: M. Blunden, bonjour, vous êtes directeur de la communication chez Hachette livres : voilà quelques jours, nous apprenions qu’Hachette UK et Amazon UK connaissaient quelques tensions . Qu’en est-il exactement ?
Ronald Blunden : Eh bien, oui. Il y a actuellement des négociations ardues entre Amazon UK et Hachette UK, et même pourrait-on dire assez difficiles. Mais il ne s’agit pas seulement d’Hachette. Aujourd’hui, du fait de sa montée en puissance récente et spectaculaire, de ses parts de marché [NdR : plus de 10 % en Angleterre] et de son taux de progression [NdR : entre 20 et 25 %], le cyberlibraire demande en effet des remises à la hauteur de ses prétentions. Et forcément, ça crée des tensions. [NdR : le montant des négociations n’a pas été dévoilé].
« Aujourd’hui, du fait de sa montée en puissance récente et spectaculaire,
le cyberlibraire demande des remises à la hauteur de ses prétentions. »
Cela a mené pour le moment au retrait de la page de vente de certains auteurs, comme Kate Mosse, dont on ne peut plus acheter les livres neufs, édités par Hachette UK, mais simplement les exemplaires d’occasion proposés par les clients d’Amazon UK. Bien évidemment, les auteurs s’inquiètent de la situation.
ActuaLitté : Quels sont les enjeux entre Amazon et les éditeurs ?
Ronald Blunden : Voilà, en Angleterre, il s’agit d’acheter le moins cher possible pour pouvoir vendre le moins cher possible. Je vous rappelle qu’en Angleterre, le livre ne dispose pas d’un prix unique comme en France. Aux États-Unis, c’est un autre problème que rencontrent les éditeurs : il s’agit des coûts de fabrication. L’apparition du service de Print on Demand, par lequel on est obligé de passer pour certains livres [NdR : il s’agit de BookSurge], sous peine de voir disparaître son livre des étals d’Amazon pose des questions plus inquiétantes encore.
ActuaLitté : Aujourd’hui, certains redoutent qu’Amazon ne perce directement dans le monde de l’édition et bouleverse quelque peu le milieu (voir notre dossier). Qu’en pensez-vous ?
Ronald Blunden : Cette crainte n’est pas absurde et peut aisément se comprendre. Simplement, il faut rappeler que le métier d’éditeur ne se résume absolument pas à prendre un livre, le mettre en ligne et le rendre disponible, à travers un service d’impression à la demande. En ce sens, Amazon ne sera pas éditeur de sitôt.
« Le métier d’éditeur ne se résume pas à prendre un livre, le mettre en ligne
et le rendre disponible, à travers un service d’impression à la demande. »
En revanche, il existe une possibilité qui n’a pas encore été envisagée. Amazon pourrait réaliser un contrat d’exclusivité avec un auteur en proposant un contrat sur le prochain livre d’un auteur déjà confirmé. Vous savez, un auteur de best-seller, c’est parfois un investissement d’une dizaine d’années, il ne sort pas de nulle part. Aussi, Amazon ne peut en créer tel quel. Mais en offrant une somme forte, contre mettons trois mois d’exclusivité, on pourrait voir se créer des buzz médiatiques.
Reste que les agents n’ont pas intérêt à ce que cela arrive, étant donné que leur auteur pourrait se brouiller avec les éditeurs réguliers. Mais cette situation n’est peut-être pas à exclure des prochaines initiatives d’Amazon.
ActuaLitté : L’issue de cette situation se profile ?
Ronald Blunden : (rires) Eh bien, non pour le moment, nous n’avons aucune information sur ce point.
ActuaLitté : Merci de nous avoir répondu.
Ronald Blunden : Je vous en prie, excellente fin de journée.