Là où tu te perdras Tome 2 : La poupée de sang et de larmes

Après (Albin Miche, 2013), réitère avec un deuxième opus. Même lieu (l'île de Sandhamn située dans l'archipel de Stockholm) et même duo d'enquêteurs, l'inspecteur Thomas Andreasson et son ami Nora Linde, juriste.

Assurément le début d'une longue série, à l'instar de Camilla Läckberg. Souhaitons maintenant que cette auteure, aujourd'hui convaincante, ne s'épuise pas en chemin.

Ses personnages retiennent, se délivrent et s'étoffent davantage dans ce deuxième volet, deviennent progressivement familiers et proches, évoluent dans une intrigue classique, certes, sans grand rebondissement ni extrême tension mais, malgré tout, intéressante et captivante, vraisemblable, particulière et assez attrayante également, notamment par ses caractéristiques insulaires même si, elle n'a ni la force d'envoûtement, ni l'attraction saisissante des romans de  Johan Theorin ou de Peter May.

Ici pas d'intempéries désastreuses, de froid glacial ou d'obscurité éprouvante mais une luminosité et une ambiance estivales caractéristiques d'un bel été suédois balnéaire. Au départ du Tour de Gotland, la plus importante régate du nord de l'Europe, un skipper, Oscar Juliander, avocat renommé et fortuné, vice-président également du club nautique royal KSSS (« vigoureux gaillard fréquentant volontiers la gent féminine ») est assassiné à l'instant même où son bateau prend la tête de la course. Vif émoi chez les spectateurs et les nombreux invités mondains venus assister au départ et nouvelle enquête pour l'unité criminelle de Nacka, à laquelle Nora, en vacances sur l'île, va participer, d'abord par amitié mais avec une grande perspicacité.

En désaccord de plus en plus prononcé avec son mari médecin, Henrik, égocentrique et détestable (que le lecteur désapprouve depuis le début de la série, d'ailleurs), insatisfaite de la vie qu'elle mène, frustrée jusque dans son travail ; sa collaboration avec Thomas, lui maintient la tête hors de l'eau, la préserve de l'effondrement et annonce sans trop de mystère, l'amorce d'une prochaine liaison amoureuse (pressentie dès le 1er volet), d'autant plus d'ailleurs, que la relation que Thomas entretient avec sa collègue Carina (fille de son chef) ne leurre ni héros, ni lecteur. Mais à ce propos, et sans révéler un secret quelconque,  l'auteure ne précipite rien. Il faudra être patient.

A travers le déroulement très ordinaire de l'enquête, du recueillement des différents témoignages à la constitution d'une liste de suspects, d'une infiltration au cœur de la vie intime et professionnelle de la victime à la découverte d'un milieu aisé vénal, indécent et sans moralité, Thomas avance sans surprise, s'égare peu vers de fausses pistes, renseigne sur les pratiques douteuses d'un certain milieu juridico-financier avec un réalisme assez convaincant et si la fin n'est pas tout à fait celle attendue, si  certains effets de style apportent finalement peu au suspense,  si quelques passages un peu niaiseux agacent, l'histoire et son dénouement restent vraisemblables  sans être étonnants ni renversants et l'intrigue gagne en intensité, à mesure que Nora prend les rênes des  derniers chapitres, en alternance avec Thomas.

C'est certain, ce sont les personnages principaux, sympathiques et fragiles, plutôt vivants, le cadre insolite et agréable, les détails de ce quotidien, finalement assez ordinaire et familier, qui font de cette histoire policière un divertissement sans prétention,  contenu dans une unité de temps assez brève (cinq semaines) et cadencé comme il faut pour ne pas ennuyer ni éprouver le lecteur.

Un livre consensuel, en définitive.

Originaire de Vendée, artiste engagé,  raconte des histoires ancrées dans son terroir, souvent issues de la culture populaire mais résolument modernes. Avec la papote, accessible dès 6 ans, il met en scène une poupée de chiffon vendéenne aux pouvoirs, magique si elle est aimée et maléfique si elle est exploitée sans tendresse.

Trois sœurs vivent sans parents et pauvrement dans un petit village. Les dessins et les paniers d'osier qu'elles réalisent puis vendent sur le marché ne leur permettent même pas d'acheter une robe pour chacune d'entre elles jusqu'au jour où Mimosa, la plus jeune et la plus jolie, réussit à tout vendre. Invitée par ses sœurs à aller acheter une nouvelle robe, elle se laisse plutôt tenter par une poupée de chiffon dont le marchand lui assure qu'elle fait des crottes en or. Sa naïveté révulse ses sœurs et l'isole de la maison. Mais Mimosa est une petite fille douce et aimante, promise à une heureuse destinée…

Presque intemporel, le conte est parsemé de mots de patois vendéen facilement compréhensibles ou doublés en français et offrent à l'histoire un charme authentique. Accompagnés eux-mêmes par des formules orales ou un vocabulaire d'enfant, ils résonnent comme une mélodie prête à chanter ou une poésie à déclamer.

