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Fariba Adelkhah

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Ethnologie et anthropologie

La révolution sous le voile

La Révolution iranienne de 1978-1979 et le régime islamique qui en est issu n'ont pas fini de nous interpeller. Mais parmi les questions que nous nous posons légitimement à leur sujet, une seule, à vrai dire, a passionné et passionne encore l'opinion occidentale : c'est la question des femmes. Sujet populaire et toujours d'actualité, mais également chargé d'ambiguïté, d'émotion, de douleur, voire de danger ! Fariba Adelkhah a eu le courage de s'y attaquer et d'aller enquêter sur place, en anthropologue, en s'efforçant de résister à la simplicité trompeuse des thèses partisanes et des oppositions manichéennes. Aussi, le travail qu'elle nous livre aujourd'hui tranche-t-il singulièrement, par son sérieux et son originalité, sur la littérature superficielle et de parti pris qui semblait régner jusqu'à présent dans ce domaine. Le résultat est une riche moisson d'observations et d'analyses sur l'idéologie et les pratiques des cercles féminins musulmans de la capitale iranienne. Fariba Adelkhah démontre notamment bien la double contradiction qui caractérise l'évolution du statut de la femme en Iran, double contradiction dont la question du voile fournit une sorte de condensé (d'où son incompréhension en Occident) : durant le règne des deux derniers Shah le dévoilement forcé des Iraniennes a contribué à accentuer leur enfermement dans le cadre familial ; à l'inverse, sous la République islamique, c'est par le truchement de leur revoilement, même contraint, qu'elles ont pu accéder à un rôle croissant dans la vie de la Cité. De même, Fariba Adelkhah nous fait découvrir que les femmes qu'elle étudie ont vécu et perçu la Révolution, non seulement comme un mouvement de contestation de l'ordre impérial, mais aussi et surtout comme un outil d'élaboration d'un autre ordre social et, notamment, d'une nouvelle identité féminine. Pour avoir su résister aux sirènes de la facilité, Fariba Adelkhah sera, n'en doutons pas, violemment contestée, tant par les uns, qui l'accuseront de tiédeur suspecte, que par les autres, qui lui reprocheront des sympathies coupables. Mais qu'elle ne s'en émeuve pas, bien au contraire : ces attaques seront le plus bel hommage qui pourra être rendu à son livre !

11/1991

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Actualité médiatique internati

Prisonnière à Téhéran

Par définition un anthropologue est un intrus. Sa présence et son regard dérangent. Fariba Adelkhah en a fait l'expérience. Arrêtée en 2019, elle a été condamnée en 2020 à cinq ans de prison an pour atteinte à la sécurité nationale. Elle a finalement été libérée en 2023, après avoir été graciée - et non acquittée comme elle l'aurait souhaité. Privée de son terrain d'étude, elle s'en est inventé un autre, inattendu. Dans une suite de courts récits, Fariba Adelkhah raconte sans complaisance, à rebours des clichés, sa vie de prisonnière "politico-sécuritaire" en République islamique. Par là même, elle renouvelle notre compréhension de l'Iran post-révolutionnaire, et livre une réflexion plus générale sur la condition carcérale. Elle incarne également avec modestie, ironie - et non sans auto-dérision - un combat courageux et lucide pour la liberté scientifique, de plus en plus menacée aussi bien dans les régimes autoritaires que dans les démocraties libérales.

11/2024

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Non classé

Critique internationale N° 90

En solidarité avec Fariba Adelkhah, emprisonnée en Iran depuis le 5 juin 2019, la rédaction de Critique internationale reproduit ici quatre de ses articles, témoins d'un travail au long cours honoré le 15 décembre 2020 par le Prix Irène Joliot-Curie "Femme scientifique de l'année" . Les figures du javânmard, chevalier des temps modernes, des "mangeurs de terre" , d'un maire de Téhéran immensément populaire traduit en justice, et des protagonistes de la "reconstruction post-conflit" sous respiration artificielle internationale nous rappellent la capacité de notre collègue à restituer la banale complexité des sociétés contemporaines, en Iran et en Afghanistan. Ces textes, et les introductions qui les accompagnent, révèlent une chercheure sensible et taquine, subtile et exigeante, rendant compte avec minutie de la réalité empirique pour laisser entrevoir une critique sans concession de l'ordre social et des rapports de domination, mais aussi une compréhension empathique de ses interlocuteurs et interlocutrices.

03/2021

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Revues Ethnologie

Varia

Qu'est-ce que l'anthropologie peut nous apprendre sur les événements qui bouleversent l'Iran contemporain ? C'est à cette question que propose de répondre Jean-François Bayart en s'appuyant sur les travaux de Fariba Adelkhah dans la "Chronique" qui ouvre ce numéro. A la suite de cette réflexion, trois "Etudes & Essais" illustrent une nouvelle fois la diversité des thèmes et des méthodes de notre discipline. Joëlle Vailly nous invite à pénétrer dans les arcanes des dispositifs policiers de la bio-identification de suspects d'infractions pénales en Europe, laquelle engage à bas bruit un nouveau rapport du citoyen à l'Etat. Puis, Dimitris Gianniodis fait le récit d'une soirée de fête sur l'île grecque de Chios du point de vue des musiciens qui l'animent. S'élèvent alors les chants improvisés des manés qui participent autant à la construction d'émotions qu'à une histoire partagée, parfois douloureuse. A ces deux études mettant en oeuvre des pratiques ethnographiques très différentes, s'ajoute un essai réflexif sur la position de l'ethnographe : à partir de l'analyse pragmatique de plaisanteries récurrentes dont elle est la cible, Camille Riverti met en évidence les violences conjugales qui les sous-tendent et révèle ainsi ce que le burlesque peut avoir de politique. La discussion se poursuit ensuite sur le terrain théorique sous la plume de Urmila Nair. Dans un "En Question" , elle esquisse avec clarté les contours de l'anthropologie linguistique nord-américaine développée dans le dernier livre de Susan Gal & Judith Irvine, Signs of Difference (2019). Enfin, Arnaud Esquerre conclut ce Varia par une lecture critique de Toward an Anthropological Theory of Value de David Graeber (2001), récemment traduit en français. Dans cet "A Propos" , il commente certaines étapes de la formation de l'une des pensées les plus fulgurantes de l'anthropologie du début du XXIe siècle.

04/2023

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