Dimanche 16 mars avait lieu au « forum » du Salon du Livre un débat dont le titre était « Traduire est le pêché originel ». Le débat était organisé par la Société des Gens de Lettres (SGDL) et animé par Aliette Armel, journaliste au Magazine Littéraire.
Les invités étaient Jean-Claude Bologne (écrivain, spécialiste de l’iconologie médiévale, et auteur du Dictionnaire commenté des expressions d’origine biblique, Larousse, 2005 Larousse, 2005), Gérard Haddad (Psychiatre, psychanalyste, traducteur de l'hébreu), et Henri Meschonnic (poète, essayiste et traducteur de la Bible, auteur de Au commencement : traduction de la Genèse, Desclée de Brouwer, 2002).
Le titre de ce débat a été trouvé par Henri Meschonnic, qui voulait ajouter un trait d'humour au débat estimant que la pensée académique est trop sérieuse. Et en effet à 75 ans l'homme qui est aussi poète a toujours l'oeil rieur et semble habité d'une véritable passion. Il explique que le titre peut se lire de deux façons traduire et le pêché originel ou traduire est le pêché originel. Et l'on serait bien en mal de traduire ce titre en gardant l'esprit.
Voilà qui situe donc le débat sur deux axes. Celui des textes sacrés et celui de la complexité de la traduction entraînant des fautes. Et parfois des fautes graves surtout lorsqu'il s'agit d'interprétation de textes sacrés.
Jean-Claude Bologne explique qu'il attend quatre choses d'une traduction idéale. La beauté du texte, la fiabilité, qu'elle vienne d'un texte le plus ancien possible, mais aussi il estime nécessaire la multiplicité des sources. Ces quatre éléments étant un peu contradictoires, il finit par affirmer qu'une traduction idéale, selon lui, ne peut pas exister.
Des traductions « effaçantes »
En ce qui concerne Henri Meschonnic, les traductions actuelles des textes sacrés sont des traductions « effaçantes » pour la simple et bonne raison qu'elles ne tiennent pas compte du rythme. Il estime que « Le rythme est l'organisation du mouvement de la parole ». À plus forte raison dans l'hébreu ancien où le rythme comme la grammaire influent sur le sens de la phrase. Fallait-il une pensée de poète pour envisager la traduction autrement ? Certainement. Henri Meschonnic tient à préciser encore une chose, il n'est pas un professionnel mais un amateur.
Un amour de l'exercice
Une phrase qui fait sourire, quand on sait le nombre d'années qu'il a passées à traduire les textes bibliques. Cela dit Gerard Haddad reprend le mot à bon compte, en expliquant qu'effectivement ni lui ni Henri Meschonnic ne sont des professionnels car ils s'attellent à cet exercice complexe par amour. Il explique qu'ils ne traduisent que les textes qu'ils aiment pour leur plaisir.
Bref, c'était un débat de haute volée, dont il serait un pêché de tenter de traduire la saveur, et où les intervenants se répondaient avec une passion communicative.