En tout cas, cette histoire est construite pour être lue à haute voix selon un rythme entraînant et vivant (phrases très courtes), ponctuée d'un refrain amusant et gai "A la balote, Marie-Charlotte qui fait des crottes pour sa papote", irrésistible et plein d'humour.

Le texte est illustré par des dessins aux couleurs automnales, à la fois délicates, douces et expressives. Les nombreux personnages représentés créent l'ambiance réaliste du petit village.

Samuel Ribeyron décrit le quotidien des trois sœurs, leur environnement proche avec un sens du détail sensible, crée une complicité avec le lecteur. Au fur et à mesure des pages, la maison des trois sœurs devient de plus en plus familière. Que ce soit une vue d'ensemble ou un plan rapproché, le lecteur s'amuse à retrouver des détails légèrement modifiés, semble évoluer dans des tableaux vivants, si proches. Il accompagne Mimosa sans crainte, même dans les situations les plus sombres, chaque fois rassuré par son air doux, son regard tendre.

Un conte magique à mettre entre toutes les mains et n'hésitez pas à vous précipiter sur son site pour découvrir ce conteur étonnant et militant, à l'humour  vraiment irrésistible ; sur scène régulièrement (pour les adultes notamment) et pas seulement en Vendée ! http://www.yannickjaulin.com/

La très talentueuse dessinatrice de B.D Laurel et l'auteur reconnu Lorris Murail ont créées ensemble en août de l'année dernière l'héroïne . Cette jeune ado de 13 ans, jolie comme un cœur avec une tripotée de copine et une petite sœur adorable.
Vient de sortir le deuxième tome de son journal, où l'on retrouve les même recettes qui ont fonctionné dans l'épisode précédent, avec comme comme bonus, un bébé nommé Christopher et un leitmotiv : l'homme (avec un petit h) est-il une espèce en voie de disparition ?
A (re)découvrir d'urgence !

Résumé : Depuis longtemps déjà des bruits alarmants circulent. Le niveau baisse. Le niveau, certes, mais le niveau de qui ? À l'issue d'une enquête scientifique et historique des plus rigoureuses, Carmilla, sa sœur Mina et les copines du Tagada's Club parviennent à une conclusion implacable : seul le sexe dit fort est en cause. Oui, tout l'indique, le mâle véritable se raréfie. Cerveau ramolli, volonté en berne, même le muscle du footballeur ne suit plus.
Or, comme s'en souviennent les lecteurs du tome 1 (Reproduction interdite), un bébé mâle est venu bénir le foyer de Carmilla. Que faire pour que ce petit homme échappe à son destin ? Tel est l'enjeu de ce second volume.
On retrouve pèle-mêle au sein de cette seconde aventure : malice, amitiés indéfectibles, réflexions sur l'autre sexe, papotages interminables entre copines, dégustation de chamallows grillés...

Kana poursuit l'exploration des oeuvres du « créateur d'estampes de Shôwa », Kazuo Kamimura, avec l'édition du tome 1 de La plaine du Kantô. Dans ce titre, le mangaka se penche sur une période très troublée au Japon, celle de l'immédiat après-guerre.

En août 1945, juste après la capitulation du Japon un avion américain s'écrase dans un champ dans la région de Chiba. Les paysans s'approchent du pilote rescapé, prêts à lui faire passer l'arme à gauche. Heureusement, un vieil homme qui semble parler anglais s'interpose et sauve la vie du pilote. Le vieil homme c'est le grand-père de Kinta, un enfant qui va faire l'apprentissage de la vie dans un Japon meurtri par sa défaite et occupé par l'armée américaine.

Il n’est pas si loin, le doux temps de cet album qui fit de Margaux Motin l’idole des jeunes (et de toute manière, chez Margaux, tout est à lire, pour s’offrir une tranche de bonne humeur et de petites crises). Mère célibataire qui avait trouvé un Jules à sa taille, dans le tome 1, voici la suite des aventures d’une famille ô combien semblable à celles que l’on connaît – voire que l’on est.

Mais si dans Vent lointain, les ajustements d’une nouvelle cellule familiale étaient de taille, avec Après la pluie, ce sont les affres du quotidien et les douloureuses disputes qui ouvrent le bal. Entre Margaux et Pacco, le torchon brûlerait ?

Qu’à cela ne tienne, la maman se retrousse les manches, partant à la recherche d’une solution pour que l’un et l’autre se réconcilient.

