C'est dans un entretien exclusif accordé à Repubblica, que l'écrivain Roberto Saviano, s'estimant prisonnier de son livre Gomorra, se voit contraint de quitter son pays. « Je quitte l'Italie pour avoir une vie », confie-t-il. Partir loin d'ici pour une longue période, ensuite ont verra, estime l'auteur. Hier, Roberto apprenait en effet que la famille Casalesi avait pointé sur lui un contrat qui devait le faire disparaître avant Noël.
Très critique à son propre égard, il a longtemps estimé que céder à l'appel de la fuite serait une mauvaise idée. « Rien à foutre du succès, je veux une vie. Je veux une maison. Je veux des amis, boire des bières dans des endroits publics, aller à la bibliothèque et choisir un livre juste par sa quatrième de couverture. Je veux marcher, prendre un bain de soleil, me balader sous la pluie, répondre sans peur ni angoisse à ma mère. »
Rien que du très compréhensible. Aujourd'hui accompagné en permanence par une équipe de carabiniers assurant sa sécurité, il considère que cette vie l'a rendu odieux et soupçonneux en permanence. Et regardant vers son passé, il ne voit qu'un amas de ruines sur lesquelles il ne peut plus rien reconstruire. « Mais quel est mon crime aujourd'hui ? Ne pas avoir envie de vivre comme un prisonnier, un lépreux, subir une vie cachée du monde des hommes ? »
Lui qui voulait juste raconter une histoire, ne peut « pas même louer une maison à Naples » parce que les gens ont peur de vivre dans son entourage. Symbole de la résistance contre la Camorra ? Certes, mais il baisse les bras. Pourtant, il est conscient de son rôle et de la confiance que les gens lui portent. « Vous savez, aucun d'entre eux [les carabiniers qui le protègent] ne m'a demandé à être démis de ses fonctions après la révélation d'hier. »
Qui oserait pourtant lui jeter la première pierre ?