Cinq femmes chinoises

Il en est des écrivains comme des peintres.

Certains, en quelques coups de pinceau majestueux mais minimalistes sont capables de faire apparaître un portrait qu'une photographie , dans ses mille détails, n'aurait jamais réussi à rendre aussi suggestif, aussi expressif aussi explicitement représentatif.

Les seize petits textes que  propose dans ce recueil sont de cette veine.

En quelques mots, quelques images, quelques bribes d'une scène ou d'une situation, il dresse des portraits pleins de tendresse, d'humanité, d'humour ou de sensualité qui laissent le lecteur totalement libre de faire voguer son imagination sur un océan de possibles.

C'est tout un monde de poésie qui s'ouvre à chaque nouveau texte. Et c'est normal car Mihàlis GANAS est avant tout un poète qui s'essaie à la prose (n'allez pas croire que je suis un spécialiste de Mihàlis GANAS. Non. Juste quelqu'un qui vient de le découvrir et de goûter ses textes. Le spécialiste, c'est Michel VOLKOVITCH, le traducteur, qui, lui, visiblement, connaît bien son auteur et qui m'a apporté cette précision).

N'empêche ! C'est bien de la poésie (en prose) qui transpire à chaque ligne. Quand Mihàlis GANAS évoque cette vieille dame et son chien dont on ne saurait jurer de qui promène l'autre. Quand il laisse rêver cette autre vieille femme au jour où elle pourra enfin reprendre ses parlottes avec ses amies depuis trop longtemps disparues.

Quand il fume cigarette sur cigarette, dans la voiture avec Pétros qui, après toutes ces années, pense encore à Anna. Quand il nous provoque notre songerie devant ces épaules nues entrevues au travers des lames d'un store.

Des instants de vie fugaces que prolonge le libre cours donné à une rêverie sans fin.

Délicieux !

Ca vous est déjà arrivé d'avoir un secret génial et de ne pas pouvoir en parler ? Oui, hein ? Eh bien, Basile aussi. Tout le monde pense que c'est un petit garçon sage comme il y en a tant d'autre au village de Montmouton. Mais Basile a un secret. Et c'est tellement secret que je ne sais pas si j'ai le droit de vous en parler. Bon, parce que c'est vous… mais chuuut !!!! Donc, Basile est un …magicien. Eh oui ! Mais il ne peut en parler à personne, sinon il sera aussitôt maudit ! Personne n'est au courant, à part sa tante Henriette, mais elle c'est une fée, alors c'est normal. C'est d'ailleurs elle qui lui a appris la fameuse formule magique indispensable pour réaliser un tour… Mais Basile n'est pas très doué, et commet boulette sur boulette en faisant ses sorts.

Entre Harry Potter et le Petit Nicolas, , c'est un roman qui se lit comme des petites histoires, toutes plus imaginatives les unes que les autres ! Des petites histoires ou des gros chapitres, c'est comme on veut. Tout le monde avance à son rythme, au gré des illustrations qui parsèment ce « gros livre pour petites mains ». Illustré, mais attention, pas trop….parce qu'un roman comme ça, c'est fait pour lire comme les grands !

Tandis qu'une seconde porte s'ouvre au Pérou, deux jumeaux télépathes, Jamie et Scott, sont enlevés à Las Vegas. Seul Jamie réussi à s'échapper. Il n'a plus qu'une idée en tête : retrouver son frère, retenu par Nightrise, une société étrange qui séquestre des enfants dits spéciaux. Mais ce qui est plus étrange encore ? Ce sont les rêves que fait Jamie et où quatre adolescents venus d'un autre monde semblent l'appeler … »

