La liberté d'expression et la violence sans foi ni loi, tel était le thème de la conférence que les deux auteurs réunis à Stockholm hier, ont abordé durant leur intervention. Rappelant les conditions de travail de journalistes en Chine, au Mexique ou au Zimbabwe, l'assassinat d'Anna Politkovskaya en Russie, le constat était pour eux évident : la menace qui pèse sur la liberté d'expression est intolérable.
Et pour Saviano, c'est « injuste ». Apprenant l'existence du contrat lancé par la Camorra contre lui, il est consterné : « Vos propres mots vous ôtent votre liberté, votre liberté de marcher, d'exister. » Devant les 450 personnes qui ont dû montrer patte blanche avec plusieurs contrôles d'identité, les deux hommes ont su « garder leur sens de l'humour », commente Kerstin Ekman, ancien membre de l'Académie Nobel.
« Je suis blessé quand on me dépeint comme quelqu'un qui cherche à vilipender son pays. D'une certaine manière je tente de lui rendre honneur », a précisé Saviano.
Pour Rushdie, toute la difficulté est de savoir « comment mener sa vie », lorsque l'on est ainsi sous le coup de menaces de mort. Et de redouter qu'aujourd'hui, on n'assiste à « un rétrécissement des frontières » dans ce qu'il est permis de dire. Se souvenant des Versets sataniques, il explique que la situation a été très difficile à gérer, particulièrement quand sa vie est en danger.
Et concernant son copain du jour, il reste optimiste. « Je ne suis pas certain de savoir combien le bras de la Camorra peut être long, mais je présume toutefois que quelle que soit sa longueur, il ne peut pas atteindre tous les coins du monde. » Sur ce point, Saviano avait pourtant avancé des chiffres saisissants, considérant que les mafias italiennes pèsent 100 milliards € en Europe. Repenant pour lui une phrase d'Averoes, il disait : « Regarde la cocaïne et tu verras la poudre blanche ; regarde à travers la cocaïne, et tu verras le monde ».
Associated Press