Une main de fer dans un gant de velours, ou tout du moins, implacable avec les Serbes et compréhensive avec les Albanais. C'est ainsi que Carla Del Ponte était vue jusqu'à présent. Mais depuis, il y a eu la Caccia et les cliniques de prélèvement d'organes dont elle parle qui ont jeté le trouble un peu partout.
L'armée de libération du Kosovo, ou UCK avait des pratiques plus que barbares, aux dires de ce livre, et les révélations faites viennent passablement bousculer les rassurantes certitudes que l'on pouvait entretenir encore en se voilant la face.
Mais depuis la Caccia, le TPI pourrait devenir cible de critique. Voire être taxé d'incompétence. « Cette situation est plus que dérangeante. De telles révélations risquent de mettre à mal la crédibilité du Tribunal de La Haye », lance Jan Kubis ministre slovaque des affaires étrangères. Et d'ajouter que « la publication d'un tel livre est un fait qui sape la stature des fonctionnaires du Tribunal de La Haye et je pense en particulier à Mme Del Ponte ».
Caccia, « d'irresponsable » et « indigne »
Mais plus grave, les propos de Florence Hartmann, ex-porte-parole de l'intéressée, qui qualifie « d'irresponsable », mais surtout « indigne » d'avoir mis en avant dans Caccia, « comme des faits avérés ce qui, en réalité, a été impossible à prouver ». Pour elle, « le maintien de la chaîne du froid et les conditions d'asepsie rendent extrêmement difficile la mise en oeuvre réelle de telles pratiques ». Un élément pratique difficile à ne pas prendre en considération.
Le Temps publie ainsi toute une tribune dans laquelle Florence Hartmann critique encore vivement Carla Del Ponte. « S'il est du devoir d'un procureur de n'écarter aucune piste, est-il judicieux de révéler celles qui furent abandonnées du fait de l'absence de toute forme de preuve ? », interroge-t-elle. Mais elle regrette plus encore « une surenchère médiatique, encouragée par les détails donnés par la magistrate ».
Porte ouverte aux révisionnistes
Indirectement, Carla avait répondu, ainsi que nous vous le précisions hier : « Sans source et sans aucun moyen pour les identifier, sans cadavre, sans preuve qui puissent impliquer des responsables de haut niveau dans de tels actes, il n’y avait aucune possibilité d’enquête. » Mais Florence reste inflexible : le risque est d'ouvrir la porte aux « révisionnistes de tout poil », en décidant de « mélanger les genres et de juxtaposer des crimes jugés, donc irréfutablement établis, et ces thèses non vérifiées émanant de témoins dont elle ignore tout, jusqu'à l'identité ».
Alors que son rôle au TPI était justement de démêler les rumeurs de la réalité...