Contrition

Keko, Carlos Portela Orjales, Carlos Portela

Les Etats-Unis sont un pays qui fascine, autant par leur grandeur que par la petitesse de certaines de leurs décisions de justice, qui semblent n'entretenir qu'un rapport très distant avec les réalités humaines.

Ainsi en va-t-il des condamnations à plusieurs siècles d'incarcération prononcées à l'encontre de certains malfaiteurs ou de l'interdiction de vivre à proximité d'écoles pour les pédophiles, qui a pour conséquence de bannir les condamnés de presque tout le territoire. Sauf qu'existe en Floride  un bled sans établissement scolaire où vont s'établir tous les pédo-criminels et harceleurs condamnés par les tribunaux.

C'est dans cet étrange village, horriblement dénommé Contrition, que se déroule l'album éponyme. On y suit des personnages faibles, abattus, dont on ne sait s'ils se perçoivent comme des victimes ou des bourreaux repentis. C'est là que réside l'habileté du scénario de Carlos Portela : mettre en suspens le jugement moral des lecteurs, le temps de comprendre, ou de deviner qui est qui et qui a fait quoi. Un sujet terrible, traité avec toute la noirceur et la finesse qu'il mérite. 

Il faut une fois de plus souligner la maîtrise du desin en noir et blanc de Keko (A qui l'on doit laussi le dessin de a trilogie Moi, assassin, Moi, fou et Moi, menteur, tout trois publiés également en VF par Denoël Graphic). L'ambiance de cet album, pesante, ralentie, mortifère, lui doit beaucoup. Et ses gueules abîmées, ses visages fermés, concrétisent parfaitement ces incarcération à l'air libre qui ressemblent à un confinement éternel.

Sur ce sujet difficile, bien des auteurs se seraient contentés d'un récit documentaire, mettant en image le réel pour laisser aux  lecteurs le soin de porter leur jugement  L'idée forte de cet excellent Contrition est justement de passer par l'imaginaire pour stimuler l'empathie et la sidération chez celles et ceux qui pendront le temps de partir à la découverte de cette bourgade qui a des airs de purgatoire terrestre. A ne pas laisser passer.

Une michronique de
Nicolas Ancion

Publiée le
13/11/2023 à 10:51

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Contrition

Keko, Carlos Portela Orjales, Carlos Portela trad. Alexandra Carrasco

Paru le 22/03/2023

168 pages

Editions Denoël

25,00 €