On aime le silence de certaines cases, la douceur et la tendresse dont on aimerait être toujours capables de faire preuve.

On se délecte de pleines pages poétiques et prosaïques, où l’affreuse vie de tous les jours se sublime.

Bref. On aime Margaux.

Ce nouveau roman (paru en 2008 en Espagne) est carrément glaçant et dérangeant, anxiogène de bout en bout. Accompagné d'une écriture mesurée, sans emphases, d'une tonalité neutre et distante en apparence,  porté par un rythme mécanique presque terne, le récit oppresse, indispose, se fait rude, enferme le lecteur de manière progressive mais puissante dans un étau d'où il ne pourra s'échapper, contraint à la fois par une sorte de suspense haletant et par les réflexions obsessionnelles et étouffantes du personnage principal sur la peur et ses ravages. « Ce qui est peut- être le pire, sa peur est consciente, c'est celle de quelqu'un qui est capable de penser sa propre peur, de l'analyser et même de l'interroger, et qui pourtant craint. »

Quelque part dans une ville espagnole, un couple s'inquiète de la disparition renouvelée de sommes d'argent et objets de valeur au sein même de l'appartement. Les soupçons se portent vite sur la femme de ménage immigrée mais son renvoi ne met pas fin aux vols. En fait, leur fils, Pablo, jeune collégien est victime de racket et de sévices opérés par d'autres adolescents. Sara, la mère, réagit vivement, interpelle le directeur de l'établissement, réfléchit à le changer d'école, veut déposer plainte auprès de la police. Carlos, le père, plus mesuré et sceptique quant à l'efficacité des institutions, décide de faire face à la violence et d'assumer lui-même la protection de son fils.  Le processus de destruction se met alors en place, l'équilibre familial se rompt. Bientôt lui-même victime d'une peur invalidante et destructrice, il se réfugie avec son fils dans une lâcheté et une soumission devant l'agresseur, Javier.

A travers la description des événements qui se succèdent, la peur et l'angoisse s'immiscent partout,  dans les personnages, dans l'appartement, à l'école, dans les rues du quartier, au centre commercial de la ville sans qu'aucune forme d'autorité, de politique sécuritaire ne puissent empêcher son invasion au cœur de la population (ici les classes moyennes). « Le besoin de protection ne cesse jamais de croître et les réponses apportées à la peur ont pour effet de générer  encore plus de peur, les mesures prises contre l'insécurité produisent plus de sentiment d'insécurité ».

Et Carlos, l'analyse en détail, avec une maîtrise remarquable, s'interroge sans cesse sur son fondement, ses multiples visages (de l'agresseur au pauvre, du Magrébin au Noir africain, au Roumain et Albanais jusqu' au policier et vigile…), ses différents lieux et représentations, amplifie le sentiment d'insécurité et de vulnérabilité, crée la violence, indispose le lecteur, comme dans l'impossibilité de réagir et de s'opposer à ce sentiment d'effroi qui l'enveloppe de plus en plus, le rend nerveux.

Le voilà pris dans un engrenage irréversible, entraîné par la folie du père. « Etre parent est une autre source d'effroi. »  Une sorte d'huis-clos vite irrespirable, tant la peur est partout, dans le mot, le geste quotidien, dans le jour, la nuit, dedans, dehors. Sans répit, insidieuse, douloureuse et violente, elle agresse, se renouvelle sans faiblir. Epuise.

La peur a cessé d'être une alerte, ne protège plus. Elle a pris le dessus. Le lecteur peine à poursuivre dans cette ambiance presque diabolique et hystérique.

Tatsu l'immortel, le coriace yakuza, s'est converti... En homme en foyer. Et il prend sa tâche avec autant de sérieux que s'il risquait de se faire couler dans du béton pour désobéissance !

Dans son petit tablier rose et avec son regard de tueur, Tatsu continue ses frasques pour notre plus grand plaisir. On ne se laisse pas du contraste entre le dramatique des paroles et la banalité des actions. On rit encore comme au premier tome !

Que ce soit au camping comme à l'anniversaire du boss rival, Tatsu aura toujours des astuces de professionnel à vous proposer. Le dessin de Kousuke Oono est toujours aussi soigné - un vrai régal pour les yeux.

L'artiste est une jeune Coréenne  d'une trentaine d'années qui a étudié la peinture à l'université de Hongik et le dessin à l'Ecole coréenne de l'illustration (HILS). Cet album, à destination des jeunes enfants, est une surprenante et magnifique découverte et il plaira assurément aux lecteurs délicats et sensibles, adultes compris.

