de Camus ? Un mauvais souvenir ! Je ne sais s'il est toujours au programme des lycées de nos jours, mais je me revois l'achetant, le lisant à peine et n'y comprenant rien. Combien les livres d'Arthur C. Clarke, Robert Sheckley et Philip K. Dick m'intéressent plus à cette époque !!!
chronique BD avec BDfugue
Aujourd'hui paraît L'étranger (Gallimard) adapté par Jacques Ferrandez : c'est magnifique et cela me donne envie de lire - enfin - le roman... Camus et Ferrandez ? Une association qui tombe sous le sens ! Camus passe son enfance et son adolescence dans le quartier populaire de Belcourt à Alger, ce quartier où les grands-parents de Jacques Ferrandez ont un magasin de chaussures et où lui-même voit le jour.
En guise de tour de chauffe, Ferrandez met en images il y a quelques années L'hôte (Gallimard). Cette courte nouvelle faite de peu de mots se déroule au temps de la guerre d'Algérie, pendant laquelle un instituteur français se dresse contre l'arbitraire et le mur de la haine. En vain... Avec L'étranger, Jacques Ferrandez ose ce défi classique et redoutable qui est de mettre un visage sur un nom mythique : Meursault.
Une figure légendaire dans la littérature française, crée par Albert Camus alors jeune écrivain. Ferrandez choisit d'accentuer les points communs entre Meursault et Camus et de représenter son personnage avec un physique juvénile, adolescent presque, mais sans rien de saillant.
Un employé de bureau dont le quotidien est sans grand relief, mais dont la vie bascule lorsqu'il tue d'un coup de revolver un arabe armé d'un couteau. Il est condamné à mort à la suite d'un procès où on lui reproche surtout d'être différent, de ne pas se comporter comme tout le monde, de ne pas être "comme il faut". Étranger à ceux qui l'entourent, étranger à lui-même, Meursault ne pleure pas à l'enterrement de sa mère, ose dire à une femme qu'il n'en est pas amoureux parce que... parce que c'est la vérité, tout simplement !
L'étranger d'Albert Camus
adaptation Ferrandez
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Mais il veut bien se marier avec elle. Si cela lui fait plaisir... Il ne fait jamais semblant d'être intéressé par ce qu'on lui dit et se moque de ce que pensent les autres. Les conventions sociales, le respect de la famille et de la religion, tout cela lui semble absurde.
Le texte original est en voix off et à la première personne, mais se prête à l'adaptation sous forme de dialogues et d'une mise en images, car il est descriptif et précis. L'histoire est en deux parties, l'une saturée de lumière et l'autre plongée dans les ténèbres.
Le soleil qui rayonne sur Alger est source de vie, il rend les femmes plus belles et la mer plus bleue. Mais il accable de chaleur Meursault qui tue dans un état second, aveuglé dans tous les sens du terme. L'obscurité s'abat dès lors... Après la pénombre du tribunal, le noir de la cellule.
Ferrandez réussit à donner une formidable intensité aux scènes emblématiques du récit : la veillée du cercueil de la mère, la confrontation avec le juge, l'attente de l'exécution avec l'explosion de colère suite aux propos du prêtre. Bien sûr, la scène du meurtre, si particulière, oh combien difficile à représenter. Et il a des intuitions brillantes !
Le film que vont voir Meursault et son amie n'est pas nommé dans le roman, mais Ferrandez choisit "Le Schpountz" et plus précisément la scène où Fernandel prononce de différentes manières la phrase "Tout condamné à mort aura la tête tranchée ". Quand on connaît la suite des évènements, c'est drôle et glaçant à la fois...
{CARROUSEL}