Roland Leber

1915, Bursa, une ville de l'ancien Empire ottoman. Anouch est une enfant parmi tant d'autres, au sein de sa famille, mais aussi au sein d'un peuple qui sera chassé et traqué. L'école, les amis, tout cela disparait avec la déportation, remplacés par la famille, la faim, la survie… Un texte poignant basé sur des témoignages de rescapés qu'une écriture délicate nous transmet de façon respectueuse, sans voyeurisme et détails sordides.

est un roman à la première personne qui raconte le périple d'une jeune fille arménienne dépassée par les évènements politiques. Bien que fictif et empreint d'une pointe de poésie, ce récit revient sur le génocide bien réel du peuple arménien par le gouvernement turc : comment, lorsqu'on a treize ans peut-on quitter sa maison, voir sa famille souffrir et périr ? Comment devenir quelqu'un lorsque toute sa vie on apprend à se cacher d'un ennemi que l'on n'identifie pas ?

Loin de nous développer les atrocités de la guerre et de pointer du doigt l'inhumanité des uns envers les autres, Roland Godel, l'auteur, nous propose de voir à hauteur d'enfant ; voir à travers les yeux d'Anouch la beauté des paysages, la bonté des gens rencontrés, la volonté de vivre et aimer malgré tout, rester humain et grandir tant qu'il y a de l'espoir. Et cet espoir, c'est la jeunesse, celle qui porte les souvenirs des oubliés pour justement veiller à ce qu'aucune erreur du passé ne soit niée et perpétuée.

C'est leur voix qui résonne à présent afin de rendre justice au passé.

Dans les yeux d'Anouch vient de remporter le 5e Prix Gulli de littérature jeunesse…

L’écrivain-arpenteur Patrice Franceschi a lancé avec Points une collection, Points aventures. Et de publier des classiques du voyage et de la haute liberté, du siècle de Pindare à celui d’Olivier de Kersauson.

Le grand navigateur poète, dans "Le monde comme il parle", se raconte, comme des décennies avant : la mer, le danger, l’épopée, la compétition, des rencontres, la solitude… "La solitude est le seul moment réel de notre vie. La vie réelle est dans la solitude. L’émotion est solitaire. Même le voyage amoureux est un voyage en solitaire"…

Un autre sombre héros de la mer qui a su traverser les océans du vide, l’extraordinaire Henry de Monfreid. Secret, courageux, “corsaire”, avec sa dimension la plus sombre... Contrebande d’armes, espionnage, trafic d’esclaves…

Car oui, au début du XXe siècle l’esclavage était bien pratiqué, ce que découvrit Joseph Kessel à l’occasion d’un célèbre reportage. Il rencontra au même moment cette figure devenue quasi légendaire, et que l’on peut entendre au micro de Jacques Chancel en 1969.

“Je veux profiter des quelques semaines de liberté que me laisse la date prévue de ma mobilisation pour liquider ce stock d’armes. Je ne voudrais rien laisser derrière moi quand viendra mon tour de partir à cette guerre que je crois être la Grande Aventure.”

Enfin on connaît le tournoi du Grand Chelem, pas la personne. Les mémoires de Roland Garros, selon le grand écrivain Blaise Cendrars : “Le document le plus extraordinaire et le plus vivant que l’on puisse lire sur les débuts de l’aviation.”

Trois prodigieuses figures françaises qui offrent l'occasion de rappeler cette sentence d'Aristote, tirée de l'Éthique à Nicomaque : “Le courage est la première des qualités humaines, car elle garantit toutes les autres.”

 

La philosophie appréhendée par la très grosse tête artiste Michel Foucault, passe toujours par des phases historiques : d’abord le philosophe guérissait les âmes, interprétait les rêves, et cherchait à nous réveiller de notre oubli. Puis la révolution cartésienne et son « discours vrai », et depuis Nietzsche ? Plus récemment encore ? –, la philosophie a reçu en partage une tâche qui ne lui était point jusqu’ici familière : « Celle de diagnostiquer et de prophétiser l’instant. »

« Je, ici, à présent », voici l'exigence de la philosophie moderne. On ne parle plus de Vérité, d’Âme, de Monde, du Bien, du Mal, mais de la vie : d’abord, ce fut l’Histoire, la tragédie, puis le baroque allemand comme chez Benjamin, les archives des hôpitaux psychiatriques pour Foucault, et aujourd’hui TikTok, instagram… On découvre le visible. Le « maintenant » du discours quotidien face aux discours scientifique et littéraire, affranchis de ce maintenant.