Un texte épuré et vif, réduit à l'essentiel exprime l'humeur morose du personnage, sorte de petit lutin à grosse tête jaune, submergé par une tristesse profonde. Tout ce qui l'environne l'énerve ou l'indispose (la nourriture, les camarades de classe, le mauvais temps, les disputes de ses parents) à tel point qu'il ne peut plus faire face et se laisse emporter par sa détresse, la nuit venue, seul dans son lit.

Un torrent de larmes qui gonfle, grossit au fil des sanglots et inonde avec force la maison d'abord, puis la ville entière jusqu'à devenir un océan de larmes dévastateur mais finalement salvateur et bienfaisant, si réconfortant.

A travers un graphisme singulier et raffiné, parfois proche de la gravure, parfois farfelu et cocasse, proche de l'univers des monstres issus de la culture japonaise, parfois inquiétant et même un peu effrayant, l'auteur déploie toute son imagination avec une foule de détails à découvrir à chaque page,

contrebalançant justement le texte minimaliste et traduit avec un bel effet, l'effervescence et l'agitation des émotions qui envahissent le personnage.

C'est comme un défoulement nécessaire, légitime pour chasser le vague à l'âme et les peines de la journée et  l'énergie et la vigueur que tous les dessins manifestent sont réellement contagieuses, font un bien fou, enthousiasment sans détours.

Il est parier qu'après une lecture, d'autres se succèderont, toutes différentes, tant les dessins sont denses, valent la peine d'être examinés dans le détail, à la fois drôles et poétiques, insolites, empreints de références culturels universelles. Et c'est presque un jeu alors de partir à la découverte minutieuse de toutes ces images, de s'amuser de certaines situations cocasses, de découvrir également une sorte de double lecture capable d'impressionner également les parents.

Décidemment ce livre est innovant et renversant. Ne le manquez pas !

« On aime à dire des saisons de l’Archimonde qu’elles sont comme les différentes phases d’une seule respiration. Je préfère, pour ma part, les regarder comme une danse, comme un déroulé de geste répétitifs mais chaque fois dissemblables. Des petits pas dans un sens, des petits pas dans l’autre, nous toutes emportées dans les vastes bras du temps. »

La porte est ouverte : L’Archimonde, univers qui accueille des peuples magiques, des animaux doués de parole, des êtres malicieux, des enfants pleins de courage, des créatures effrayantes ou attendrissantes…

#[pub-1]

Notre aventure débute avec Patito, jeune naufrageur de Grouille : amateur de farces et d’histoires drôles, bagarreur sans peur (quoique), encore doté de l’innocence de son âge. Débarque Syzygie, une géante cabatique ; bien que son apparence peut d’abord faire peur, sa personnalité vient adoucir le tableau – si bien qu’on oublie vite ses grosses paluches et ses dents pointues. Autre détail : sa voix d’or… Une voix dite magique, qui attire l’attention d’individus mal intentionnés.

Premier tome d’une série de dix. Oui, DIX.

Mille saisons s’annonce comme une belle épopée haute en couleurs, avec des personnages attachants et la plume de Léo Henry, toujours aussi intelligente et délicieuse.

Adrienne grandit dans la pauvreté, elle mendie et fait comme elle peut pour survivre quand elle est recueillie par un aristocrate qui prend soin d'elle. Les années passent, alors, tranquillement.

C'était trop beau, Adrienne va être accusée de meurtre et va devoir retourner à la rue au sein de la guilde des Dénicheurs, avec pour seuls amis une tavernière, un dandy voleur et Olgun, son dieu personnel. Poursuivie par la garde elle passe son temps à fuir et se cacher... Réussira-t-elle à vaincre le Démon qui la poursuit ? Un combat sans merci s'annonce, mais Adrienne est pleine de ressources.

Tout commence par une scène des plus sanglantes qui nous ramène deux années auparavant. Le décor est planté et l'aventure peut commencer. On va s'attacher aux différents personnages et, autant vous le dire de suite, avoir un petit pincement au cœur lorsque certains personnages disparaissent. L'utilisation des flash-back est très bien trouvée, donne du pep's à l'intrigue et nous en apprends plus sur notre courageuse héroïne. L'écriture souffre parfois de quelques longueurs par moments, mais l'histoire est tellement passionnante que cela ne gêne en rien la lecture.  Lire c'est entrer dans un univers complexe avec de nombreux rebondissements.

Ari Marmell signe avec Widdershins un très bon roman de dark fantasy, il confirme son talent et sa légitimité après l'excellent Darksiders.

C'est le 1er tome d'une trilogie que l'on a hâte de retrouver et que l'on conseille à tous les ados qu'ils soient fans de fantasy ou pas. 

Le tome 2, Le Pacte du mensonge ! parait le 6 novembre. Dépêchez-vous de lire le premier, alors !