Petit récapitulatif pour ceux qui aiment bien comprendre : Anthony Horowitz a écrit, il y a une quinzaine d'année, une série intitulée en quatre volumes. Désirant la remettre au gout du jour, l'auteur a décidé de transformer sa série en incorporant une nouvelle héroïne ce qui va entrainer de nombreuses modifications de l'histoire. Ce volume est complètement inédit.
Pendant que Matt empêche la deuxième porte de s'ouvrir (voir les deux premier tome) et découvre les premières clés de l'histoire, Jamie risque sa vie pour retrouver son frère. Sa quête va l'entrainer dans le passé où il lui faut trouver sa place pour pouvoir sauver le monde car la lutte des Cinq contre les Anciens est ancestrale et sans fin. Mais depuis le jour de l'accident, Jamie refuse de se servir de son pouvoir, il ne fait exception qu'avec son frère. Pour le récupérer il va devoir apprendre à se servir de son don même contre son propre sang. Sa route sera parsemée de difficultés qu'il surmontera grâce à l'aide de nombreuses personnes et certains secrets seront enfin dévoilés.
Les fans sont comblés en ce début d'année avec la sortie de deux Horowitz presque simultanément. Comme d'habitude chez cet auteur, les évènements s'enchainent à toute vitesse et l'intrigue tient en haleine.

L’essai Les femmes de l’ombre de l’historien, journaliste et enseignant Rémi Kauffer vous entraîne sur les traces des espionnes qui ont fait [et défait, si l’on peut dire] l’Histoire. Du XVIIe siècle à aujourd’hui, l’on découvre, redécouvre, des femmes fascinantes et fatalement intrigantes !

Certaines vous rappelleront des héroïnes de romans de Dumas, nous commençons d’ailleurs ici par Milady. Saviez-vous qu’elle avait été inspirée par une femme bien réelle ?

Pour vous le MI 6 est peuplé de Sean Connery, Roger Moore ou encore Daniel Craig ? Vous êtes loin du compte.

Mais la vraie question qui est ici posée est pourquoi parlons-nous moins du rôle des espionnes que de celui des espions. Rémi Kauffer étaye son propos et travaille à les sortir de l’ombre en toute objectivité car nous sommes évidemment bien loin du roman d’aventure… enfin le plus souvent.

C’est succulent du début à la fin alors évidemment #actualitteaime !

Ps : arrêtez-vous sur la bibliographie, elle vaut le coup d’œil

Dans Mon papa dessine des femmes nues, Philippe Dupuy s’interroge sur sa paternité tardive, sur les angoisses liées à l’effondrement annoncée du monde ou encore sur la nudité dans l’art. Son jeune fils Hyppolite, dont les dessins apparaissent au fil des pages, se révèle progressivement la figure centrale de ces réflexions : quand le regard vers soi se fond dans l’observation de l’autre.

L'auteur travaille alors à une introspection poétique faite de notes et anecdotes où se mêlent des récits de vie, des extraits de carnets de voyage, des reproductions d'oeuvres d'art ou encore des développements plus littéraires ou existentiels.

Il dessine librement, laissant les repentir de sa planche comme autant de détails graphiques qui donnent à voir l’acte même de création dans toute sa spontanéité, dans toute sa joie de voir l'image se révéler progressivement, attentif à la beauté des scories et déraillements imprévus qui donnent son âme au dessin.

Il utilise différents outils pour différents rendus qui mobilisent incidemment différentes modalités de lecture : l'oeil est sans cesse sollicité, invité à parcourir la page en suivant des rythmes variés, des espaces immersifs disparates et d'autant plus prégnants. Les planches se révèlent ainsi pleines de vie et introduisent à une forme d'intimité plastique.

Mon papa dessine des femmes nues est un album aussi beau que touchant, d’une grande sincérité, d’un lyrisme rare, réalisé avec un plaisir et une nécessité palpables qui se fondent en une lecture éminemment sensible.

Le festival d'Angoulême fut un moment exaltant durant lequel j'ai eu la chance de rencontrer des auteur.ices pour enregistrer de beaux podcast. En attendant leur mise en ligne, vous pourrez retrouver celui-ci, réalisé avec Philippe Dupuy il y a quelques mois. Nous avions passé un très beau moment à discuter de dessin et de son dernier album (le lien vers le podcast est en bio). Un grand merci à l'auteur pour ce temps d'échange, comme suspendu.