Fini les lois universelles, les grandes idées, aucune instance extra-historique : la subjectivité, la volonté de puissance derrière toute utilisation du mot « vérité », sont démasquées. Tout est expérience, rapport à, dynamique, langage. Michel Foucault, intégrant ce constat, proposera des histoires de.

Dans un entretien réalisé au Japon en avril 1978, Foucault soutient que Friedrich Nietzsche est le premier à définir la philosophie comme « l’activité qui sert à savoir ce qui se passe et ce qui se passe maintenant », en attribuant donc au philosophe le rôle de « diagnosticien » de l’actualité. Son époque est celle de Roland Barthes qui argumente sur le catch ou Georges Perec qui décrit des recettes de cuisine.

Ce texte inédit a été exhumé des 28.000 pages du fonds Foucault acquis par la BnF en 2013. Devrait arriver prochainement, entre autres, une édition des cours sur Nietzsche qu’il donna à Vincennes avant de passer au Collège de France.

   

Récit de Juan Escobar, fils de Pablo Escobar à l’origine du plus vaste empire de la drogue du siècle dernier.

À travers ses yeux d’enfant (une dizaine d’années), il nous raconte une partie de sa jeunesse « entourée de luxe et d’extravagance », et toujours accompagnée de « tueurs à gages néfastes, grotesques et violents », ses seuls amis.

Le ton extrêmement léger de l'histoire met en avant l’humanité de ces tueurs à gages-nourrices. On ne voit plus un gang, mais une famille (un peu barré bien sûr…)

Emma a 17 ans et plus un cheveu sur la tête. Souffrant d’alopécie, elle a été victime de harcèlement scolaire. Pour lui permettre de se reconstruire sa famille, prends un nouveau départ loin de ces sombres souvenirs direction Strasbourg.

Emma est prête à tout reprendre à zéro accompagné d’une nouvelle alliée, sa précieuse perruque…

Un roman lumineux et positif qui traite de sujet aussi sérieux que la maladie, les relations toxiques ou le harcèlement avec justesse et ce qu’il faut d’humour décapant.

Maëlle Desard jongle entre scènes fortes, flash back et instant plus léger avec habilité au travers d’un quatuor de personnages hauts en couleur et d’une rare profondeur. Une belle surprise…

 

Un lutin explore l'univers et est confronté aux éléments qui le composent: pierre, pluie, plume, maison, étoiles, nuit ... S'ouvre alors un dialogue étonnant et passionnant. joue ici avec les situations, les formes, les matières et les couleurs. Une boule se transforme en mouton, en nid douillet puis en cailloux et ainsi de suite au fil des pages et au gré de son imagination. Les lignes courbes deviennent droites, les droites se courbent. Elles forment, se transforment, se déforment. Le trait est fin, léger. C'est donc avec beaucoup de bonheur que le lecteur se plonge dans les pages du . Un album très bien construit dans lequel les techniques d'illustrations se mêlent et se croisent avec beaucoup d'harmonie, de douceur et de sens.

5-4-3-4-1-0 décollage imminent pour le délire cosmique imaginé par Matis Monvoisin et Arnaud Rouesnel ! Avec Hyper Loto Espace, les jeunes auteurs improvisent un space opéra déjanté et régressif.

Les scènes d'action se succèdent pour laisser surgir progressivement un fil rouge qui disparaît souvent derrière les intrigues secondaires où l'absurde règne en maître.

Cette narration débridée est assez enthousiasmante sur toute la première partie du livre mais s'essouffle un peu en milieu d'album à mesure que le scénario se complexifie avant de reprendre de plus belle en fin de partie

Le dynamisme de l'album se perçoit visuellement avec un dessin au feutre léger et vivifiant accompagné d'expérimentations plus plastiques.

Une belle surprise !

 

5-4-3-4-1-0 décollage imminent pour le délire cosmique imaginé par Matis Monvoisin et Arnaud Rouesnel !Avec "Hyper Loto Espace", les jeunes auteurs improvisent un space opéra déjanté et régressif.

