La bande dessinée a toujours eu beaucoup de mal à se faire reconnaître autrement qu’un sous-genre, bien éloigné de la planète « littérature ». Et pourtant, elle a osé traiter, depuis déjà bien longtemps, de sujets réputés très sensibles et loin de toute légèreté.
Un chercheur de l’université de Nancy a choisi de se pencher depuis cinq ans sur les relations unissant bande dessinée et Shoah rapporte l'AFP. Au sein de sa thèse, il a fait l’inventaire des différents albums traitant de l’holocauste durant les soixante dernières années.
Cette remontée dans le temps a permis de faire apparaître au grand jour l’évolution du traitement d’un sujet toujours difficile à aborder et pourtant omniprésent dans l’art en général.
Désormais quand on parle de la Shoah, il n’est pas déplacé de le faire au regard de Maüs de Spiegelman. Prenant le détour classique des animaux, cette série représente Nazis et Juifs sous les traits de rats et de souris. Des souris ? Eh oui : Hitler detestait Walt Disney, la suite n'est donc pas difficile à comprendre.
Et les enseignants n’hésitent plus à utiliser certaines planches de Spiegelman pour aborder l’holocauste avec leurs élèves. Peut-être un moyen de capter leur attention de façon plus évidente qu’en leur diffusant Nuit et brouillard.
La bande dessinée sait aussi précisément quelles sont les limites que l’opinion ne peut accepter de voir dépasser. Lorsque Vuillemin et Gourio sortirent en 1988 Hitler = S.S., l’humour noir passait si mal que l’album fut très mal fut. Non pas interdit, mais simplement épuisé et jamais réédité : aujourd'hui, son avenir est entre les mains de Glénat Drugstore.
Depuis Maüs, Spiegelman a cependant pas mal évolué, pour preuve cette petite phrase : « Le bon lecteur (de comic) , doit avoir 60 ans, être juif, et être un véritable connard » (Art Spiegelman, à Solliesville lors d'une petite conférence sur la bande dessinée américaine, en compagnie de Charles Burns et Chris Ware)