Philippe Dupuy est un dessinateur passionnant à deux visages. Le public le connaît bien pour les albums de bandes dessinées qu’il a dessinés en collaboration avec son acolyte Charles Berberian, dont les séries Le journal d’Henriette et Monsieur Jean comptent parmi des classiques aujourd’hui. Mais depuis une quinzaine d'années, il développe une carrière solo plus expérimentale, tournée vers une approche sensible du dessin.  

Alternant des albums poétiques scénarisés par Loo Hui Phang et d’autres plus introspectifs dans lesquels il explore son rapport à la création et sa fascination pour l’histoire de l’art, il sort dans la collection Aire Libre des éditions Dupuis un nouveau livre plus autobiographique, intimiste et extrêmement touchant. 

Dans Mon papa dessine des femmes nues, l’auteur s’interroge sur sa paternité tardive, sur les angoisses liées à l’effondrement annoncée du monde ou encore sur la nudité dans l’art. Son fils Hyppolite, dont les dessins apparaissent au fil des pages, est la figure centrale de ces réflexions, ou quand le regard vers soi se fond dans l’observation de l’autre. 

Philippe Dupuy dessine librement, laissant les repentir de sa planche comme autant de détails graphiques qui donnent à voir l’acte même de création dans toute sa spontanéité, dans toute sa joie de création. Mon papa dessine des femmes nues est un album magnifique d’une grande sincérité, d’une rare poésie, réalisé avec un plaisir et une nécessité palpables qui se fondent en une lecture éminemment sensible.

Dix petits bijoux minimalistes et pourtant immenses.

Faire jaillir de si merveilleux textes, si profondément humains, si sobrement terribles relève d'un art consommé.

J'ai souvent dit que j'étais assez réticent face à ce type d'ouvrage – la nouvelle - où les mots semblent économisés, où l'auteur paraît avoir fait preuve de paresse en ne développant pas plus des idées souvent magnifiques. Là, je suis tombé sous le charme ! Un mot de plus serait un mot de trop.

Et, bien que ne parlant nullement portugais, je me suis essayé à lire le texte originel (il s'agit d'une édition bilingue). J'ai senti, malgré toute mon ignorance, la proximité de la traduction avec les mots de l'auteur, toute la musique des textes conservée dans cette transcription à quatre mains.

C'est une bien belle performance.

Car Suleiman CASSAMO est un griot et un poète.

Ses textes puisent leur âme dans la terre de ses ancêtres, dans les difficultés d'une société en mutation, à mi-chemin entre les anciennes traditions et la modernité, entre les femmes qui portaient le bébé sur le dos et un énorme colis sur la tête et les filles qui fument et portent des jeans.

Car les femmes sont au cœur de chaque histoire : filles mariées – quasi vendues en échange d'un « lobolo », une dot - en dehors de leur consentement, femmes au foyer, mères protectrices. Elles sont partout présentes. Sur elles reposent la vie et l'avenir. Vénérées ou battues, victorieuses ou soumises, elles sont au centre de tout.

Et les nouvelles de Suleiman CASSAMO leur sont un chant de gloire, de dévotion, d'estime et de tendresse qui se lit avec humilité, respect et, pour ma part, beaucoup d'admiration

Quel bonheur ! Anna et Froga sont de retour, en version longue. Cinq albums et une historiette bonus sous une seule reliure : les éditions Sarbacane nous gâtent.

Pour une fois, une publication en intégrale n'est pas réservée à une série qui cartonne en tête de gondole ou à de vieux albums qu'on cherche à revendre aux mêmes collectionneurs qui les ont déjà achetés deux ou trois fois dans d'autres formats. Ici, c'est le meilleur de la BD d'humour pour enfants qui est proposé en dose massive.

Ceci dit, sans figurer dans les premières places des gros vendeurs en supermarchés, Anna et Froga connaissent un vrai succès auprès des lecteurs (les plus vieux comme les plus jeunes, en France comme au bout du monde). Mais cet engouement, la grenouille et sa copine ne le doivent ni à un marketing tapageur ni à l'application de recettes lues cent fois ailleurs.

Bien au contraire.