Les scènes d'action se succèdent pour laisser surgir progressivement un fil rouge qui disparaît souvent derrière les intrigues secondaires où l'absurde règne en maître.

Cette narration débridée est assez enthousiasmante sur toute la première partie du livre mais s'essouffle un peu en milieu d'album à mesure que le scénario se complexifie avant de reprendre de plus belle en fin de partie

Le dynamisme de l'album se perçoit visuellement avec un dessin au feutre léger et vivifiant accompagné d'expérimentations plus plastiques.

Une belle surprise !

 

10 Juin 1944. Blandine, la fille du châtelain dont le manoir surplombe la ville d'Oradour Sur Glane, est recroquevillée, tapie dans l'obscurité d'un passage secret, camouflée par une cheminée. La ville est assiégée par les allemands, ses habitants sacrifiés à une politique de domination et à la cruauté d'un officier nazi sans pitié. Bafoué par cette adolescente qui a osé lui résister, le nazi n'aura de cesse de mettre la main sur Blandine. 10 juin 2005. Simon, un jeune adolescent, souffre de quelques absences. Son médecin diagnostique une narcolepsie, une maladie qui le plongerait dans des sommeils répétés. Et pourtant, comme il le dit dans son journal, il n'en est rien. A chaque black out, Simon se retrouve projeté à Oradour Sur Glane, spectateur de la détresse de Blandine face à son tortionnaire, heurtant furieusement le mur qui les sépare. Bouleversé par les événements, Simon tente l'impossible afin de faire sortir Blandine de ce passage secret sans issue. est un roman dramatique dont l'intrigue pseudo-fantastique permet de revenir sur les événements historiques d'Oradour Sur Glane, déjà commémorés en littérature jeunesse par l'œuvre de Rolande Causse. Le ton et l'ambiance pleine de tensions ménagés par Metantropo changent dès lors que le journal de Simon commence à relater ses propres faits. Une légèreté qui accompagnera le jeune homme dans le passé et pourra surprendre sans doute au début. Mais cela permet aux lecteurs de s'identifier à Simon tout en gardant une distance non négligeable face à un contexte relativement dur. Fort heureusement, l'action reprend rapidement sans lourdeurs et c'est dans un élan de solidarité inattendu de Simon, sans doute presque aussi valeureux que les élans de résistance de 44, que la bête meurt. A conseiller aux grands ados.

Que fait-on le matin avant de partir à l'école? On se lève, on se débarbouille, on prend son petit déjeuner … C'est qu'on en fait des choses dès son lever! Petit aperçu du programme du début de matinée. Le label Chan.Ok des Editions Flammarion comprend plusieurs petites collections d'ouvrages pour les enfants. Son originalité: tous ces livres sont issus de l'esprit imaginatif et créatif d'artistes sud-coréens. , album de la collection "Petits Matins" retrace le parcours d'une fillette de la sonnerie du réveil jusqu'au départ pour l'école par l'intermédiaire des objets qu'elle utilise. Sur la page de gauche, un court texte, et sur la page de droite, un objet du quotidien à l'esthétisme souvent très délicat et coloré. Cette création de Hyun-jung Park pour les touts petits est un vrai régal tant l'auteur semble réinventer l'imagier traditionnel avec poésie et originalité tout en restant simple et mignon à souhait.

Adtentio ! Finis les livres ennuyeux pour apprendre le latin ! 

L'apprentissage est possible par la lecture d'une histoire en bande dessinée. On suit les péripéties d'Alana qui se rend à Rome !

L'illustration en couleurs pétantes, et le ton léger font du bien ! Les dialogues en latin sont traduits juste à côté des cases de bande dessinée ce qui permet de ne pas être bloqué dans sa lecture.

Chaque chapitre est subdivisé en 4 parties : l'histoire d'Alana, le vocabulaire, la grammaire et un point culture. 

Tout au long du livre, on enrichit sa culture de l'histoire romaine : Connaissez-vous le mythe de Dédale et Icare ? Vous l'apprendrez page 70 ! Qui est l'ancêtre des Romains ? Page 139 !

Petit bonus à la fin, où se trouvent des corrigés et un lexique (latin-français) qui recense l'essentiel du vocabulaire et des expressions vues au cours des chapitres. 

