relaie l'AFP.
Au premier plan, parmi ses revendications, on trouve le délai dans le versement de l'indemnisation (distinguée du versement des droits des intermittents), qui fait craindre aux intermittents des mois encore un peu plus difficiles.
Derrière le cordon de policiers, une jeune intermittente nous explique : « Nous critiquons l'accord récent signé par tous les syndicats avec le MEDEF, à partir des seules propositions du MEDEF. Il s'agit du plus court accord patronal de l'histoire, en vigueur pour 18 mois seulement. » Un délai ridicule qui fait craindre aux intermittents, dans un an et demi, de nouvelles remises en cause de leurs acquis.
(ActuaLitté, CC BY-SA 2.0)
Par ailleurs, l'accord dit « Unédic », nom de l'organisme d'assurance chômage, fait jaser, dans la mesure où il n'a été signé que par trois organisations syndicales, CFDT, FO et la CFTC, clairement perçues comme des vendus dans les rangs des manifestants. « Ils ont négocié en douce, dans les couloirs, avec le MEDEF, seule la CGT était à la table. L'accord semble majoritaire, mais dans le désintérêt de tous les travailleurs. » La CGC avait signé l'accord, mais a retiré entre-temps sa signature.
Le ministère du Travail doit encore valider les accords, et les manifestants sont formels : « L'État ne doit pas signer cet accord, qui ne prend pas en compte les propositions du comité de suivi parlementaire formé en 2004, et dont les propositions ont été publiées en 2006. » Les directeurs de théâtres présents ont eux aussi vilipendé l'attitude du gouvernement vis-à-vis de cet accord.
« Nous avons voulu montrer que les travailleurs de la culture sont mis de côté pendant le colloque. Nous avons été punis par une hausse des cotisations sociales, les chômeurs et les intérimaires ont perdu de 50 à 300 €. » La ministre de la Culture Aurélie Filippetti a été forcée de réagir après le coup d'éclat : « J'ai demandé une étude d'impact par mes services, et au vu des résultats de cette étude d'impact, j'ai convenu avec François Rebsamen qu'on va se voir extrêmement rapidement pour pouvoir en tirer les conséquences, et le cas échéant alerter les partenaires sociaux sur les conséquences dramatiques que cela pourrait avoir sur certains artistes ou certains techniciens », explique-t-elle.
François Rebsamen, nouveau ministre du Travail, hérite donc d'un dossier plutôt brûlant pour ses débuts... Mais qu'il connaît déjà, puisqu'il annonçait sur son site, pour les municipales, « Pas touche au statut d'intermittent »... Reste à voir ce que va devenir la promesse électorale, à l'épreuve du ministère...
Par Antoine Oury
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