Depuis cinq albums, Anouk Ricard nous a rendu familier son univers frappadingue. Les héros de ses aventures sont Anna, une petite fille à frange et robe rouge, sans famille ni parents, dont les compagnons sont Froga, une grenouille en bottes en caoutchouc, Christophe, un ver de terre rose à gros yeux et René, un chat abruti, vêtu d'un seul t-shirt bleu.

 Et j'allais oublier Bubu, un chien de bonne famille, qui se vante à longueur de planches, n'est doué pour rien, mais possède le matériel dernier cri pour pratiquer toutes les activités dans lesquelles il expose sa nullité intégrale : tennis, golf, camping. Comptez sur lui pour assurer l'ambiance.

Les personnages sont déjà bien barrés et pourtant l'humour d'Anouk Ricard ne naît pas uniquement de la confrontation de protagonistes tordus et maladroits : ses héros sont dotés d'un humour féroce et s'envoient des piques à tour de bras. Ils rigolent beaucoup et, grâce à la maladresse, la mauvaise foi ou la bêtise des uns et des autres, chaque situation a priori banale part rapidement en vrille.

Relire en famille

Ne vous fiez pas au dessin faussement naïf et au décors gentillets, qui laisseraient présager des histoires nunuches pour enfants en bas âges. Comme dans sa brillante série « Les Experts », publiée dans la revue Cyclope, Anouk Ricard a le don pour délirer à partir d'éléments très simples. Un séjour au camping ou un bricolage à offrir, une séance de golf ou un canular téléphonique suffisent à déclencher l'histoire et lancer les personnages sur orbite. Les gaffes et péripéties s'enchaînent jusqu'à ce que la situation atteigne des sommets absurdes.

Si les albums d'Anna et Froga sont hilarants à la première lecture, ils se laissent lire et relire en famille. Même quand on se souvient de la trame, on savoure à chaque fois les dialogues corrosifs, les regards outrés, les rebondissements imprévisibles et les chutes désabusées. Rarement la BD tout public réservées aux plus jeunes considère-t-elle ses lecteurs avec autant d'intelligence. Elle leur fait pleine confiance pour saisir les sous-entendus et ressentir les émotions des personnages, bien souvent laissés dans le vide par leurs amis.

D'un point de vue graphique également, la série mise sur la capacité des lecteurs à passer d'un type de représentation à un autre, du code de la BD à bulles à celui de la peinture ou des pictogrammes, en tournant simplement la page. En effet, après quelques planches au trait naïf et aux à-plats en couleurs primaires, on retrouve Bubu, René et les autres en version pinceau, sans paroles souvent, avec de nouvelles textures et un traitement plus mature, mais le même humour décapant.

Que vos enfants travaillent bien à l'école et que vous cherchiez un cadeau pour les récompenser, qu'ils n'aiment pas lire et que vous souhaitiez les encourager, qu'ils jouent trop aux jeux vidéo et que vous cherchiez à les éloigner, qu'ils aient tant lu qu'ils n'aient plus rien à se mettre sous les yeux, peu importe la motivation, amenez-les de force chez votre libraire préféré et fourrez-leur l'intégrale d'Anna et Froga sous le nez. Et lisez-la avec eux, c'est vous qui ne pourrez pas quitter le magasin sans l'emporter !

Livre remarquable pour femmes remarquables !

Publié par les @editionsautrement ce livre à plusieurs mérites car son auteure, l’historienne de l’art Janine Ramirez, ne s’attache pas à montrer que les femmes existaient au Moyen Âge, qui en doute (?) elle les remet juste dans la lumière.

Lumière qui les a quitté finalement il y a assez peu de temps mais c’est une autre histoire. Modernes, volontaires, guerrières, pieuses, conquérantes, des terres Vikings à la Pologne, d’Hildegarde à Jadwiga, vous allez découvrir des femmes qui avaient bien compris le concept d’égalité, ni plus mauvaises ni meilleures que ces messieurs.

Plusieurs mérites disais-je car il redonne aussi des couleurs au Moyen Âge que l’on a trop tendance à voir en noir et blanc alors que tout y était éclatant. 

En introduction, la docteure en histoire écrit que « l’histoire est une matière vivante », comme elle a raison et comme elle le prouve magnifiquement bien !