Amusez-vous bien !

Les mamans ont-elles toujours des enfants parce qu’elles en ont envie ? A Cali, dans les années 1980, la touchante petite Claudia a de bonnes raisons de se poser la question. Sa maman, une Emma Bovary des temps modernes, s’ennuie profondément dans sa vie conjugale, avant d’entamer une relation passionnelle avec un autre sous les yeux de sa fille.

L’histoire d’amour est impossible, l’amant prend la fuite, et Claudia voit sa mère sombrer peu à peu. Comment faire remonter la pente à celle qui ne vous a jamais réellement aimée ?

Un livre léger, de prime abord : le soleil, les plantes vertes, la Colombie … Avant de basculer dans une torpeur dérangeante, où le précipice est omniprésent, où l’on plaint Claudia autant que sa maman, qui n’a rien trouvé de mieux que le whisky et les magazines pour s’éloigner de cette vie dont elle n’a jamais voulu.

Ne vous fiez pas à sa jolie couverture qui donne envie de l’emmener sur la plage, Nos abîmes, Prix Alfaguara en 2021, est bouleversant.

     

Voici donc un premier roman, assez inclassable, drôle et truculent, qui ressemble à un conte populaire, à une fable allégorique, suffisamment joyeux et enlevé pour se lire sans frein.  Construit de manière originale, découpé en courts chapitres, le récit s'agite et se disperse à l'intérieur de la structure rigoureuse, donne de la voix à plusieurs narrateurs, plusieurs points de vue, sème le désordre dans la bonne humeur et une folie douce, à l'image des personnages mais sans jamais pour autant, égarer ou agacer complètement le lecteur.

L'histoire est contemporaine et semble pourtant d'un autre temps, d'une autre époque, quand la lutte des classes n'a pas encore aboli la division de la société en catégories. " Nous avons le sang bleu et eux ils ont le sang sale !"

Un bandit moustachu, qui dérobe les riches pour redistribuer aux pauvres, se laisse piéger par un "petit-bourgeois du coin", Gheorge Marinescu et, s'il lui révèle, avant de mourir, l'endroit où il cache son trésor, il le maudit également, avec toute sa descendance, jusqu'en l'an deux mille.

Ainsi se déploie la malédiction du bandit moustachu sur la famille Marinescu et le récit s'emploie à narrer toutes les tentatives de cette famille pour rompre ce mauvais sort qui pèse sur les aînés à chaque nouvelle génération.  Prières, pèlerinage en Terre sainte, entrée au couvent, prise en charge d'une orpheline…, rien ne semble assez puissant pour briser le sortilège et engendrer une descendance apaisée et saine.

"C'est vrai qu'ils sont étranges dans cette famille, il y a les très méchants, mais alors quand ils sont bons, ils sont comme du miel… Puis il y a les fous aussi, il n'y a qu'à passer dans le village voir monsieur Guigui assis sur son banc depuis une éternité, et j'ai entendu que l'autre, la Gina, elle est toquée aussi, c'est pas pour rien qu'elle est allée se cacher à la ville".

Chez les Marinescu, c'est une succession de morts violentes, de frères ou sœurs perturbés, alcooliques ou dégénérés, pervers ou sadomasochistes, égarés, malhonnêtes, cupides, cruels et affreux en tous genres : "sa mère est une truie, son père est un porc, mais ils sont des cochons de race." Un défilé de personnages aux comportements douteux, souvent sombres et désespérés, extrêmes, presque tragiques mais qui virent au grotesque et à la satire tant la tonalité du récit se veut joviale par-dessus tout. Tout s'expédie très vite, semble léger.

 Mais, çà et là, l'air de rien, par petites touches, , laisse poindre, au fil des pages,  un léger malaise chez le lecteur, titille sa bonne humeur et son enthousiasme. A une naïveté apparente, s'ajoute une certaine gravité et le lecteur ne sourit plus aussi spontanément devant la noirceur de l'âme humaine et du monde qui l'environne. Mais cette impression ne dure pas :  ainsi il est  vite rattrapé par le rythme trépidant et l'effervescence du récit qui, au final,  contiennent  avec talent, cette  petite pointe de tristesse diffuse.