Le retour de Saint-Malo à l'issue du Festival Etonnants-Voyageurs aura été, semble-t-il, plutôt chaotique dans le train spécialement affrété pour les invités.
En effet, en se rendant dans le Wagon-bar le photographe Reza est tombé sur une scène plutôt étrange. Sébastien Lapaque, écrivain et critique au Figaro Littéraire, relativement ivre en train de lire un texte pour le moins insolent à l'égard des organisateurs du Festival. Reza actionne alors la caméra de son téléphone et filme la scène. Alors que Lapaque termine sa lecture, une personne (probablement un ami de Reza) lance : « C'est la bande à Pétain ». Sébastien Lapaque entend la pique et relance : « Elle est où la bande de Pétain ?! ». Ce qui signe le début de la brouille.
Dans une lettre ouverte à Bakchich, le photographe affirme que Lapaque l'aurait insulté en hurlant et avec « une gestuelle extrêmement agressive et volontairement intimidante ». Il rapporte les propos de l'écrivain, journaliste : « Tu vois, ma carte d’identité, je la déchire, je la mets en miettes. Tu n’es pas de ma France, tu n’y appartiens pas. La France où tu es, ce n’est pas ma France à moi. C’est une France qui n’est pas pure. Oui, une France qui manque de pureté. Tu me fais honte, tu m’as humilié. Tu n’es pas de ma France à moi car tu ne connais pas Gaston l’Éléphant et Jojo le Lapin » (entre autres propos).
Seulement voilà le journaliste et ses amis ont une toute autre version. Dans un mail adressé à France 2, Sébastien Lapaque explique que le texte n'était pas de lui mais qu'il était en train de lire un tract « d'extrême gauche intitulé : De la littérature bourgeoise... » ajoutant « Ce tract est extrêmement insolent à l'égard du 'capitaine Le Bris et de sa bande de pirates' ». Olivier Maulin, romancier et ami de Lapaque, précise à Rue 89 que le journaliste faisait dans le burlesque avec une lecture « à la Malraux ».
Une ironie burlesque mal comprise ?
Bon mais qu'en est-il des propos tenus à Reza ? Lapaque indique : « Pour ridiculiser l'antifascisme en peau de lapin de Reza et ses amis, je suis donc parti dans un numéro d'improvisation comique à la gloire de 'la France éternelle de Jojo Lapin et Gaston l'Eléphant' avec la colère affectée de Jean Gabin dans la Traversée de Paris ». Et de s'interroger : « N'ont-ils vraiment pas entendu le caractère burlesque de la chose ou ont-ils fait semblant ? »
Olivier Maulin précise : « C'est du Pétain dans le texte [le tract] comme on l'aura compris. Et c'est donc là-dessus qu'il a démarré avec Reza, déclamant un couplet sur la France éternelle de Jojo Lapin, se référant à une hypothétique France des terriers et menaçant en effet de déchirer sa carte d'identité, le tout entrecoupé d'exclamations du genre : 'Tu m'as humilié !', 'Tu m'as fait honte !', etc. La tirade rapportée par Reza sur la pureté est tout simplement fausse, il ne l'a pas dite ».
Quoi qu'il en soit le romancier a indiqué qu'il avait présenté ses excuses à Michel Le Bris et que Lapaque avait fait les siennes dès le lendemain à Reza. Sur Rue 89, d'ailleurs, il les a réitérées : « Précisons avant tout qu'il n'y a pas lieu d'être fier de ce qui s'est passé et que je n'entends pas faire le malin. Baver sur un festival qui vient de nous permettre de parler de nos livres durant trois jours est idiot. Se construire une cuite de dix étages, du haut de laquelle on toise ironiquement son monde, est facile. Parler à Reza sur un ton ordurier en public est nul. Lapaque s'est d'ailleurs excusé dès le lendemain auprès du photographe et j'ai présenté les miennes à Michel Le Bris, directeur des Étonnants Voyageurs ».
Fin de l'histoire ?